Au cours de l’été, les principaux marchés d’actions mondiaux, États-Unis, Europe et Chine, ont progressé dans une certaine sérénité. Seule la France fait véritablement exception, pénalisée une fois encore par son contexte politique.
Par Didier Bouvignies, Associé-Gérant, Directeur des gestions
Aux États-Unis, la publication d’indicateurs de croissance satisfaisants (ventes au détail, moral des chefs d’entreprise, croissance à 3,3%, en rythme annualisé, au deuxième trimestre1) a animé les marchés en cette période estivale. Parallèlement, des débats sur le marché de l’emploi suite à la forte révision des créations d’emploi au cours des derniers mois ont commencé à émerger. Par ailleurs, les indices d’inflation orientés à la hausse, notamment sur les prix à la production n’ont, à ce stade, pas engendré d’inquiétude majeure sur les prix à la consommation en dépit des droits de douane instaurés par l’administration Trump. De plus, la saison de publications des résultats des sociétés du S&P 500 s’est avérée très au-dessus des attentes, avec une hausse de 10,5% contre 4% attendu au deuxième trimestre et plus de 85% de surprises positives2. Enfin, la Fed semble désormais adopter une posture plus accommodante qui s’est notamment matérialisée par un pivot dans le discours de Jerome Powell lors du symposium de Jackson Hole le 22 août dernier.
Dans le même temps, en Europe, la période était marquée par un net redressement du moral des chefs d’entreprise dans le secteur manufacturier et une inflation core3 stabilisée à 2,3%4 . Cette dynamique milite désormais en faveur d’une pause de la part de la BCE après huit baisses de taux successives en quinze mois. Sur des aspects plus négatifs, on retiendra les espoirs, puis les désillusions concernant l’accord de paix en Ukraine et la ratification, jugée humiliante par nombre d’observateurs, de l’accord sur les droits de douanes avec les États-Unis à 15%, sans qu’aucune mesure de riposte ne soit mise en œuvre. Enfin, en Chine, les chiffres d’activité sont restés décevants alors que les droits de douane temporaires de 30% imposés par Donald Trump ont été reconduits en attendant la finalisation d’un accord.
En cette période de calme relatif, le MIT a lancé un pavé dans la marre en questionnant la rentabilité des investissements massifs dans l’IA à travers une étude mettant en évidence que 95% des projets en IA échouent parce qu’ils n’ont pas d’impact mesurable sur la productivité ou le compte de résultat5. De quoi alimenter le trouble après les propos tenus le 18 août dernier par Sam Altman, cofondateur et PDG d’OpenAI, sur le développement potentiel d’une bulle spéculative autour du secteur de l’intelligence artificielle, similaire à la bulle Internet, et un optimisme excessif des investisseurs.
Plus globalement, pour les mois à venir, plusieurs questions se posent. Quel sera l’impact des droits de douanes sur l’inflation en intégrant les effets retardés du stockage massif de début d’année? Doit-on s’attendre à un pic momentané ou à une tendance durable ? Et qui paiera l’addition? La répartition entre les entreprises américaines, le consommateur américain et les entreprises étrangères demeure un sujet d’interrogation.
Si le consommateur américain était le premier concerné via l’inflation, comme observé historiquement et étudié académiquement, deux possibilités seraient à envisager. La première induirait un pic momentané sans prélèvement important sur le pouvoir d’achat des ménages, permettant à la Fed de poursuivre la baisse des taux. Cas le plus favorable pour les marchés. Deuxième possibilité, une inflation plus durable alimentée par une hausse des salaires, dans un contexte où le taux de chômage reste bas en raison, notamment, de la nouvelle politique migratoire. Une telle situation entraverait la Fed dans son action, pénaliserait la valeur des actifs (actions et immobilier) et justifierait probablement une hausse du taux d’épargne des ménages.
Toutefois, la valorisation du S&P 500, actuellement à 24 fois les bénéfices attendus pour 2025 et 22 fois ceux des douze prochains mois2, traduit le sentiment particulièrement optimiste des investisseurs et l’effacement des craintes sur le cycle économique liées à la politique de Donald Trump. Un scénario «Goldilocks6» semble donc actuellement privilégié, induisant suffisamment de croissance pour améliorer la rentabilité des entreprises, sans excès, pour éviter les hausses de taux.
L’Europe reste le meilleur marché et dispose de plusieurs atouts. Les plans de relance portés par les initiatives allemandes et européennes favorisent une relocalisation de l’épargne globale abondante de la zone. De surcroit, une politique monétaire légèrement accommodante et la baisse observée du coût de l’énergie devraient également être des facteurs de soutien. Toutefois, deux sources d’inquiétudes demeurent : la force de l’euro et les craintes d’une déferlante de produits chinois en quête de nouveaux débouchés face aux droits de douanes imposés par Donald Trump. Il convient également de noter que, si la performance de la Zone euro a rattrapé celle des États-Unis en euro sur trois ans, cela résulte d’une appréciation des valorisations dans un contexte où les résultats des entreprises ont peu progressé.
Autre point d’attention pour la zone, la situation politique française, même si l’impact sur les marchés actions européens s’est révélé limité. Le contexte actuel, exacerbé par les discours de défiance permanents, empêche les électeurs d’avoir une vision claire et objective de la situation. Des solutions simplistes, voire populistes, sont fréquemment évoquées pour résoudre le problème du déficit et de la dette. De plus, les gouvernements successifs ont depuis trop longtemps évoqué la faillite de l’État français. Déjà en 2007, le premier ministre en poste interpellait l’opinion sur le sujet. La dette représentait alors 64% du PIB de la France. Elle est aujourd’hui à 114%7 . En parler depuis tant d’année sans prendre de véritable mesure pour l’endiguer a, sans doute, amené les Français à ne plus prendre au sérieux les discours catastrophistes.
Pour autant, malgré la forte probabilité de la démission du gouvernement en place le 8 septembre prochain, l’écart de taux d’intérêt entre la France et l’Allemagne n’a pas dépassé le pic de 88 points de base atteint lors de la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 20242. Deux explications. Si la situation budgétaire française est très dégradée, la balance courante qui représente le besoin total d’épargne de la nation, a été légèrement excédentaire l’année dernière et négative de 0,7% par an en moyenne depuis 20078. Les déficits de l’État sont compensés par l’épargne des ménages qui représente près de 19% de leur revenus, soit 4 points de plus qu’avant l’épidémie de Covid-198. Deuxièmement, ce niveau de spread vis-à-vis de la dette allemande, traduit implicitement une dégradation de trois crans de la note de crédit de la France par les agences de notation. Son taux d’emprunt actuel s’établissant davantage au niveau d’une notation A- alors qu’elle est notée AA-.
La situation devient néanmoins de plus en plus tendue car, contrairement à 2010, la France est désormais le plus mauvais élève de la Zone . Elle affiche le niveau de déficit public le plus important sans perspective d’amélioration claire dans le contexte politique actuel. Cette situation lui vaut d’emprunter actuellement à un coût de refinancement de sa dette parmi les plus élevés de la zone, proche de la Slovaquie et de la Slovénie et légèrement inférieur à l’Italie sur des maturités à 10 ans, mais supérieure sur celle à 5 ans. De plus, ce niveau de déficit public conduit les ménages à sur-épargner, phénomène connu sous le nom d’effet ricardien, limitant la capacité d’allouer l’épargne dans des projets porteurs de croissance. Toutefois, contrairement à la période 2011-2012, cette situation n’entraîne que peu d’effet de contagion à l’ensemble de la Zone. Elle reste spécifique à la France car des pays tels que l’Italie, l’Espagne ou le Portugal ont considérablement assaini leurs finances publiques au cours des dernières années. Il est donc probable, sauf événement mondial majeur, que les marchés attendront davantage l’échéance de 2027 pour mesurer la capacité de la France à respecter ses engagements européens.
[1] Source : U.S. Bureau of Labor Statistics, août 2025.
[2] Source : Bloomberg, 29/08/2025.
[3] Hors alimentation et énergie.
[4] Source : Eurostat, août 2025.
[5] MIT NANDA, The GenAI Divide: State of AI in Business 2025, août 2025.
[6] Scénario idyllique.
[7] Source : Ministère de l’Économie, des Finance et de la Souveraineté industrielle et numérique, Août 2025.
[8] Source : Banque de France, août 2025.
[9] Écart de rendement entre une obligation et un emprunt de maturité équivalente considéré comme « sans risque ».
Achevé de rédiger le 2 septembre 2025
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