Inutile de vous dire que la semaine dernière aura été vraiment pourrie. Le seul point positif que l’on peut retenir, c’est que le S&P500 a terminé AU-DESSUS des plus bas de l’année après avoir été EN-DESSOUS des plus bas de l’année pour aller voir ce qui s’y passait. Techniquement, on pourrait appeler ça un « retournement », mais c’est vraiment parce qu’on veut voir le verre seulement à moitié plein. Pour le reste, il ne faut se le cacher, les intervenants sont en train de « pricer » la récession. Que ça soit en Europe ou de l’autre côté de l’Atlantique. Tant que la FED ne montrera pas des signes de compassion, on risque bien de ne pas avoir vu le pire. Le mot RÉCESSION est partout ce matin!

L’Audio du 26 septembre 2022

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Rien de neuf pourtant

Si l’on fait le bilan de la semaine, c’est presque apocalyptique. Je suis simplement surpris – pour ne pas dire plus – de voir que la volatilité, l’indice VIX, ne s’excite pas plus que ça. Avons-nous encore trop confiance ? Faut-il encore un nouveau sell-off pour faire monter la volatilité à 40% ? Ou alors faut-il que le mot CAPITULATION vienne s’adjoindre au mot RÉCESSION dans les médias internationaux ? À moins que l’on attende encore un rapport circonstancié sur le KRACH BOURSIER dans des médias comme « Le Matin » ou « 20 Minutes » – des médias qui habituellement ne savent même pas que les bourses existent – pour que l’on ait un signal « final » de fond du trou ?

Bien malin qui pourrait le dire à l’heure actuelle. Une chose est sûre, depuis quelques semaines nous avions appris à gérer les marchés avec les taux qui montaient pour freiner l’inflation et en admettant que les Banques Centrales n’étaient plus nos amies. Mais par contre, nous avions cette capacité inouïe de « croire », d’imaginer ou même plutôt d’espérer que l’on allait échapper à la récession comme par miracle. Un conte de fées miraculeux entretenu par le fait que l’emploi ne s’est pas (encore) effondré et qu’apparemment, il est plus que facile de trouver un troisième ou un quatrième job aux USA, emploi nécessaire pour contrer les effets de l’inflation.

Et alors quoi ?

Sauf que là, tout d’un coup, après la semaine que nous venons de vivre, les experts en finance ont profité du week-end pour se lâcher en toute liberté. Le mot récession est donc revenu à la mode et il est devenu très compliqué, voire impossible de trouver un article publié entre vendredi soir et ce matin, qui ne mentionne pas le « mot-qu’on-n’-a-pas-le-droit-de-dire » au moins 22 fois…

Et le pire dans tout ça, c’est que depuis que l’on a admis la récession – c’est-à-dire depuis vendredi dernier, on la met à toute les sauces et elle devient rapidement responsable de tous les maux. En revanche, ce qui est assez fou, c’est que jusque-là, on avait cru que le fait d’avoir « modifié » la définition technique de la récession – merci à Monsieur Biden et à Madame Yellen pour ça – nous avions pensé que ça suffirait à l’éviter. Mais visiblement, la nouvelle la définition de la récession n’est pas encore allée assez loin et elle vient de se faire rattraper par la réalité.

Bear Market un peu partout

Aux USA on était en Bear Market depuis un moment et mis à part le fait que l’on teste les plus bas du mois juin, on était plus ou moins en terrain connu. Mis à part peut-être le Semi-Conducteur Index qui termine tout de même au fond du trou du fond du trou et qui laisse présager que le pire n’est pas encore arrivé et que la semaine qui nous attend pourrait bien être haute en couleurs. Surtout la couleur rouge. Mais là où cela se complique, c’est que l’Europe est en train de craquer de toutes parts.

Souvenez-vous, jusqu’à la semaine dernière, le DAX tenait les supports, le CAC40 n’était même pas ENCORE en Bear Market et le SMI restait un marché défensif. Sauf que depuis vendredi, tout cela est terminé et nous entamons la semaine dans la position de l’alpiniste qui est accroché dans une paroi et qui vient de rendre compte qu’il a perdu tous ses pitons, que sa corde est coupée et qu’il lui reste 3 mètres, que le prochain endroit pour se reposer est 30 mètres en-dessus et qu’il commence à neiger avec des rafales à 100 kilomètres à l’heure. Vendredi le CAC a terminé sa séance en Bear Market, le SMI l’a rejoint sur place. Quant au DAX qui était déjà dans le territoire des ours, il a accentué le problème en faisant péter tous les supports et en terminant sa semaine au plus bas…

Et la lumière fût

Le plus impressionnant, le plus fou dans tout ça, c’est que soudainement on se rend compte que l’Europe est dans une merde noire. Chose qui est connue de tous depuis des mois, mais là c’est comme si l’on PRENAIT enfin conscience de la chose est que finalement les AVENGERS n’allaient pas se pointer pour nous sauver la mise comme ça d’un coup d’un seul. Soudainement, ce matin il semblerait que l’on prenne conscience que la crise énergétique à elle seule a la capacité de nous mettre en récession sans forcer, que les restrictions à venir, dans le cas de cette crise, pourraient mettre l’économie à genoux. Que l’Italie est en train de partir en sucette avec un gouvernement d’extrême-droite qui sera explosif – presque aussi explosif que la dette italienne elle-même – et qu’en plus du fait que la récession nous guette, la belle union européenne est en train de se fissurer.

Et puis on s’est aussi rendu compte que l’Angleterre – qui n’est plus dans l’Europe, mais qui n’a toujours pas changé de place géographiquement – est également dans une merde noire, le gouvernement va devoir signer des chèques de plusieurs dizaines de milliards pour empêcher les sujets du Roi Charles de tomber dans la misère (pendant que lui se fait toujours repasser ses lacets chaque matin apparemment). Et que ces dépenses stratosphériques vont affaiblir le pays, la monnaie et faire exploser la dette encore un peu plus. Il n’y a qu’à voir le Pound qui vient de passer de 1.15 à 1.03 contre le dollar. God Save the King. La nouvelle Dame de Fer ne pouvait pas rêver mieux comme prise de pouvoir.

Début de semaine en fanfare

Nous voici donc dans un début de semaine qui promet d’être fabuleuse. Les futures sont déjà au Sud – mais de façon modérée, heureusement – et, à en croire la presse du matin et du week-end, tout le monde a pris conscience que la récession allait nous tomber dessus de toutes ses forces et que la question à laquelle il nous fallait encore répondre, c’est :

MAIS jusqu’où elle va nous enfoncer ? Et pourquoi est-elle si méchante ???

Manquerait plus que le COVID reparte à la hausse. En tous cas, moi je ne sors plus de chez moi et je porte le masque même quand je suis tout seul dans ma salle de bain, histoire de ne pas m’auto-contaminer. On ne sait jamais.

L’Asie

Ce matin le Nikkei est en baisse de 2.4%, pendant que la Chine et Hong Kong ne font rien. Le pétrole s’est également effondré « parce que l’on a pris conscience que la récession arrivait » et que plus personne n’allait acheter de pétrole à cause de la récession. Le cours du vélo PAS électrique est d’ailleurs en train de prendre l’ascenseur et l’or ne fait toujours rien. Le métal jaune est à 1644$ et le baril vaut 78$. Si ça continue de baisser, cet hiver on pourra au moins se chauffer avec des barils de pétrole. On notera aussi que le Cuivre est en train de gentiment se péter la figure pour aller chercher les plus bas du mois de juin alors que tout le monde prend conscience de l’arrivée de la RÉCESSION… On sait tous que le cuivre est l’indicateur avancé d’une récession qui arrive, alors dans le doute, autant lui faire la peau.

En revanche, je ne voudrais pas trop m’emballer, mais disons qu’il y a au moins le Bitcoin qui semble tenir ses niveaux de support. À l’heure actuelle, la star des cryptos tient toujours l’ultime support des 18’500$. Je dis : « pas trop m’emballer » parce que ça plusieurs fois que je pensais qu’il allait se casser la gueule et qu’il rebondit et cette fois où on dirait qu’il ne veut pas baisser, il va finir par se casser la gueule. Je commence à me sentir comme un indicateur contrariant. J’ai de plus en plus l’impression d’être dans une machine à laver le linge en cycle essorage.

Nouvelles neuves

La nouvelle du matin c’est le fait que le parti d’extrême-droite italien semble avoir remporté les élections. C’est donc l’incertitude supplémentaire dont on avait besoin en Europe. Le rendement des obligations italiennes devrait prendre l’ascenseur, quant aux indices boursiers, je ne suis par certains qu’ils nous fassent leur séance de l’année. Les résultats de cette élection ne sont pas franchement une surprise mais il va quand même falloir le digérer.

Autrement, pour rajouter un peu de « bonne ambiance » en ce lundi matin, on a droit au fait que la Livre Sterling est en train de « kracher » dans tous les journaux. On reparle de l’utilisation de l’arme nucléaire par les Russes, Zelensky nous a d’ailleurs annoncé qu’il ne « pensait pas que Poutine bluffait ». Et pendant ce temps, les Américains ont déclaré que « si Poutine utilisait l’arme nucléaire, cela aurait des conséquences catastrophiques… ». Oui, et il paraît que si tu sautes du 53ème étage sans parachute, tu meurs en arrivant au sol parce que le corps humain n’est pas trop fan des décélérations brutales, surtout quand c’est sur du béton. Non, les Américains sont vraiment formidables, à l’image de leur Président, on dirait qu’ils s’efforcent de dire un maximum de conneries en un minimum de temps.

À ce propos on pourra également citer Monsieur Bostic, membre de la FED, qui a déclaré que la FED « allait faire tout ce qu’elle peut pour éviter un ralentissement économique trop douloureux » – Vous voyez comme on se sent tout de suite mieux avec des nouvelles comme ça ? Finalement, il ne faut pas grand-chose pour commencer une belle semaine d’excellente humeur !

Les chiffres

Du côté chiffres du jour, il y aura le Chicago FED National Activity Index et les Business Expectations en Allemagne – ça c’est un chiffre qui doit être super à entendre. Et puis autrement nous aurons droit à plusieurs membres de la FED et autres diverses banques centrales qui vont parler et si c’est de l’acabit des commentaires de Bostic – qui reparlera d’ailleurs aujourd’hui – on préfèrerait peut-être qu’ils se taisent.

En tous les cas, les futures sont en baisse de 0.5%, techniquement le S&P500 est au plus bas de l’année et ça serait bien qu’il ne clôture pas plus bas, mais là on sent quand même que le taux de l’espoir est en train de baisser – un peu comme le Sterling – et qu’en même temps, la capitulation se rapproche à vitesse grand V.

Passez un excellent lundi quand même et que votre début de semaine soit bon. Moi je vous retrouve demain pour de nouvelles aventures et de nouvelles prises de conscience du style « utiliser le nucléaire c’est pas bien » et « que tout corps plongé dans l’eau qui n’est pas remonté au bout de 5 minutes est considéré comme foutu ».

À demain !

Thomas Veillet
Investir.ch

« I keep working because I learn something new all the time. »

Clint Eastwood