Un second pays propose dorénavant un cadre réglementant l’exploitation des ressources spatiales.

L’exploitation de ressources extra-terrestres a déjà été au cœur de nombreux scénarios de science-fiction mais dans quelques années, cela pourrait bien être la réalité. Dès lors il est intéressant de se poser la question de la réglementation de cette nouvelle activité alors que de nombreuses start-ups tentent de se positionner sur ce créneau.

 

Un peu d’histoire

Sputnik-1, à la base de toute la législation spatiale

La problématique du cadre légal relatif aux activités spatiales a été posée en pleine guerre froide, dès le 4 octobre 1957, lorsque l’URSS a lancé le premier satellite artificiel Sputnik-1. Les autres nations, à commencer par les USA, ont immédiatement pensé qu’il serait effectivement sage de définir un cadre réglementant ce que l’autre camp aurait le droit d’envoyer au-dessus de leur tête.

Les Nations Unies ont ainsi créé en décembre 1958 le COPUOS (Committee on the Peaceful Uses of Outer Space) chargé de réfléchir d’une part aux aspects techniques et scientifiques, et d’autre part aux aspects réglementaires. En décembre 1959, le Comité deviendra permanent, et en 1962 est créé le registre de l’ONU recensant les objets envoyés dans l’espace.

Au fil des ans, 5 traités internationaux relatifs à l’espace ont vu le jour. En 1967, le Traité de l’Espace (Treaty on Principles Governing the Activities of States in the Exploration and Use of Outer Space, including the Moon and Other Celestial Bodies, plus connu comme le « Outer Space Treaty »). Son texte proscrit l’utilisation d’armes de destruction massive depuis l’espace et oblige à une utilisation de l’espace à des fins pacifiques, il interdit la revendication territoriale des corps célestes et l’exploitation privée des ressources spatiales.

En 1968, ce fut le Rescue and Return Agreement qui encadre le sauvetage et le retour sur terre des astronautes, ainsi que la restitution des objets envoyés dans l’espace. Et vu la frénésie avec laquelle Russes et Américains envoient divers objets dans l’espace, en 1972 est signée la convention sur la responsabilité internationale des dommages causés par les objets spatiaux (Convention on International Liability for Damage Caused by Space Objects).

Afin de s’y retrouver plus facilement, en 1975 on a établi la Convention on Registration of Objects Launched into Outer Space qui définit les règles d’immatriculation des objets lancés dans l’espace.

Enfin en 1979 sort l’Accord sur la Lune (Agreement Governing the Activities of States on the Moon and Other Celestial Bodies), inspiré du droit de la mer, qui fait de la Lune et des autres corps célestes un «patrimoine commun de l’humanité» nécessitant une exploitation sous régime international.

 

Aujourd’hui

Les développements technologiques de ces dernières années dans le domaine des transports spatiaux ont amené les pays à donner un cadre juridique aux activités commerciales dans l’espace puisque des entités privées envisagent désormais d’exploiter des ressources extra-terrestres. Les Etats-Unis ont ainsi établi en 2015 le U.S. Commercial Space Launch Competitiveness Act qui autorise une société américaine à devenir propriétaire de ressources spatiales (p.ex. du minerai) mais pas de la planète ou de l’astéroïde dont ces ressources seraient extraites. Dans l’esprit, c’est très similaire au droit de la mer, puisque nul n’en est propriétaire mais chacun peut devenir propriétaire des poissons qu’il a pêchés.

La loi américaine ne concernant que les sociétés américaines, il y avait clairement un vide à combler et c’est ce qu’a fait fort opportunément le législateur d’un second pays. Il ne s’agit ni de la Chine, ni de l’Inde, ni même de la France ou de la Suisse mais bien du Grand-Duché de Luxembourg. Fort étonnamment sans grande publicité dans la presse (et quasiment rien dans les principaux médias anglo-saxons), le Luxembourg a voté en juillet une loi autorisant l’exploration et l’utilisation des ressources de l’espace par des sociétés privées luxembourgeoises.

Les sociétés ne désirant pas s’établir aux Etats-Unis auront ainsi une alternative européenne qui semble déjà séduire un certain nombre d’entre elles. La loi luxembourgeoise, plus souple que l’américaine, ne tient pas compte de la nationalité de l’entreprise ou des capitaux. Ce nouveau cadre juridique a d’ailleurs attiré les 2 leaders américains que sont Deep Space Industries et Planetary Resources.

Le Luxembourg, qui espère créer prochainement sa propre agence spatiale, travaille déjà en partenariat avec la Banque européenne d’investissement (BEI) et l’Agence spatiale européenne (ESA). Le pays espère ainsi développer un pôle de compétences en rapport avec l’exploration spatiale et attirer de nombreuses start-ups actives sur ce créneau déjà surnommé l’industrie du «new space». Plus de détails se trouvent sur le site dédié spaceresources.lu .

Le plus grand défi sera désormais du côté des auteurs de science-fiction qui devront intégrer les mots «loi luxembourgeoise de l’espace» à leurs dialogues. Heureusement pour Matt Damon, le film «The Martian» était déjà sorti en 2015, autrement son fameux monologue en aurait été quelque peu modifié.