Ce qu’il y a de bien avec les temps modernes, c’est que tout va plus vite. Même les guerres ou les crises géopolitiques se commencent et se terminent en 10 jours. Après les attaques de Pearl Harbor en 1941, il aura fallu plus de 300 jours pour que le marché efface la cicatrice laissée par les méchants japonais qui avaient attaqué lâchement les gentils hawaiiens. Par contre le général Soleimani est à peine sous terre que tout est déjà plié et le Nasdaq terminait au plus haut de tous temps, pendant que le S&P500 ratait le coche de pas grand-chose.

L’Audio du 9 janvier 2020

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L’Iran ne s’est pas rendu, mais Trump renonce à l’option militaire

Pourtant, l’Iran n’a pas rendu les armes et porté allégeance au drapeau américain, loin de là. Mais disons qu’ils ont répliqué en « prévenant » les Américains pour qu’ils puissent se planquer. Un moyen comme un autre de ne pas perdre la face, mais sans tuer d’Américains.

Dans la foulée le Président Trump a donc annoncé qu’il n’y avait aucun blessé suite aux attaques de missiles – ce qui laisse penser qu’en effet les bases US avaient été prévenues des tirs de missiles – ou que les Iraniens ont appris à tirer avec le gars qui utilise la mitrailleuse dans « La Grande Vadrouille » (les vieux comprendront). Comme il n’y a pas eu de victimes, le Président Américain renonce donc à l’option militaire et à celle de transformer Téhéran en grand parking, mais propose toute une gamme de sanctions économiques contre l’Iran. Ce qui ne change pas grand-chose, puisque sauf erreur les Américains importent peu de produits iraniens et que les Iraniens ne savent de toutes façons pas ce que ça veut dire de vivre SANS sanctions depuis au bas mot 1979.

Affaire classée

Les déclarations de Trump ont donc classé l’affaire Soleimani, il semblerait que la guerre Iran-USA modèle 2020 n’aura pas lieu et que nous, les professionnels de la finance, puissions enfin passer à autre chose et entamer notre année 2020 avec une vraie réflexion. Réflexion qui est d’ailleurs basée sur le fait « qu’il faut être quand même vachement prudents parce qu’on est très haut et qu’un de ces jours ça va bien finir par baisser ».

Un peu la même réflexion qu’en 2019, 2018, 2017, 2016 – tout ça pour finir l’année en disant : « ah ben j’aurais pas pensé que ça pouvait monter encore ». Bon, cette année ça sera plus facile parce qu’à force de réduire les positions pour limiter les risques on n’aura bientôt plus rien à risquer et les tribulations du marché intéressera les investisseurs à peu près autant que les résultats de la coupe du monde de curling quand les Suisses ne sont pas qualifiés.

Retour aux affaires

En tous les cas, depuis le début de l’année c’est la première fois qu’il nous est donné de lire des commentaires de marché qui ne parlent pas de guerre, de tensions politiques ou de Trade Deal, voir même de BREXIT, puisque certains journalistes ont même réussi à parler du fait que Microsoft a été « upgradé » par une grosse banque américaine qui pense que 2020 sera une année magnifique pour la compagnie de Bill Gates. Le titre prenait 1.6% hier soir sur la nouvelle. Mais il est vrai que quand la plus grosse boîte américaine prend 1.6% ça tire un peu tout à la hausse.

Je dois dire que ce matin je suis ému. Ému parce que cela fait à peu près 8 mois que je n’avais plus eu l’occasion de parler tout simplement d’une action sans mentionner le mot Trade Deal toutes les 5 secondes. Ah merde, je viens de le faire.

Enfin, quoi qu’il en soit, dès la conférence de presse militaire de Donald Trump fût terminée, l’ensemble des médias et des intervenants semblaient avoir bouclé le dossier iranien et laisser la vie normale et fabuleuse de Wall Street reprendre son cours.

Petite claque derrière les oreilles

Dans des journées pacifiques et ensoleillée comme celle d’hier, tout ne peut pas être parfait, le fait qu’il n’y ait finalement pas de guerre (pour le moment) n’arrange que moyennement certaines zones du marché. Vous voyez sûrement où je veux en venir.

Non ce n’est pas l’armement parce que ça on n’a bientôt plus droit d’en parler puisque c’est pas « ESG » et encore moins compliance. Je suis même surpris que les sociétés productrices de matériel de guerre soient encore cotées en bourse – moi je pensais plus au secteur « or et pétrole ». Alors que le général se faisait sauter en l’air à coup de drones, l’or et le baril s’envolaient de concert. Sauf que le fait que Trump n’envisage plus de soirée « lâché de Tomahawk à la Maison Blanche » a fait dégonfler le soufflé. L’or est de retour à 1559$ après avoir payé près de 1620$ il y a 48 heures.

Dans le sillage de l’or, le pétrole s’est fait démonter depuis que le Moyen Orient est devenu une terre de paix d’amour et d’élevage de colombes. Le baril a pris 5% dans les dents et se retrouve à 60$ – et hier au top de la conférence pour la paix du Président US, l’or noir a même payé 59.16$. Moi je vous le dis, les marchés sont quand même plus marrant quand ça se parle par missiles interposés.

En Asie

Ce matin en Asie on continue le Muppet Show, surtout sur le Nikkei. Il faut tout de même reconnaître que l’indice japonais est très rigolo à regarder depuis une semaine. On apprend que le général Soleimani est parti voir les vierges au paradis de l’autre, le Nikkei se prend 2% dans les dents. Le lendemain ça se calme, il reprend 2%, le 3ème jour les Iraniens s’énervent, on replonge de 2% et hier Trump parle de paix et d’amour et ce matin on REPREND 2%.

À croire que le Japon a son PIB qui est directement connecté à l’Iran. Ailleurs, le Hang Seng monte e 1% et la Chine de 0.5%. On notera tout de même que la Chine vit sa propre vie. Elle n’a jamais tremblé durant « la crise iranienne » et ne semble même pas concernée par la fin de cette dernière.

Nouvelles du jour

Aujourd’hui on se lève et le soleil est plus chaud, la lumière est plus belle, les Américains n’ont pas envahi Téhéran et il semblerait que l’on puisse parler d’autre chose. Donc au-delà du fait que la guerre est finie, on a plein de nouvelles hyper-importantes en première page des journaux. Il y a donc le rétro-pédalage de Trump, le fait que les Iraniens refusent de donner la boîte noire du Boeing qui s’est crashé hier à Téhéran. Boeing l’a demandé mais comme les locaux ne peuvent pas faire comme tout le monde, ça traîne. À côté de ça ET DANS les nouvelles TRES importantes, Harry et Megan se distancient de la famille royale britannique. Je ne sais pas si je vais me remettre de la nouvelle.

Ailleurs on apprend aussi qu’Erdogan et Poutine tentent de mettre fin à la guerre en Lybie. Tiens, celle-là elle était vachement moins présente sur Twitter. Et puis il y a le « drame Carlos Ghosn ». Alors là, je dois dire que ça devient à la limite du ridicule, l’ancien patron de Renault a fait SA conférence de presse et tout le monde ne parle plus que de ça. C’est donc une victime, lui il était parfait, il avait tout fait juste et c’est tout la faute des autres. Ok, c’est bon. On peut passer à autre chose ???

Chiffres à venir

Dans les choses que l’on va pouvoir aborder dans les heures à venir, il y aura les chiffres de l’emploi qui seront publiés demain. Vu que visiblement on n’a plus de problème géopolitique et qu’aucun analyste n’a encore eu la présence d’esprit de ramener le sujet du Trade Deal sur le tapis, on va pouvoir se concentrer sur les chiffres économiques et voir si l’on peut ramener un peu d’intérêt du monde libre sur le sujet des taux, de la FED et de Powell.

Tiens d’ailleurs, je dis ça je dis rien, mais on est où pour le Trade Deal – ce truc qui était si urgent ? On le signe quand alors ?

Bref, demain il y aura les chiffres de l’emploi et on attend 160’000 créations d’emplois, ainsi que le nombre de Pères Noël qui sont au chômage depuis le 26 décembre. Pour ce qui est d’aujourd’hui, nous aurons la production industrielle et le Trade Balance en Allemagne. Il y aura aussi le patron de la Banque d’Angleterre qui parlera, le taux de chômage en Europe et les Jobless Claims aux USA. Pour le moment les futures sont en hausse de 0.12%.

En ce qui me concerne je vais aller faire un lâcher colombes et couper des rameaux d’olivier pour me les mettre derrière les oreilles – les rameaux, pas les colombes. Et je vous retrouve demain à la même heure pour voir où nous en sommes de notre rallye de la paix.

Que la force soit avec vous.

Thomas Veillet

Investir.ch

“We herd sheep, we drive cattle, we lead people. Lead me, follow me, or get out of my way.”

George S. Patton