Dans les croyances du monde merveilleux de la finance, il y a le principe des Bull Markets et des Bear Markets. Lorsque l’on perd plus de 20% depuis les plus haut, on entre dans un Bear Market et l’on envisage de mourir dans d’atroces souffrances et surtout dans une crise économique qui fera passer la grande dépression des années 30 pour une colonie de vacances. À ce moment-là, tout le monde veut partir faire un autre métier, comme ouvrir une maison d’hôtes dans le Sud de la France, ou faire du fromage de chèvre. Et dans l’autre sens, lorsque l’on gagne 20% depuis les plus bas, on entre dans un NOUVEAU Bull Market, une saison d’expansion, d’avidité, d’argent facile et de titres qui ne font que monter et où tout le monde veut bosser à Wall Street, parce que ça en jette de porter un costard à 1500 euros et de rouler en Mercedes C63 AMG et de toucher des bonus avant pendant et même quand on se fait virer.

L’Audio 27 mars 2020

 

Télécharger le podcast (.mp3)

 

Débile à la descente, débile à la montée

Historiquement parlant, on sait que nous sommes en mode « Bull Market » entre 70 et 80% du temps – c’est pour ça que j’avais un pseudo qui était Morningbull, parce qu’autant être avec ceux qui gagnent « la plupart du temps » que d’être avec ceux qui gagnent « de temps en temps ». Comme disait mon fils : « moi je suis pour l’équipe qui gagne à la fin ». Et autant la citation régulièrement utilisée en football dit que c’est les Allemands qui gagnent à la fin, en finance, c’est les Bulls. C’est comme ça. Ça peut paraître injuste, mais le jour où vous pariez sur un marché qui va à zéro et l’effondrement du système capitaliste, autant acheter du terrain et commencer à cultiver des poules, comme ça au moins vous aurez des œufs – denrée qui est devenue soudainement impossible à trouver en période de confinement, vu que tout le monde à découvert la pâtisserie, que faire des gâteaux c’est trop cool. Je me demande d’ailleurs combien de gâteaux sont fabriqués par jour dans les ménages en confinement, parce qu’au vu du nombre d’œufs, ça doit être énorme. Y en a, ils doivent se nourrir exclusivement de fondants au chocolat trop cuit et de gâteau quatre-quarts qui étoufferait un régiment de parachutistes.

Mais je m’égare. Tout ça pour vous dire que le 12 mars nous sommes « entrés » en Bear Market, que le 23 mars nous avons enfin estimé que 10’000 milliards de plan de soutien économique pour l’économie mondiale – bien que tous les pays ne seront pas égaux – commençait à suffire. Et hier nous avons repris 20% depuis les plus bas sur le Dow Jones. Nous sommes donc techniquement dans un nouveau Bull Market. Sur le Dow Jones. Non, parce que le S&p500 n’y est pas tout à fait – à quelques poussières près et le Nasdaq est un peu en retard encore. Par contre en Europe, c’est reparti comme en 40 et même l’Italie est à nouveau en « Bull Market. À partir de là, on peut dire que nous venons de vivre le « Bear Market » le plus court de l’histoire. C’est quand même triste, y a des gens qui attendent depuis 11 ans que l’on passe en « Bear Market », finalement ça arrive et pouf ! en 14 jours, c’est déjà plié.

Ne nous emballons pas

Bon – je vous avoue que j’ironise un peu et je ne suis pas convaincu que tout soit réglé et que nous soyons sortis de la gonfle aussi facilement, mais sur le papier, là tout de suite, c’est presque hilarant. Mais pas hilarant super-drôle comme quand vous revoyez la Grande Vadrouille pour la 112ème fois et que vous êtes en confinement. Non ! Plutôt le rire nerveux qui laisse entendre que vous n’être que moyennement convaincu. Moyennement convaincu parce qu’en regardant les journaux du soir vous avez surtout envie de vous saouler pour oublier les news anxiogènes qui passent en boucle, mais aussi parce que quand vous voyez comment l’épidémie progresse aux USA, vous vous dites qu’il pourrait quand même bien avoir un retour de manivelle dans les prochaines semaines – juste histoire de faire comprendre à Trump qu’à force de vouloir redémarrer son économie par tous les moyens le plus vite possible, il risque de se prendre le « double effet kiss-cool » dans trois semaines.

Et puis quand on voit aussi tous ces plans de sauvetage, 2000 milliards par-là, 750 milliards par-ci, 5000 milliards du G-20 – ou peut-être que c’est les mêmes – un QE illimité à la FED et Powell qui se prend pour Tony Stark sur CNBC tous les soirs en disant qu’il encore du matos sous le pied, on se demande parfois si tout ce plan de sauvetage monté en kit à la mode Ikea va suffire pour éradiquer le virus. Alors peut-être que c’est toutes ces news anxiogènes qui passent en boucle qui nous empêchent de voir vraiment la lumière du génie de ces hommes qui nous gouvernent, mais toujours est-il que là tout de suite, même si on est de retour en mode « Bull Market », j’ai comme un doute qui m’assaille.

Mathématiquement ça doit fonctionner

Alors quand on fait l’addition de la totalité des plans de sauvetage un peu partout dans le monde – d’ailleurs je n’ai même pas réussi à trouver le montant total tellement ça ne veut plus rien dire – on se dit que ça ne peut que fonctionner. On pourrait même gagner du temps en disant que le marché n’a plus le droit de baisser et que si vraiment vous devez vendre quelque chose dans votre portefeuille, vous devez le vendre au gouvernement le plus proche de votre lieu de domicile. On gagnerait du temps.

Après, on peut aussi se poser des questions sur toute cette production de cash. Ceci ne va-t-il pas créer de l’inflation – si, probablement, c’est même pour ça que l’or monte sans arrêt ces derniers jours et que ce matin il est 1700$ – est-ce que ça ne va pas creuser les déficits des gouvernements qui sont déjà dans un état pathétique ? – Si, aussi, mais pour l’instant c’est un peu le principe de « Sauver le Soldat Ryan » – on est prêt à sacrifier plein de monde pour sauver un seul gars pour « garder une bonne image ». C’est exactement comme ça aujourd’hui, on est prêt à tout pour sauver l’économie, mais surtout la bourse, par contre on n’a pas assez de respirateurs dans les hôpitaux. C’est aussi pour ça que c’est assez difficile de parvenir à croire que l’on puisse remonter des gorges de l’enfer aussi facilement et en ressortir plus fort en l’espace de 15 jours alors que le problème de base, le Coronavirus, n’est toujours par réglé. Non parce que je ne sais pas si vous avez noté la chose, depuis le début de cette chronique je n’avais pas encore mentionné le mot Coronavirus, ni le mot COVID19 – depuis 1 mois, je l’utilise toutes les 3 phrases et aujourd’hui : RIEN… Est-ce que c’est l’influence des plans de sauvetage ? ou juste parce que le marché remonte et que l’on a une mémoire de poisson rouge ? Je ne sais pas, mais en tous les cas tout va très vite et absolument rien n’est réglé sur le front médical et ça pourrait aussi nous revenir en pleine figure lorsque les USA vont partir en vrille.

Pensée positive

Bon, il est temps d’arrêter d’être angoissé, anxieux et plein de doutes par rapport au soutien universel de nos bien aimés bienfaiteurs. Le marché n’est plus en Bear Market, tout semble avoir été « pricé » dans le marché et les experts en finance que nous sommes avons tous compris que le pire est derrière nous et que c’est pour ça que c’est parfaitement normal que le marché remonte à coup de 6% par jour – en même temps on a été complètement débile à la baisse, pourquoi pas dans l’autre sens. On peut même se dire que, vu la situation actuelle, peut-être que l’on va même pouvoir se reconcentrer sur les nouvelles fondamentales et sur les chiffres économiques.

Pour être honnête avec vous, je n’en sais fichtrement rien. Une chose est sûre, hier encore, on ne s’occupait trop des chiffres économiques. Et quand je dis qu’on ne s’en occupait pas trop, c’est un euphémisme, puisque les demandes de nouvelles indemnités de chômage aux States sont passées de 200’000 à 3’300’000 et que, malgré ça, le Dow Jones termine en hausse de plus de 6% -c’est clairement que pour le moment plus personne n’en a rien à foutre des chiffres économiques – ou tout au plus, on a anticipé le pire depuis bien longtemps. Et puis Trump a dit que l’économie allait repartir le 12 avril, alors ça restera juste un mauvais souvenir. Retenons aussi que Trump vient d’annoncer qu’il avait parlé avec le Président Xi-Jinping cette nuit. Xi Jinping lui a expliqué qu’ils avaient développé de très bonnes connaissances du Coronavirus et qu’ils allaient aider les USA à s’en sortir.

Ensuite on reparlera du Trade Deal.

Et ce matin ?

Ce matin l’Asie est légèrement en hausse un peu partout. C’est presque une journée d’avant le Coronavirus – peu de volatilité, très calme. Presque chiant. On n’a plus l’habitude. Le pétrole reste collé autour des 23$ et ne parvient pas à remonter malgré la bonne humeur ambiante depuis quelques jours. Et pour ce qui est des nouvelles du jour, on ne peut pas dire que l’on se déconcentre.

Nouvelles du jour

On reste très concentré sur le thème du Coronavirus, surtout depuis que les USA sont devenus le pays avec le plus de cas confirmés au monde, même ça, ils ne veulent pas le laisser à la Chine. Autrement c’est Corona à toutes les sauces et ça tourne en boucle. On notera que Roubini est revenu à nouveau pour dire que c’est pas fini et qu’on va tous vraiment y passer –c’est peut-être la seule bonne nouvelle du moment puisque la dernière fois qu’il est venu insister sur le fait qu’il fallait tout vendre, c’était en 2009 dans les premiers jours du nouveau Bull Market. Espérons qu’il nous fasse un grand chelem sur le sujet.

Autrement les grandes entreprises allemandes demandent à la BCE de se bouger les fesses pour mettre en place ces facilités de crédit promises – mon petit doigt me dit que les « grosses boîtes » cotées en bourse vont être soutenues AVANT les entrepreneurs qui ne peuvent plus bosser et que se font défoncer tous les jours. CNBC parle aussi de la « Crise de la Dette » qui arrive, on en parle peu, mais dans certains couloirs calfeutrés derrières des masques de protection, certains commencent à craindre que ce soit la seconde vague destructrice qui va nous démolir au moment où l’on sera en train de se relever.

Je vous dispense des chiffres économiques, puisque depuis hier c’est officiel ; tout le monde s’en fout. De nôtre coté on croule sous les publications ce matin – visiblement le confinement pousse nos camarades de jeu à écrire toujours plus. Il est vrai que les distractions se resserrent au fur et à mesure que les jours passent. Je vous encourage donc à « scroller-down » pour découvrir tout ce qui se dit et ce qui se pense dans le monde merveilleux de la finance, dans ce nouveau Bull Market naissant.

Je suis tenté de vous souhaiter un excellent week-end, mais comme on est dans un rythme ou c’est un week-end studieux tous les jours, je ne sais pas si cela fait du sens. Prenez soin de vous, restez au chaud, de toutes façons la semaine prochaine sera pourrie, il va neiger en plaine et on pourra même pas aller skier.

Que la force soit avec vous et on se retrouve lundi, comme disait Skywalker.

Thomas Veillet

Investir.ch

« The greatest teacher, failure is. » Maître Yoda