La semaine s’est donc terminée dans un bain de sang total, mais les Américains nous ont gratifiés d’un renversement phénoménal en fin de séance. Est-ce le signe que la fin de cette crise est proche ou est-ce simplement un répit pour le week-end ? Aucune idée, mais nous devrions y voir plus clair ce matin. Une fois de plus les futures américains pointent en hausse avant l’ouverture de New York, mais l’heure de l’ouverture est encore loin, sans compter que les Américains tiennent leur second mort du Coronavirus et que New York a découvert son premier cas.
L’Audio du 2 mars 2020
Une fin de semaine à l’image du reste
Nous avons donc bouclé une semaine immonde. Les indices ont plongé de 12% et les théories de la fin du monde ne cessent de surgir tous les 3 posts sur les réseaux sociaux. Chaque nouveau cas est utilisé pour en remettre une couche et ceux qui croient que l’on va s’en sortir sont de moins en moins nombreux. En fin de semaine la Suisse a donc interdit les rassemblements de plus de 1’000 personnes, la France ceux de 5’000 personnes et dans la foulée le sympathique Premier Ministre français a invoqué le 49/3 pour faire passer sa réforme des retraites. Ça tombe bien, les manifestations sont EN PLUS interdites !!! Encore une stratégie magistrale du Roi de France qui profite parfaitement de la situation. Plus vicieux c’est difficile.
Pendant ce temps, les indices se sont donc fait démonter propre en ordre, plus personne ne parvient à voir le verre à moitié plein et le marché est en monde sauve-qui-peut. Le cash est soudainement devenu le roi du monde à nouveau. Enfin, le roi du monde jusqu’à que l’on se retrouve avec une montagne de cash qui vous coûte une montagne de pognon, juste pour le laisser à la banque. Mais peu importe, pour le moment nous n’avons qu’une vision ultra-court-terme des marchés et de l’investissement. Déjà qu’en règle générale nous sommes incapables de réfléchir à plus de 5 jours, depuis le Coronavirus, c’est pire. Ces dernières heures, même le patron de l’OMS est venu dire qu’il fallait « que les marchés financiers se calment et qu’agir de façon irrationnelle n’allait pas aider ». Le patron de l’OMS vient dire à la finance de se calmer. C’est dire si on est tombé bien bas.
La FED à la rescousse ?
La seule bonne nouvelle de la fin de semaine, c’est le S&P500 qui s’est arrêté pile là où il devait pour terminer la séance presque au plus haut de la journée, le « reversal » affiché sur les graphiques de vendredi donne une légère bouffée d’espoir et ça, cumulé au communiqué de presse de Powell qui a dit qu’il ferait « whatever it takes » – pour soutenir l’économie et les marchés financiers, laisse penser qu’il y a peut-être encore un peu d’espoir. Je ne veux pas faire le mec éternellement positif – mais en fait si, quand même un peu – donc, oui ça baisse, oui il va y avoir un « trou » dans la croissance économique chinoise et mondiale, d’ailleurs les chiffres immondes du PMI chinois (au plus bas depuis 2004 et depuis qu’ils existent) le prouvent, mais une fois que le problème du virus sera derrière nous, il me paraît tout de même peu probable que la Chine abandonne et conserve ses usines fermées juste pour embêter l’Occident. Le Made in China devrait perdurer et la tendance reprendre son cours – je peine à croire que tout va s’arrêter et que l’on va se dire « tiens, on va changer l’économie, tenter de payer plus cher ce que l’on peut avoir moins cher ailleurs, réduire nos marges parce que c’est quand même plus simple de construire nos propres usines en Occident et de payer NOS ouvriers 10 fois plus cher que les ouvrier chinois » et dire au passage que le capitalisme c’est très surfait et que le partage et l’industrie équitable sont quand même des valeurs super-chouettes.
La semaine qui nous attend pourrait donc bien être placée sous le signe de la FED, puisque certains stratégistes s’attendent même à une réaction de Powell pas plus tard qu’aujourd’hui. En tous les cas, les futures sont en hausse actuellement et la Chine monte de 3% malgré les chiffres immondes publiés ce week-end – comme quoi, il y a tout de même des trucs qui sont dans les prix. Enfin, peut-être.
Le retour du cygne noir
Comme à chaque fois que tout part en vrille, il y en a un qui réapparaît comme la grippe saisonnière ; il s’agit du brillantissime, de l’excellentissime, du Dieu de la finance ; j’ai nommé : Nouriel Roubini. Le type qui avait prévu la crise des Subprimes et qui est 100% faux depuis, tente encore un coup d’éclat pour prouver que sa prévision « subprimesque » n’était pas un coup de bol.
Il a donc donné une interview en toute décontraction au magazine Der Spiegel – parce qu’il y n’y a plus que les magazines en langues étrangères qui l’invitent encore – interview dans laquelle il prédit que les actions vont encore se vautrer de 30 ou 40% et qu’il vaut mieux avoir du cash et des obligations gouvernementales – que des trucs qui rapportent une chiée de fric sur le long terme. Le Professeur Roubini n’a pas précisé si les 40% de baisse c’était à partir de ce lundi ou de lundi dernier. Mais il est vrai que cela n’a pas grande importance ; à ce niveau-là, on n’est plus à 10% près et puis, au pire s’il a tort, comme d’habitude, on l’aura oublié dans 4 jours. Je rappelle que, pour mémoire, Roubini avait prévu que le S&P500 irait à 333 quand nous étions à 666 et que, sauf erreur de ma part, il n’a jamais recommandé de tourner la veste à aucun moment… Ce qui tend à dire qu’il est short à 666 depuis 11 ans.
Quoi qu’il en soit, il vit son moment de gloire germanique et vient nous peindre le diable sur la muraille, c’est d’ailleurs ce qu’il fait de mieux. Ah oui, j’oubliais, Roubini a aussi dit que Trump n’avait aucune chance d’être réélu, même si les Démocrates étaient nuls. Pas sûr qu’il ne finisse pas l’année à Guantanamo ou quelque part dans une prison afghane.
Tout vendre, même l’or
La grande question que l’on se pose ce matin, c’est de savoir pourquoi l’or ne monte pas. Oui, le métal jaune est à 1600$ et ne fait que baisser depuis une semaine ou presque. Selon les médias financiers, c’est symptomatique parce que tout le monde a peur et que quand tout le monde a vraiment peur, on vend tout sans aucune discrimination. Y compris l’or. La seule chose qui semble apparemment très tendance, c’est les obligations du trésor américain. Faut vraiment vouloir.
Alors personnellement, j’ai une autre théorie. Non, parce qu’en général on achète de l’or pour « rester riche » après la crise. On dit toujours que si le capitalisme s’effondre, il restera une seule monnaie d’échange, c’est l’or et que ceux qui en auront continueront à être la race supérieure – en gros, au-dessus de la classe moyenne – c’est bien sauf qu’aujourd’hui on ne parle pas d’avoir de l’argent pour APRÈS l’effondrement du capitalisme, on parle du fait que l’on va tous mourir à cause d’un virus, alors laisser des tonnes d’or derrière nous ne sert à rien, autant sortir du cash et aller se finir à Ibiza – pour autant que les discothèques ne laissent pas entrer plus de 1000 personnes à la fois. D’ailleurs dans Walking Dead, le documentaire sur Netflix, on voit bien que personne ne parle d’argent – un bon fusil à pompe ou un sabre vaut bien plus que tout l’or du monde.
On y retourne ou on part en vacances ?
Ce matin c’est donc la hausse qui prime en Asie, reste voir combien de temps ça dure. En tous les cas les commentaires du matin ne sont pas très motivés et on a juste l’impression que ça remonte parce que ça ne veut juste plus baisser. Pour le moment. Mais le moral reste dans les chaussettes et pour donner un coup de fouet à tout le monde, voici que la Corée du Nord teste des « nouveaux projectiles inconnus ». Ça va sûrement aider.
En attendant le pétrole est au fond du bac à 46.12$, parce que plus personne ne fera le plein d’essence. Jamais. Même si les premiers signes débiles ont commencé puisqu’on a déjà entendu parler d’un objectif à 10$ durant ce week-end. Les extrémistes sont de sortie et c’est bien.
Les nouvelles du jour
Je ne vous cacherai pas que les nouvelles du jour qui nous intéressent sont toutes liées au Coronavirus, le reste n’est qu’anecdotique. Les Américains se prennent toujours la tête avec leurs élections à venir ; la dernière victoire de Biden semble lui donner une nouvelle chance d’affronter Trump. Et ça nous fait une belle jambe. CNBC continue de suivre l’évolution des morts liés au Coronavirus en direct sur son site – il n’est pas exclu qu’ils fassent une émission spéciale pour le 3’000ième mort et qu’ils vendent des casquettes et des t-shirts pour ça.
Autrement on nous matraque le fait qu’il ne faut pas paniquer avec une insistance qui donne presque envie de paniquer. Je ne sais pas si vous avez vu le mec que la Suisse à utiliser pour faire passer le message, mais Daniel Koch, le patron de la division maladies transmissibles à l’OFSP (office fédéral de la santé publique), fait presque passer Voldemort pour un boute-en-train. En tous les cas, moi, rien que de le voir, je panique.
Pour le reste on attend une intervention de la FED et un Bear sur Tesla est venu dire ce week-end que son nouvel objectif sur le plus gros fabricant de voitures du monde est de ….zéro. Il estime que la marque ne vaut rien et que les projets de Musk sont à classer dans « mégalomaniaque » et que l’on se rendra compte dans quelques temps que la bulle Tesla était la mère de toutes les bulles. En parlant de bulle, Virgin Galactics a repris 11% vendredi dernier.
Chiffres économiques
Côté chiffres économiques, il y aura un wagon de PMI’s un peu partout, mais ne nous leurrons pas, tout le monde va observer les canaux de communication des banques centrales, histoire de voir qui est le prochain à nous annoncer un stimulus et à nous dire qu’il ne laissera pas tomber l’économie et surtout pas la bourse. Les futures américains sont donc en hausse de 0.6% -mais ça n’a pas non plus l’air d’être l’euphorie. Le terme prudence semble encore faire partie du vocabulaire des traders ce matin.
Il me reste à vous souhaiter un bon lundi et un excellent début de semaine. On se retrouve demain pour voir si on a réussi à sortir une journée pas trop mauvaise sur 8.
Thomas Veillet
Investir.ch
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― Janne Teller, Nothing