Si l’on regarde la performance de la semaine dernière, c’était plutôt pas mal et les marchés semblent continuer à vouloir écouter la thématique des plans de soutien et des injections monétaires en tous genres. Les multiples déclarations du patron de la Banque Centrale Américaine ont également été le bienvenu, même s’il faut noter que l’interprétation de ses mots a été totalement libre et selon votre inclinaison à être un Bear ou un Bull, vous aurez vu les choses sous un angle différent. Mais force est de constater qu’en ce moment on a tendance à vivre dans une sorte d’optimisme exacerbé qui peut être parfois incompréhensible. Alors la question que l’on peut se poser en ce lundi matin, c’est de savoir si la semaine qui nous attend ne sera pas celle du changement de tendance.

L’Audio du 25 mai 2020

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La moyenne mobile des 200 jours

Déjà d’un point de vue technique nous arrivons à des niveaux qui ne vont pas forcément être très simples à franchir. En effet, sur les indices américains, nous nous rapprochons de la moyenne mobile des 200 jours – pour certains d’entre vous, ça ne voudra strictement rien dire, mais pour la majorité des « gros joueurs américains », ça représente toujours une zone difficile à franchir – que ce soit dans le sens de la descente ou dans le sens de la montée. En plus de ce mur qui se présente devant nous actuellement, il y a aussi le fait que depuis plus de 21 séances consécutives, nous sommes entre la moyenne des 50 jours et celle des 200 jours – en analyse technique ça veut dire que l’on hésite à prendre une direction depuis 3 semaines.

Si l’on regarde plus loin dans le passé, cette situation s’est présentée 28 fois depuis 1929 et 70% du temps, nous sommes sortis par le bas. Ce qui veut dire que l’on a 2 chances sur trois de repartir à la baisse dans les jours qui viennent. Alors oui, l’analyse technique n’est pas une science exacte, mais en même temps, l’ENSEMBLE de la finance n’est pas une science exacte. Je ne vais pas revenir sur le taux de réussite des analystes qui se rapprochent plus du pile ou face que d’autre chose ou des prévisions d’inventaires pétroliers qui approchent un taux d’exactitude de 0% – soit à peu près aussi efficace que Gilbert Montagné qui joue aux fléchettes. En partant de ce précepte, on peut dire que mon histoire de moyennes mobiles tient à peu près aussi bien la route que le reste.

Graphique du S&P500 – Moyenne des 50 jours en bleu – moyenne des 200 jours en rouge – Source : Investing.com

Le doute nous assaille

Nous sommes donc très haut par rapport au 23 mars. Le rebond a été spectaculaire et les intervenants commencent à se demander si nous ne sommes pas en train de nous emballer un tout petit peu et s’il ne serait pas le moment de lâcher un peu de lest, de revenir un peu plus bas, histoire de construire un nouveau « camp de base » pour repartir à l’assaut des plus hauts de tous les temps un peu plus tard. Plus tard quand l’économie aura vraiment commencé à redémarrer. Parce que soyons réalistes, bien que le déconfinement continue de progresser un peu partout dans le monde, ce n’est pas non plus l’euphorie absolue et les gens ne font pas la queue pour aller dans les magasins, ou alors c’est surtout parce qu’on a réduit le nombre de caisses dans lesdits grand-magasins pour faire illusion.

Au-delà du fait que ce « recovery » économique ne soit pas encore à son apogée et qu’il faille lui laisser un peu plus de temps pour se relancer, on se rend compte gentiment que le doute habite de plus en plus les marchés financiers – en tous les cas, les médias financiers. Si vous prenez le temps de lire les grands titres de la presse ce matin, c’est plus ce sentiment de fatigue et de manque de motivation momentanée qui ressort que le reste. Cet état de fait dure depuis un moment et le c’est sans grand succès pour le camp des Bears actuellement, mais disons que tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se casse. Sans compter que l’on a tendance – pour l’instant – à négliger peut-être un petit peu trop ce qui est en train de se passer entre la Chine et les USA.

Trade War : Saison 2

Loin de moi l’envie de jouer les oiseaux de mauvaise augure, mais disons que si l’on se souvient le stress que les marchés vivaient AVANT la crise du COVID à la moindre annonce de tension entre Pékin et Washington, je ne sais pas comment on doit interpréter ce qui se passe actuellement. Si l’on part déjà du principe que l’on est en train de délister une partie des sociétés chinoises cotées en bourse aux USA, chose qui peut paraître dérisoire au regard de l’économie mondiale, mais qui reste une belle claque en pleine figure pour la fierté du peuple chinois – mais passons – si l’on préfère ne pas ne parler pour ne pas exacerber les tensions, passons. Au-delà du delisting des sociétés chinoises, il y a aussi le fait que les Américains et ce jusqu’au plus haut niveau de l’Etat, s’accordent pour coller la responsabilité de toute la crise du COVID19 aux Chinois. Non seulement ils sont responsables de tout selon Trump, mais EN PLUS, on leur reproche de l’avoir fabriqué eux-mêmes dans leurs labos, excluant du même coup la responsabilité du pangolin et de la chauve-souris.

Mais comme si ces tensions « politico-économico-sanitaires » ne suffisaient pas, il y a maintenant le cas de Hong Kong qui nous occupe. La semaine dernières les Chinois ont donc mis en place une nouvelle loi qui devrait être validée ces jours lors du congrès du parti de Xi-Jinping – une loi qui transforme et qui réduit le concept de la liberté à Hong Kong à plus grand-chose. En gros, selon la nouvelle loi chinoise, le pangolin serait mieux considéré que l’être humain dans le futur. C’est dire. Les Américains n’ont pas aimé et les menaces de sanctions économiques fusent de tous les côtés. Pour l’instant, les marchés semblent digérer la chose avec une certaine complaisance, mais encore une fois, quand on voit le stress que l’on s’était mis sur le dos à chaque fois que l’on a envisagé un échec en ce qui concerne le Trade Deal avec la Chine et que là on a signé que la première partie de l’accord – juste avant de se prendre le COVID et le confinement en pleine gueule, on peut se demander si le Trade Deal signé en janvier ne va pas être remplacé par une déclaration de Trade War, ce qui n’aiderait que moyennement la reprise économique des deux pays – sans compter les dommages collatéraux en Europe, puisque que quoi qu’il arrive, à la fin c’est toujours l’Europe qui paie la facture économique – enfin, sauf chez LVMH et Hermès, puisque les Chinois – même fâchés – vont continuer à se trimballer avec des sacs à main hors de prix.

Memorial Day Today, mais après ?

Tout ça pour vous dire que lorsque l’on regarde les news de ce matin, que l’on voit comment ça chauffe entre les USA et la Chine – déjà on se dit que si on était il y a 5 mois, les futures seraient déjà en baisse de 3% et qu’heureusement qu’on a encore les plans de soutiens et les injections monétaires qui nous supportent, mais pour combien de temps encore ? Oui, combien de temps les Bulls vont gagner le championnat alors que la météo se gâte et que les tensions reviennent gentiment ? Pour être franc, bien malin qui pourrait le dire. Du coup la théorie qui dit que lorsque l’on est coincé entre la moyenne mobile des 50 jours et des 200 jours depuis plus de 21 jours on a deux chances sur trois de partir à la cave prend tout son sens. N’est-il pas ?

Quoi qu’il en soit, en ce début de semaine devrait rester calme encore quelques heures pour cause de week-end prolongé. En effet, non seulement les Américains sont en vacances pour cause de Memorial Day, mais en plus de cela, les Anglais sont aussi fermés. Et quand vous retirez du jeu les Américains ET les Anglais, autant vous dire que c’est soudainement plus calme. Ça nous donnera 24 heures de plus pour penser à ce que l’on va faire quand Trump va VRAIMENT se fâcher avec la Chine.

Dans tous les sens

Les marchés asiatiques ce matin reflètent parfaitement le doute qui plane sur nos têtes. Le Japon est en hausse de 1.5% parce qu’ils devraient bénéficier d’un Xième stimulus – et que certains croient encore que ça « pourrait » fonctionner. Quand on voit que ça fait 20 ans qu’ils essaient de stimuler et que ça réagit à peu près aussi violemment qu’un spaghetti trop cuit, on se demande si le gouvernement japonais n’a pas meilleur temps de racheter directement des actions de sociétés japonaise. Ah oui, zut, c’est plus ou moins ce qu’ils font déjà. Bref, le Japon est en hausse pour des raisons qui lui sont bien à lui. Pendant ce temps, Hong Kong baisse de 1% dans la foulée du bain de sang de vendredi dernier et la Chine ne fait rien, le parti communiste étant en congrès, personne n’ose bouger. Oui, le doute nous assaille gentiment on dirait.

Pendant ce temps, l’or est à 1727$ et le baril s’échange à 33.65$, rien à dire ce côté-là, si ce n’est que le pétrole semble de retour et que l’on s’emballe toujours un peu plus sur le thème du retour de la consommation.

Les nouvelles du jour et les chiffres

En ce qui concerne les nouvelles du jour, on tourne autour de tout ce qui s’est déjà dit dans cette chronique : la Chine, Hong Kong, Trump, la moyenne mobile des 50 jours et des 200 jours et le Memorial Day. On rajoutera aussi que Trump a fermé les portes des USA à tous les voyageurs en provenance du Brésil et que les futures sont en hausse de 0.35% mais que ça ne veut rien dire parce qu’en ce lundi les Américains seront en mode BBQ et Budweiser.

Côté chiffres économiques, nous aurons le PIB en Allemagne ainsi que l’IFO pour l’Allemagne également. Pour le reste, je conclurais en disant que les marchés sont en équilibre instable et que « pour le moment » ça tient encore et l’on se raccroche aux amphétamines fournies par les gouvernements et autres banques centrales, mais lorsque l’effet se dissipera et que l’heure de rendre des comptes du côté de la réalité économique aura sonné, ça pourrait se compliquer un peu. Mais en même temps, si on ne faisait que monter pendant les 12 prochaines années, ça ne serait pas drôle.

Je vous souhaite un très beau lundi, une belle semaine et n’hésitez pas à revenir nous voir demain matin au même endroit et à peu près à la même heure.

À demain.

Thomas Veillet

Investir.ch

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George Bernard Shaw