Alors visiblement si je m’absente quelques jours c’est immédiatement le retour de l’immense bordel que c’était avant que ça ne soit plus le bordel d’avant le monde d’après. Je ne sais pas trop ce qui s’est passé depuis jeudi dernier mais depuis que quelqu’un quelque part s’est rendu compte qu’éventuellement peut-être il se pourrait qu’il y aurait une possibilité de seconde vague de COVID19, on a immédiatement réanimé toutes les peurs que l’on pouvait avoir sur le sujet – sauf le fait que manifester à coup de centaines de milliers dans les rues de la planète en se tripotant et en hurlant pendant des heures pourrait éventuellement ne pas aider – ça on s’en fout cordialement – Non, mais nous, dans le monde fabuleux de la finance nous sommes immédiatement passé de « on danse tout nu sur la table en s’arrosant de champagne pour fêter le soutien des gouvernements et des banques centrales » à «OH MY GOD on a va tous mourir AGAIN parce que le COVID19 est de retour et l’arrivée de la seconde vague est inévitable, pourtant je vous jure monsieur l’agent j’ai mis mon masque et respecté toutes les distances sociales, enfin presque. Sauf avec mes amis ma maman, ma tata, mon tonton, mon psy, la caissière de mon supermarché et Emmanuel Macron ».

L’Audio du 15 juin 2020

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Et maintenant quoi ?

Je ne vais donc pas vous refaire les épisodes de la fin de semaine, même si je regrette profondément de ne pas avoir pu écrire une chronique sur l’effondrement de jeudi et le violent retournement de veste qui allait avec, il me semble plus logique d’essayer de voir un peu plus loin en avant en ce lundi matin, plutôt que de rester bloquer dans le continuum espace-temps et contempler encore et encore la taule de jeudi dernier. Taule qui représente notre arrivée dans le monde d’après le monde d’après qui venait juste après le monde d’avant. En fait on est dans le nouveau monde d’après. Le monde d’après 2.0. Un monde d’après qui ne sera pas si super que le monde d’après d’avant parce que là tout de suite, la plupart des experts en COVID19 avaient déjà tous changé de jobs et étaient devenus experts en racisme et que, du coup il faut retrouver des experts en COVID19 qui sont formés ou essayer de reformater des experts en racisme qui seraient capables de revenir sur le sujet et nous expliquer les conséquences éventuelles d’une seconde vague dans le monde d’après le monde d’avant d’après.

Pour faire simple, alors que depuis deux semaines nous étions en pleine euphorie en train d’engranger les profits et de nous noyer sous les gains en bourse et faire la queue chez Mercedes AMG pour remplacer nos vieux diesel avec tous ces profits en bourse que l’on a accumulé depuis que les injections monétaires et les soutiens affirmés de nos autorités, il se trouve qu’à plusieurs endroit dans le monde l’épidémie de COVID19 semble retrouver des couleurs et une certaine joie de vivre. Alors pour être franc, je ne suis pas certain que 7 cas de contamination à Pékin sur 1.6 milliard d’habitants en Chine soit une raison de s’enterrer dans son bunker de confinement à 14’000 kilomètres de là, mais disons que vu notre tendance à exagérer à peu près tout ce qui nous passe sous la main, on peut comprendre la vitesse du débalonnage de la semaine dernière. Mais maintenant, la question est de savoir ce qui va se passer ensuite.

Le Hashag #COVI19LERETOUR fait son apparition

La question que nous tous – experts en investissement allons tous nous poser, est de savoir si le « top intermédiaire » que l’on vient de faire sur les indices mondiaux est le reflet d’un besoin de correction temporaire parce que l’on était monté trop vite trop haut ? Ou est-ce que c’est le reflet que finalement on se rend compte que :

  • Le COVID peut revenir et que peut-être on s’est déconfiné comme des couillons en prenant des risques inconsidérés, et que si le COVID revient et que l’on n’est toujours pas trop prêt, ça ne serait pas joli-joli. Du coup on s’est aussi rendu compte que l’on a un peu oublié d’aller à la fenêtre pour applaudir les médecins et les infirmières et que l’excuse d’avoir dû aller à la manifestation contre le racisme et contre la violence policière et pour les pistes cyclables et parce qu’on avait apéro avec 64 potes au bar du coin, ne sera pas forcément valable.
  • Que l’on est peut-être en train de se rendre compte que l’économie va repartir, oui, mais au rythme d’un escargot au galop, plutôt qu’au rythme d’un étalon dans les vastes plaines du Texas, chose que nous avions largement anticipé jusqu’à maintenant. Il faut dire que l’étalon au galop dans les plaines du Texas, c’est quand même plus glamour que l’escargot de bourgogne. Sauf quand faut saucer avec le pain.

Donc du coup, depuis jeudi 22h, l’angoisse est de retour et mes voisins de table au resto jeudi soir qui s’expliquaient mutuellement comment depuis quelques semaines ils sont devenus des « grands-investisseurs » risquent d’avoir un réveil difficile. Il faut noter aussi que si vous êtes un politicien ou un membre d’une banque centrale quelque part dans le monde, depuis 144 heures, il devenu hyper-tendance d’afficher son « inquiétude » à propos du retour de la vengeance du COVID19 sur les réseaux sociaux. Ou sur les chaines d’infos à défaut d’autre chose. Ce week-end il y a eu Monsieur Kaplan de la FED qui est venu exprimer ses doutes, ses peurs et ses inquiétudes. Il ne l’a pas fait pendant que 10 millions d’intellectuels manifestaient côte à côte dans la plupart des villes américaines sans masques mais avec force et conviction, mais maintenant que le nombre de cas et le nombre de décès journaliers repart à la hausse, soudainement il se montre « très concerné ». Monsieur Kaplan, c’est le patron de la FED de Dallas. Rien à voir avec l’étalon dans les plaines du Texas cité plus haut. Mais il n’y a pas que lui, le gouverneur de l’état de New York, Monsieur Cuomo, parle aussi de refermer certains endroits de son état si les choses devaient partir en vrille. Heureusement que dans tout ce vacarme, il y a tout de même Monsieur Kudlow qui n’est rien moins que le Conseiller Economique de Trump, qui estime que ça va bien se passer et que la seconde vague, c’est du pipeau.

 

Le doute

Tout ça pour vous dire qu’entre les belles certitudes de lundi dernier et les doutes qui nous assaillent depuis jeudi dernier, en ce lundi matin on fait moins les malins et c’est un peu plus compliqué. Je crois que là tout de suite ; « la question elle est moins vite répondue », contrairement ce qu’en pensent d’autres experts. Et alors que le doute s’installe dans nos esprits bullishs et convaincus, en ce lundi matin les marchés asiatiques et les futures américains se sont tous parés d’une belle couleur rouge sang qui rappelle furieusement certaines belles journées de mars alors que le confinement commençait et que les marchés se faisaient décimer à la tronçonneuse. Actuellement le Japon recule de 0.55%, le Hang Seng abandonne 0.8% et la Chine baisse de 0.14%, parce que quand même, il y a des cas qui émergent à nouveau et ça fout les jetons.

Les futures américains affichent un recul de près de 1.3% et laissent supposer que le S&P500 est à nouveau en train de dire « bye bye » aux 3’000 points. Pendant ce temps l’or caracole sur les 1740$ et se dit qu’il y a peut-être un truc à jouer pour cajoler et rassurer les investisseurs. Le pétrole repasse sous les 35$ à l’instant, parce que l’on se dit que « quand même, on ne sait jamais » et si on retournait en confinement et que les avions qui ont à peine recommencer à voler arrêtaient de nouveau ça ne serait pas bon pour la consommation pétrolière. Tout comme les aménagements routiers psychédéliques mis en place à Genève par notre génie de la mobilité ne favorisent pas non plus la consommation pétrolière, bien que sur ce coup-là, je ne suis pas certain qu’il y ait une grosse influence sur le prix du baril.

Nouvelles du jour

La première chose qu’il faudra retenir dans les nouvelles du jour ; c’est surtout que le Coronavirus est de retour en tête de gondole dans à peu près tous les médias qui abordent courageusement le sujet de la finance. On a presque oublié le sujet du racisme. Oui, et puis maintenant que l’on a bien bossé sur le sujet en supprimant les têtes de choco dans les Migros et en virant « Autant en emporte le vent » des plateformes de streaming et que l’on bien augmenté le niveau de débilité dans notre société, on peut commencer à reparler de la pandémie, ça nous occupe au moins deux articles par jour. On parle donc pas mal du fait que Pékin est en train de se « refermer », pendant que Macron prenait la parole pour annoncer que tout pourrait rouvrir en France et que le racisme c’était pas bien et qu’il ne démissionnerait pas – hélas – il a aussi annoncé que les coûts de la relance économique ne seraient pas supportés par les ménages, mais n’a pas précisé par qui ou si dorénavant le gouvernement jouerait à l’Euromillions pour essayer d’éponger la dette. Par contre globalement, son discours d’hier était à peu près aussi passionnant qu’un film muet en noir et blanc au sujet de la reproduction des castors en Gaspésie dans les années 20.

Pendant ce temps, si ça n’est pas le Nasdaq qui bat des records, les USA ont décidé de ne PAS baisser les bras et ce week-end, pour la première fois de l’histoire la dette américaine s’élève à plus de 26 trillions de dollars. Et puis le truc de bien avec la dette, c’est qu’elle fait que monter et que jamais elle n’est victime de sell-off ou de prises de profits. Mais c’est pas si grave, 26 trillions, c’est quoi de nos jours ? À peine 17.5 fois la capitalisation boursière d’Apple. Une bricole je vous dit !

Autrement on retiendra que l’Inde met son économie en berne pour lutter contre le COVID19 – oui, on s’en fout parce que c’est super loin et que globalement on se préoccupe moins du stress du COVID dans la banlieue de Bombay que dans la banlieue de New York, mais quand même, ça fait un article de plus sur le sujet dans un journal. Il y a aussi un expert qui pense que la récente faiblesse des marchés et une opportunité unique d’acheter du Microsoft ou de l’Apple. On sent la prise de risque agressive. On parle aussi du fait que Biden est favori pour devenir le nouveau Président des USA – c’est dire le désespoir dans lequel les gens doivent se trouver. Il faut dire que Biden a fait un « move » magistral en envisageant de prendre une Vice-Présidente noire. Il fallait être visionnaire pour y penser et ça ne sent pas DU TOUT la récupération. Peut-être que Trump devrait prendre Kanye West comme Vice-Président pour compenser. Et puis, je ne peux pas conclure cette avalanche d’infos passionnantes sans vous parler de la dernière étude parue sur Markewatch ; il y a un analyste quelque part qui s’est amusé à observer ce que les marchés font historiquement après une baisse de 6% comme jeudi dernier. Après des heures de recherches, il apparaît que six mois après une baisse de 6%, des fois le marché est en hausse et des fois le marché est en baisse Et ça marche la même chose un mois ou trois mois après. Comme quoi ça valait vraiment la peine de se lever pour ça.

Chiffres économiques

Pour ce qui est des chiffres économiques de la semaine, il y aura le PPI en Suisse, le CPI en Italie, le Trade Balance en Europe et le New York Empire State Manufacturing Index aux USA. Comme je le disais plus tôt, les futures sont en baisse de 1.3% à New York et la seconde vague se prépare à nous frapper violemment entre les deux oreilles. Surtout dans les médias, mais en même temps faut bien faire vendre.

Je crois que c’est tout ce qu’il y avait à dire en ce lundi matin. Moi je vous retrouve demain pour de nouvelles aventures que j’imagine passionnantes avec plein de théories abracadabrantesques qui ne tiennent pas la route, mais avec lesquelles on aime bien se faire peur quand même ! Passez une belle journée et je me réjouis déjà de me lever à 4 heures demain pour remplir des pages blanches avec des petits caractères gris très foncés afin de conserver un équilibre et d’être politiquement correct.

Thomas Veillet

Investir.ch

« Il y a quand même moins d’étrangers que de racistes en France ». Coluche