Les Etats-Unis ont commencé la vaccination à grande échelle. Cela aura été indubitablement LA nouvelle de la journée. Pour être franc, ça ne s’est pas ressenti sur le marché, ou en tous les cas, pas en clôture. On a bien eu un semblant d’euphorie à l’ouverture alors que les premières images de gens vaccinés tournaient en boucle sur CNBC, mais une fois que l’on eut « admis » la nouvelle, les intervenants ont commencé à « prendre les profits ». Oui, parce que comme on savait depuis bien longtemps que Pfizer/BioNTech allait venir avec un vaccin et que ça allait fonctionner, on prenait les bénéfices. Le bon vieux « sell the news » ou « vendez la nouvelle », pour ceux qui préfèrent. Et puis on sent aussi qu’on est au bout de l’année et qu’on n’a plus vraiment l’envie d’y aller alors que la plupart des nouvelles sont « dans le marché », il faudrait quelque chose qui nous surprenne vraiment pour que les quelques jours qui restent sur 2020 soient vraiment utiles à quelque chose. Non parce que là on vit vraiment sur du réchauffé on dirait. Les vaccins ça n’impressionne plus personne et on aimerait surtout voir que cela apporte du concret, plutôt que des promesses. Le Stimulus, on attend de voir parce que bien que les dernières négociations soient bien avancées et que l’on s’autorise à penser que les Sénateurs ne quitteront pas Washington sans avoir « fait quelque chose », le marché aimerait – là aussi – voir du concret. Et puis Biden a été confirmé dans son rôle de Président, mais étonnement il semble soudainement moins « Messie » qu’il y a quelques mois. Maintenant il va falloir délivrer et faire autre chose que causer, ce qui promet d’être bien plus rigolo. En résumé, on s’est excité sur du vent ces dernières semaines et aujourd’hui, avec l’arrivée du vaccin ; c’est l’heure du réveil et de concrétiser les choses, sauf que ça va prendre du temps et que le marché n’est pas toujours très doué en ce qui concerne la patience.

L’Audio du 15 décembre 2020

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Vendez la nouvelle

Donc hier le vaccin de Pfizer/BioNTech a pris place sous les projecteurs parce qu’il est FINALEMENT LÀ. Finalement on va pouvoir passer à la pratique et plus à la théorie. Il est d’ailleurs assez étrange de voir comment on s’est emballé lorsque l’on a annoncé l’arrivée du vaccin. Je n’ai pas besoin de vous rappeler la journée de folie que l’on a vécu ce « fameux » lundi. Mais aujourd’hui il est fascinant de voir comment, lorsque l’on entre enfin dans la partie « pour de vrai », comment le marché se dégonfle et se désintéresse de la chose. Pourtant si ce vaccin fonctionne et en plus avec l’arrivée de celui de Moderna dans les jours qui viennent, on devrait concrètement se diriger vers un ralentissement de l’épidémie et même, à terme, sa disparition totale. Malgré cet espoir, hier les intervenants ont vendu massivement Pfizer/BioNTech comme pour ne pas faire mentir l’adage boursier qui dit « achetez la rumeur et vendez la nouvelle ». Les deux titres que l’on a montrés comme étant les sauveurs du monde se sont fait laminer proprement hier.

Graphique de BioNTech – Source : Tradingview.com

Pfizer a perdu plus de 4% – ce qui est énorme pour Pfizer – et BioNTech a plongé de 14%. On peut quand même se poser des questions sur l’état mental du marché lorsque l’on voit des trucs comme ça, mais il faut malheureusement faire avec. D’un point de vue strictement fondamental, il est clair que le vaccin ne va pas transformer Pfizer en Apple ou en Amazon, ça reste une pharma et un veau de la cote, rien de nouveau sous le soleil, je ne suis même pas certains que les ventes du vaccin seront frappantes au bilan annuel. C’est différent pour BioNTech chez qui l’impact sera bien plus significatif. Quoi qu’il en soit – alors que la journée était censée être une fête anti-COVID, sur le marché on était plutôt en mode prise de profits alors que l’on continuait à parler de confinement massif à venir aux USA – que le Maire de New-York demandait à ses concitoyens de se préparer à un «full lockdown » dans les jours à venir et que l’on annonçait que la barre psychologique des 300’000 morts du COVID avaient été franchie aux USA. Un peu comme si hier, on avait pris conscience que l’on allait mettre du temps à « revenir à la normale » – Bill Gates – qui n’a jamais été autant volubile de sa vie – a d’ailleurs annoncé que les six prochains mois seraient les pires de la crise et que ça allait être très dur avant d’aller mieux. On dirait presque que l’on a essayé de gâcher la fête du vaccin.

Et pendant ce temps, le Sénat brasse de l’air

Alors que l’on se posait des questions sur la suite de la pandémie et que l’on se demandait si le vaccin était LA SOLUTION, chose qui était plutôt claire il y a encore 48 heures, les politiciens de Washington continuent à bosser comme des chiens pour trouver un moyen d’arriver avec un plan de relance qui tienne la route et qui soit crédible. Et surtout qui rende les gens heureux et leur fasse oublier qu’il y a un mois encore on parlait de 2’200 milliards de stimulus et que soudainement on est en train de nous dire que 900 milliards c’est presque mieux pour relancer l’économie. C’est moins, mais c’est mieux parce qu’au moins là-dessus, ils sembleraient qu’ils seraient capables de le voter d’ici la fin de la semaine. Sauf que là, on n’y croit plus vraiment.

Le S&P et le Dow Jones terminent donc en baisse légère, ce qui n’est pas une catastrophe fondamentalement, c’est plus le « reversement » qu’ils nous ont offert dans la journée qui a stressé le marché. Hier matin on avait tellement espéré que vaccin nous immuniserait contre tout et aussi contre les vendeurs, que la déception était immense. En Europe on n’a d’ailleurs pas eu le temps de se faire la même réflexion, parce qu’à la clôture des marchés du Vieux Continent, New York était encore en hausse et nous on surfait encore sur la vague dite du « vaccin c’est trop cool et le BREXIT y a l’espoir », alors que les Américains se disaient déjà : « ouais mais le vaccin c’est dans les prix ».

Le retour de la vengeance du Nikkei

Lorsque je suis rentré en religion, rentré dans la finance, qu’à la fin des années 80 j’ai mis les pieds pour la première fois de ma vie dans une salle de trading, on ne parlait pas du Nasdaq, du SOX et des technos. Encore moins du Bitcoin et de la Blockchain. Par contre, on ne parlait QUE du Nikkei. C’était l’avenir du monde, la prospérité économique, l’avenir de la technologie – ils avaient quand même inventé le Walkman – et si vous ne savez pas ce qu’est un «Walkman », c’est que vous êtes définitivement trop jeune – en ce temps-là, on imaginait que le Nikkei ne s’arrêterait plus de monter. Et puis l’orchestre s’est arrêté de jouer et la bulle japonaise a explosé. L’indice est passé de 39’000 à 15’000 en quelques années, puis a même touché les 7’000 en 2009. Depuis ça ne fait que monter et là maintenant tout de suite, l’indice vient d’atteindre son plus haut niveau depuis 29 ans. Je ne pensais par revoir ça de mon vivant tellement le Nikkei a eu été dans le coma ces dernières années. Toujours est-il que ce matin je suis tombé sur un article qui expliquait comment faire pour profiter du « reste de la hausse » en direction des 40’000 – oui, parce que maintenant c’est évident. On va directement retourner au plus haut alors que l’économie japonaise est toujours à moitié dans le coma et que le reste du monde est en pleine pandémie. C’est assez logique. Et puis après tout, depuis le 30 octobre, le Nikkei n’a pris que 16%, ce qui est très raisonnable si l’on compare avec Tesla.

Graphique du Nikkei – Source : Tradingview.com

Toujours est-il que si l’engouement du Nikkei se propage en dehors de Tokyo, ce matin les indices de la région sont tous dans le rouge parce que la journée à New York n’était pas terrible. Le Nikkei recule donc de 0.34%, le Hang Seng recule de 0.65% et en Chine on baisse de 0.45%. Pendant ce temps l’or est à 1838$ et le pétrole est à 46.71$. On notera qu’hier le baril a brièvement titillé les 47$ parce qu’un tanker a explosé quelque part dans un port du Moyen Orient gâchant plein de pétrole brut et réduisant du même coup l’offre mondiale.

Les nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, on parle de l’élection définitive de Biden puisque les grands-électeurs ont voté et que même les Républicains ont concédé la défaite. Reste plus que Trump qui doit concéder, mais il n’y a rien de moins sûr. D’ailleurs pendant ce temps, Trump continue sa politique habituelle puisqu’il a viré le Procureur Général William Barr hier. Le pourquoi du comment n’a pas réellement d’importance, ni d’impact sur le reste du monde. Le Président montre probablement que c’est encore lui le Président pour quelques semaines. Autrement on parle beaucoup des nouvelles mesures de confinement alors que la pandémie est clairement hors de contrôle aux USA et que ce n’est pas mieux en Europe. Ou à peine mieux. Le chiffre des 300’000 morts aux USA a également bonne place dans la presse et on a comme l’impression que le COVID-O-Meter va pouvoir recommencer à fonctionner. Les vaccins sont arrivés, on va commencer à se souvenir que rien n’est gagné on dirait.

À propos de vaccins, la commission d’approbation de la FDA devrait se réunir jeudi soir pour évaluer les données du vaccin de Moderna. Moderna qui doit d’ailleurs être terrifié de l’approbation quand on voit ce que ça a coûté à BioNTech. Et puis pour le reste, on se prépare au meeting de la FED, même si l’on n’attend rien du tout ou pas grand-chose. Rien que le fait que ça soit le dernier meeting de cette année de merde suffit largement à le rendre intéressant. On espère que 2021 sera mieux, mais à voir ce qui nous attend – par moment on doute. On notera d’ailleurs que 17 cas supplémentaires de COVID ont été identifiés en Chine, on ne sait pas encore s’ils vont passer la ville au lance-flammes, mais disons que la pandémie semble encore tenter le coup là-bas. Même si c’est timide. Il serait d’ailleurs bon que cela reste timide.

Les chiffres du jour

Côté chiffres, nous aurons le taux de chômage en Angleterre, le CPI en France et en Italie, les prix à l’importation et à l’exportation aux USA et puis, toujours aux USA, il y aura le New York Empire State Manufacturing Index qui pourrait ne pas être très drôle à voir et la production industrielle. Pour le moment les futures sont en baisse de 0.03% – pas vraiment la panique, mais on sent quand même un peu moins l’euphorie là tout de suite.

Morningbull Live :

Très bonne journée à tous et à demain, même heure, même endroit.

Thomas Veillet

Investir.ch

“My opinions may have changed, but not the fact that I’m right.”

– Ashleigh Brilliant