Le premier rapport du Trésor de la nouvelle administration américaine a été publié récemment. Les différences avec la précédente administration sont assez évidentes.

Les calculs du Trésor ont révélé que trois pays remplissaient tous les critères pour être qualifiés de manipulateurs monétaires: la Suisse, le Vietnam et Taïwan. Les deux premiers avaient déjà été qualifiés de manipulateurs monétaires en décembre dernier. La nouvelle secrétaire d’Etat au Trésor a pris la décision de les retirer de cette liste et s’est abstenue d’y ajouter Taiwan.

Il y a effectivement un changement de ton notable de la part de la nouvelle administration. La décision d’abandonner ou de ne pas qualifier certains pays de manipulateurs monétaires a été concomitante avec l’annonce de la révision des critères de détermination. Le Trésor a déclaré ne pas voir trouvé de preuves suffisantes pour déterminer qu’un pays a volontairement manipulé sa devise. La Suisse, Taiwan et le Vietnam poursuivront ou entameront des pourparlers bilatéraux avec les autorités américaines. Ils devront prouver qu’ils ne manipulent pas volontairement leurs devises à des fins concurrentielles. Cela n’est pas un défi particulièrement problématique pour la Suisse. La Banque Nationale Suisse a explicitement utilisé l’intervention sur le marché des changes comme un outil de politique monétaire. Pour les 2 autres pays asiatiques tournés vers l’exportation, les discussions seront plus difficiles.

Le Trésor également signalé une autre rupture avec l’administration précédente en annonçant l’abandon d’une approche purement quantitative et équipondérée. Il n’accordera plus le même poids aux trois critères et se concentrera davantage sur l’interventionnisme sur les marchés de change plutôt que sur la situation du compte courant et la balance commerciale. À titre d’illustration, l’intervention sur le marché des changes a été mentionnée dans la première colonne, plutôt que dans la troisième comme dans les précédents rapports, indiquant un poids plus important à l’avenir.

Enfin, ce rapport a peut-être véhiculé un message qui contraste avec la promesse de la secrétaire Yellen de lutter contre les mauvaises pratiques en matière de politiques de change. En effet, le fait de ne pas utiliser le label de manipulateur pourrait être percu par certains partenaires comme une transition vers une approche plus modérée par la nouvelle administration. Et cela pourrait finalement amener certains pays à se sentir plus à l’aise lorsqu’ils interviennent pour affaiblir leur monnaie à des fins compétitives.

HERAVEST - Estimation du Trésor des interventions de la PBoC sur les marchés des changes
Estimation du Trésor des interventions de la PBoC sur les marchés des changes
Sources: PBoC, SAFE, US Treasury Estimates

Ne nous méprenons pas sur le rapport du Trésor américain, la nouvelle administration devrait confirmer sous peu qu’elle est déterminée à lutter contre la manipulation monétaire. Cette nouvelle approche rend les pays asiatiques encore plus facilement attaquables. La Chine est de plus en plus surprenante en ne divulguant pas le montant de ces interventions sur le marché des changes. Le Trésor est donc tenu de les estimer. Les Etats-Unis ont donc par exemple été amenés à réitérer que la Chine n’offre qu’une transparence toute relative en ce qui concerne les principales caractéristiques de son mécanisme de fixation de taux de change.

 

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