Hier l’ensemble des investisseurs du monde entier étaient en culottes courtes, assis sur les bancs de l’école à écouter le professeur Powell qui venait leur dire ce qu’il fallait faire et ce qui allait se passer dans les prochains mois. On était tellement hypnotisés par la parole de cet homme qui semble tout savoir mieux que nous, que l’on n’a même pas pris la peine de faire bouger les indices. Mais nous sommes au moins rentrés chez nous avec la bonne parole et maintenant « on sait ». On sait que l’on ne sait jamais, mais ON SAIT.

L’Audio du 15 juillet 2021

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Les yeux dans la FED

Même si Powell va reparler dans la journée, il semble plutôt clair que son discours ne devrait pas offrir de nouvelles informations. Pas de nouvelles informations, parce que grosso-modo, il nous a quand même délivré plus ou moins la même chose qu’il nous raconte depuis des mois. Son sketch sur « l’inflation transitoire » est même de mieux en mieux réglé et il devrait rapidement être étudié en troisième année d’économie dans les Universités américaines. Ce qui est impressionnant, c’est que le discours est toujours le même, mais à chaque fois on l’attend comme s’il allait nous changer la vie. Comme s’il savait quelque chose que nous ne savions pas et qu’à chaque nouvelle intervention, on se demande s’il va finalement nous avouer que quelque chose de monstrueux va se passer dans le futur. Et comme il n’annonce rien de neuf, le marché continue de « tenir le coup ».

Si l’on reste dans le formel, lors de son discours d’hier, Powell a expliqué à la Chambre des représentants que le marché du travail américain était « encore loin » d’avoir enregistré les progrès que la Fed estimait nécessaires pour lui permettre de réduire ses soutiens et éventuellement peut-être, monter les taux. Le patron de la FED a ajouté que l’inflation, actuellement élevée, devrait refluer dans quelques mois. Sa fameuse « inflation transitoire ». Vous reconnaitrez qu’il n’y a pas grand-chose de neuf sous le soleil. La seule chose que l’on pourra noter, c’est le patron de BlackRock qui a parlé lors de la publication des chiffres de son entreprise au second trimestre et qui en a profité pour « balancer » sur CNBC, qu’il n’était de loin pas convaincu que l’inflation ne soit que « transitoire » – il a expliqué qu’il craignait que les salaires qui augmentent de façon massive, viennent perturber cette notion de « transitoire ». À titre d’exemple, il a même annoncé que la totalité de ses employés allaient bénéficier d’une augmentation de 8% de leurs salaires. Entre ça et le prix des ribs qui augmentent dans les restaurant, je ne sais pas ce qu’il vous faut pour voir que ça ne sera pas « juste momentané ». Mais peu importe, hier Powell a rassuré et du coup, on a trouvé ça tellement génial que l’on n’a même pas pensé à acheter ou vendre quoi que ce soit sur les gros indices mondiaux.

Le Dow Jones terminait en hausse de 0.13%, le S&P500 de 0.12% alors que le Nasdaq baissait de 0.22%. En Europe la loi de l’emmerdement maximum était même pire ; le DAX et le CAC terminaient inchangés avec des variations de 0.00% qui rendaient soudainement presque passionnant les émissions de la nuit sur l’emballage des plaques de chocolat dans les chalets de montagnes par les marmottes sauvages et les illégalités salariales dont sont victimes ces dernières.

Soyons francs, il n’y avait pas que ça

Derrière la concentration extrême que nous avions vis-à-vis du témoignage de Powell, il s’est quand même passé deux-trois choses qui valent peut-être la peine d’être mentionnées. Parce que oui, la vitrine du Dow Jones et du S&P500 sont intactes après la séance d’hier. L’inflation est sous contrôle, la croissance est toujours là, mais pas trop et l’emploi devrait cartonner dans les mois qui viennent, sans compter que les salaires vont exploser et que tout le monde voudra s’acheter une maison en dehors de la ville ou un triplex de luxe à New York. Non seulement voudra, mais en plus POURRA – notons au passage que Powell a également cité l’explosion du marché immobilier aux USA, tout en rassurant sur le fait que « pour le moment », nous ne sommes pas retombés dans les travers de la crise des subprimes qui avaient vu les banques prêter du fric dans tous les sens sur n’importe quoi sans jamais avoir vu les biens immobiliers en gage. Parions sur le fait que le jour où ça rapportera suffisamment en commissions, il y aura sûrement un génie quelque part pour s’y lancer à nouveau – mais c’est de la musique d’avenir.

Donc pendant que les indices ne foutaient rien et que l’on se rassurait en buvant les paroles de Powell, il faudra tout de même noter que Bank of America, Citi et BlackRock ont tous publié des profits nettement au-dessus des attentes – comme prévu, puisque maintenant tout le monde sait que les attentes sont trop basses, mais que personne n’a pensé à les remonter – et comme tout est « nettement meilleur que prévu », le moindre « un poil décevant » devient une raison massive de tout vendre. Citi s’en sort moins mal que le reste en reculant de 0.3%, mais Bank of America reculait de 2.5% et BlackRock de 3%. Le ton semble donné pour cette saison des résultats : pour que ça monte, c’est pas un carton qu’il faudra faire, mais un carton, des perspectives spectaculaires et laisser planer la probabilité de se faire racheter dans les six mois. Sinon, la sanction sera terrible.

Des fissures qui se dessinent

Et puis il y avait aussi les corbeaux qui tournaient. Car oui, les choses ont l’air sous contrôle du côté de la FED, mais si l’on creuse un peu, il y a tout de même deux-trois choses qui commencent à « coincer ». Hier c’est un peu passé aux oubliettes parce qu’il y avait Powell qui était en concert, mais notons tout de même que certaines histoires de croissances commencent à se fissurer et des vieux de la vieilles font des comparaisons avec ce qui s’est passé en l’an 2000.

Pour ceux qui ont oublié ce qui s’est passé en l’an 2000, je les laisse aller fouiller sur le net ou je me propose de donner une conférence pour vous le raconter, une conférence payante bien sûr, parce qu’il faut que je récupère ce que j’ai perdu à l’époque.

Donc, voici quelques petites nouvelles en vrac qui commencent à piquer les yeux et qui se rajoutent au nombreux signes qui hurlent à la mort et nous disent que la fin est proche :

– Cathie Wood a réduit massivement ses positions sur les titres chinois

  • – Elle n’est de loin pas la première qui craque et bien des « gros » joueurs sont en train de rendre les plaques sur le sujet. Les raisons sont multiples : l’ingérence de l’état, le manque de transparence, l’ingérence de l’état, les doutes sur les bilans, l’ingérence de Xi Jin Ping et le gouvernement qui oublie le peu de cours sur la démocratie qu’ils ont pris ces dernières années.

– Il y a aussi le nombre d’IPO qui continue d’exploser ces derniers temps

  • – Ce n’est pas une grande nouveauté, mais bon nombre de start–ups cherchent à tout prix à venir se faire financer en bourse. Non seulement il y en a bientôt tous les jours, mais en plus leur « valorisation » a tendance à exploser par rapport aux prix que l’on payait il y a 6 mois de cela. Le retour de manivelle pourrait faire très mal. Surtout lorsque l’on pense à l’IPO de DIDI qui aura réuni tout le pire de ce que l’on peut craindre en ce moment : la valorisation élevée et la boîte chinoise sous domination du gouvernement.

– Certaines « stars » de ces derniers mois sont en grande difficulté

  • – Depuis quelques temps, on ne parle plus autant des boîtes qui « cartonnaient » dans la pandémie. Je pense à Peloton qui vient d’être downgradé hier – le titre a perdu 33% depuis le début de l’année et tout le monde veut retourner au fitness plutôt que de pédaler dans son salon – en ligne ou pas – Palantir, le Facebook made for CIA, est en train de se faire laminer depuis deux semaines. Ils viennent de perdre 30% et un de leurs plus fervents supporters, vient de jeter l’éponge. Palantir est en baisse de 50% par rapport à ses plus hauts. Les voitures électriques qui sont un modèle d’avenir sont en train de craquer de toutes parts depuis deux semaines, sauf Tesla. Et puis souvenez-vous des prix d’ouverture de Doordash, de Coinbase ou de Snowflake… allez-voir où on en est ce matin…

Tout ça pour dire que même si les indices semblent imperturbables en ce mois de juillet qui ressemble plus à un mois de novembre, il y a des secteurs du marché qui sont en train de craquer discrètement. Et je ne vous parle même pas des Cryptos qui semblent être dans le coma depuis 1 mois. Alors je ne fais pas un appel au KRACH, parce que mon pseudo restera toujours « Morningbull », mais disons qu’il y a quand même deux-trois trucs qui puent. Manquerait plus que l’inflation ne soit pas transitoire…

Nouvelles du jour

Ce matin la Chine a publié ses chiffres du PIB et si l’on voit que la croissance explosive post-pandémie est en train de se calmer, les chiffres sont moins pire que l’on pouvait craindre. Et même si c’est en dessous des attentes, le marché et les intervenants semblent s’en contenter. Le Hang Seng est en hausse de 1.2% et la Chine progresse de 0.25%. Le Japon lui semble angoissé par le COVID et recule de 1%. L’or se réveille et frise les 1830$, pendant que le pétrole se faisait flinguer sur les inventaires d’hier. Le baril est à 72.50$ et semble vouloir rendre les armes pour le moment. Il faut dire qu’entre les inventaires et la peur du COVID qui ressurgit via le nombre d’hospitalisations qui remonte, on peut le comprendre.

Côté Crypto c’était pas terrible hier, mais ça se reprend un peu ce matin. Il faut dire que dans son témoignage d’hier Powell a trouvé le temps de glisser un mot sur le secteur, enjoignant les investisseurs à être très, très, très méfiants. Il a également promis la publication d’un rapport sur le sujet dans les mois à venir. Et puis, pour être parfaitement complet, il y a un des co-créateurs du Dogecoin – Jackson Palmer – qui s’épanche dans les médias pour dire que la crypto-monnaie n’a été créée que pour rendre les ultra-riches encore plus riches et pour mettre à risque « Monsieur tout le monde » qui va prendre des risques inconsidérés et tout perdre. Il a également ajouté que la crypto-monnaie était ce qu’il y a de pire dans le capitalisme. Eh ben moi qui pensait qu’on était déjà allé vachement loin, on n’a visiblement pas fini de rire.

Chiffres du jour

Côté chiffres du jour, c’est aux USA que ça va se passer. Au-delà de la seconde partie du témoignage de Powell, qui sera plutôt un bis-repetita, nous aurons les FAMEUX Jobless Claims, le Philly FED, Le New York Empire State Manufacturing Index et la production industrielle. Espérons que tout cela joue la même mélodie que celle que Powell jouera à Washington, histoire de nous éviter une cacophonie sur les marchés pour cette fin de semaine.

Il me reste à vous souhaiter une excellente journée et moi je vous retrouve demain pour la suite du feuilleton. J’en profite pour vous recommander de vous abonner à notre page LinkedIn et n’hésitez pas non plus à vous inscrire à la liste de distribution pour ceux qui ne l’ont pas encore fait. C’est une des rares choses qui est encore gratuite dans ce bas monde.

À demain, si vous le voulez bien.

Thomas Veillet

Investir.ch

« Un groupe de loups, c’est une horde.

Un groupe de vaches, c’est un troupeau.

Un groupe d’hommes, c’est souvent une bande de cons. »

 

– Philippe Geluck