Cela fait quelques mois que nous recommandons d’éviter les actions chinoises cotées aux US, pas pour des raisons de qualité des sociétés, mais pour des raisons de guerres politique, commerciale et technologique entre la Chine et les Etats-Unis. Joe Biden a franchi la ligne rouge en attaquant la Chine sur les droits démocratiques et humains. On y est!

Mais pas seulement. Le Parti communiste chinois (PCC) reprend tout en mains fermes. Probablement que le PCC aurait laissé plus de “liberté” à Hong Kong, mais l’ADN démocratique était trop puissant pour les citoyens hongkongais, obligeant Pékin à instaurer un loi sur la sécurité nationale, supprimant tous les droits démocratiques et interdisant les journaux pro-démocratie. L’autre déclic a été la tentative d’émancipation du patron d’Alibaba, Jack Ma, et de son discours à Shanghai en octobre 2020, un mois avant l’IPO de l’activité financière de sa galaxie, Ant Group, avec une critique musclée contre le système bancaire chinois. La réponse du président Xi Jinping a été rapide: abandon de l’IPO de Ant Group et mise au placard de Jack Ma pendant 2 mois. Depuis ce jour, le PCC reprend en mains tous les grands groupes et tous les patrons milliardaires devenus trop puissants pour le PCC. Les Tencent, ByteDance et Meituan se tiennent à carreaux. L’interdiction du minage de crytomonnaies en Chine s’inscrit dans cette logique d’un retour à un contrôle total du PCC.

Aujourd’hui, le PCC attaque les sociétés chinoises cotées aux US.

Avec l’exemple Didi Chuxing (le Uber chinois) et quelques autres, Pékin cherche à pousser les sociétés chinoise de la technologie à se faire coter à Hong Kong, à Shanghai/ Shenzhen ou au Star 50, un indice chinois qui veut rivaliser avec le Nasdaq. Avec Didi Chuxing, Pékin met en avant le risque pour la sécurité nationale avec la collecte et la gestion des données privées. Comme la plupart des sociétés chinoises cotées aux US, Didi a la quasi-totalité de ses revenus en Chine. Le State Council of the People’s Republic of China, l’organisme de surveillance du gouvernement, a annoncé que les règles du système de cotation à l’étranger pour les entreprises nationales seront mises à jour, tout en renforçant également les restrictions sur les flux de données transfrontaliers et la cybersécurité.

Cela va devenir très compliqué pour les sociétés chinoises de l’internet ou celles qui gèrent des données ou informations privées d’être cotées à l’étranger.

Ensuite, la nouvelle réglementation américaine de la SEC, qui vise principalement les sociétés chinoises, impose le choix d’auditeurs agréés par la SEC et demande plus de transparence, ce qui est contraire aux lois chinoises. Le problème d’incompatibilité entre la nouvelle réglementation de la SEC et les lois chinoises était évident; nous l’avions souligné.

Deux sénateurs de la Commission bancaire demandent à la SEC d’enquêter pour savoir si l’IPO de Didi Chuxing a trompé les investisseurs américains. Didi Chuxing avait levé $4.4 milliards. On rappelle que le blocage des activités de Didi Chuxing par Pékin s’est passé une semaine après la 1ère cotation. Il faut examiner si Didi Chuxing était déjà en contact avec le régulateur chinois avant l’IPO.

L’Administration US va rajouter sur sa liste noire 19 sociétés chinoises liées au travail forcé des Ouïghours dans la province du Xinjiang et à des programmes de modernisation militaire de la Chine. Joe Biden a avertit qu’il y aurait des conséquences légales pour les sociétés américaines et les individus qui travaillent directement ou indirectement dans la province du Xinjiang. Créé par Donald Trump, cette liste noire intègre déjà une soixantaine de sociétés chinoises en lien avec l’Armée populaire de Chine ou qui posent des risques sur la sécurité nationale des Etats-Unis.

Le Ministre chinois du commerce vient d’annoncer qu’il va vérifier plus profondément les investissements étrangers en Chine sur la base de la sécurité nationale, référence au Measures for Security Review of Foreign Investment, se focalisant sur les secteurs militaire, agricole, énergétique et technologique.

L’intérêt boursier sur les grands groupes chinois devrait s’atténuer avec le contrôle du PCC et la quasi-obligation de valider toute initiative d’expansion à l’étranger. Leur croissance sera bridée. La nouvelle stratégie de Circulation duale de l’économie va favoriser les sociétés chinoises domestiques cotées à Shanghai/ Shenzhen. Le PCC prend aussi le contrôle sur l’impact de la technologie sur la société comme l’interdiction pour les personnes de moins de 18 ans de jouer sur PC, consoles et smartphones entre 22h00 et 08h00, affectant Tencent. Le parcours boursier d’Alibaba et de Tencent traduit cette situation défavorable.

Chute du Nasdaq Dragon China
Chute du Nasdaq Dragon China
Source: Bloomberg

La capitalisation boursière du Nasdaq Dragon China (sociétés chinoises cotées aux US) est de $1’800 milliards. Il y a donc un risque réel pour les cotations actuelles des sociétés du Nasdaq Dragon China, les IPO à venir et donc pour les investisseurs américains et étrangers.

La période faste de sociétés chinoises cotées aux US est terminée.

Et ce n’est que le début avant les tensions plus fortes sur Taïwan; dans son discours pour le 100ème anniversaire du PCC, Xi Jinping a fait référence à la réunification avec Taïwan comme une mission historique inébranlable et d’aspiration commune du peuple chinois.

 

Heravest SA est une boutique indépendante dans le conseil en investissement, du top-down au bottom-up, et un fournisseur de solutions d’investissement.

Rue du Cendrier 12-14
CH-1201 Genève
T +41 22 715 24 40