Le constat est clair: le premier semestre 2022 n’a pas été rémunérateur pour les investisseurs. Entre l’inflation, la hausse des taux et le contexte géopolitique tendu, en termes de classe d’actif seules les matières premières affichent un rendement positif depuis le début de l’année. Dans cet environnement, l’univers des cryptomonnaies n’a pas fait exception. En effet, depuis le début de l’année, le secteur reste très corrélé aux valeurs technologiques.

Par Steeven Panchaud, Portfolio Manager et Laurent Perusset, CIO

 

La vague d’adoption institutionnelle qui avait soutenu le marché haussier des cryptos l’année dernière semble bien loin. Juste sur le mois de juillet, Tesla a annoncé avoir vendu 75% de ses positions en BTC. Quant à Cathy Wood, la fondatrice d’Ark Invest, elle a vendu une partie des positions Coinbase de ses fonds. De façon plus globale, la spéculation a baissé sur les principales places d’échanges et cela même si les volumes sont restés conséquents. De leurs côtés, les principaux acteurs de l’écosystème n’ont pas été épargnés. Par exemple, le hegde fund «Three Arrows Capital» a été liquidé suite à la faillite du projet Luna.

Pour autant, compte tenu de la volatilité historique de cette classe d’actif, il est difficile aujourd’hui de soutenir la thèse d’un krach des cryptos pour plusieurs raisons.

Premièrement, nous pouvons observer une certaine proximité dans les performances des valeurs technologiques comme Facebook (-51%), Paypal(-50%) ou Netflix (-63%) et le Bitcoin (-50%) depuis le début de l’année.

Deuxièmement, les protocoles des principales blockchains sont restés inaltérables. Autrement dit il n’y a pas eu de problème technique majeur qui aurait pu faire baisser la confiance des utilisateurs dans la technologie. Il est important de rappeler que les différents piratage au sein de l’écosystème concernent principalement les protocoles «cross-chain» (70%) et/ou des applications non auditées.

Troisièmement, les fonds levés autour des projets cryptos sur le premier semestre 2022 dépassent le montant des levées sur toute l’année 2021. Plus de 30 milliards de dollars ont été injectés en 1200 rounds de financement selon le fournisseur de données Messari. Notons toutefois que la finance décentralisée a été délaissée (6% des fonds levés) au profit des projets Web3/Nft (26%). La finance centralisée (plateforme d’échanges, de prêt, de dépôt…) (35%) et les projets d’infrastructure (33%) continuent d’être plébiscités.

Quatrièmement, l’adoption croissante des cryptos continue. Selon le dernier rapport du Boston Consulting Group (BCG), seulement 0,3% de la « richesse individuelle » dans le monde serait actuellement investie dans les cryptomonnaies, contre 25 % dans les actions. Le rapport estime qu’il pourrait y avoir un milliard d’utilisateurs de cryptomonnaies d’ici 2030 contre 300 millions aujourd’hui. Toujours selon BCG, l’adoption se fera à la fois par les particuliers, mais également par les investisseurs institutionnels.

Enfin, cinquièmement, signe que l’intérêt est toujours présent chez les institutionnels, la plateforme Coinbase a annoncé un partenariat avec le gestionnaire d’actifs BlackRock. Celui-ci permettra à ses clients institutionnels d’acheter et de vendre des bitcoins. Les clients institutionnels de BlackRock (banques, gestionnaires de trésorerie, hedge funds, etc.) qui utilisaient déjà Coinbase vont désormais pouvoir accéder au service professionnel de la plateforme pour faire des opérations en Bitcoin.

Pour conclure, le secteur des cryptomonnaies traverse une année de baisse en ligne avec les marchés. Malgré cela, l’intérêt et l’adoption ne cessent de croître. Nous observons une consolidation du secteur et un recentrage autour des projets de qualité. La technologie et les applications continuent d’évoluer et de délivrer des innovations prometteuses.

Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain, le marché a ses cycles de prix que l’investisseur doit accepter. Bien qu’il n’y ait pas encore de consensus autour des méthodes de valorisation des cryptos, l’économie et la croissance du secteur laisse présager un potentiel non négligeable.