Il n’est nul besoin d’avoir fait une thèse en analyse technique pour se rendre compte que les graphiques des indices américains – et le S&P500 en particulier – sont en train de s’enfoncer toujours plus bas et ne semblent pas vouloir renoncer tant que l’on ne sera pas retourné aux plus bas du mois de juin. Et ça, c’est encore le scénario le plus optimiste. Nous venons de terminer une semaine absolument apocalyptique en nous rendant compte que l’inflation était toujours hors de contrôle et que les hausses massives misent en place par la FED n’avaient pas encore fait leur effet. Mais en plus, le support des 3'900 qu’il ne fallait pas lâcher. Ben, il a lâché.

L’Audio du 19 septembre 2022

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Bilan de lendemain de tornade

Lorsque l’on regarde la performance de vendredi dernier, nous pourrions largement hausser les épaules et se dire : « Ouais, bon, ça va. C’est moins pire que prévu ». En effet, le Dow Jones qui perd 0.45%, le S&P500 qui abandonne 0.72%, pendant que Nasdaq ne chute « que » de 0.9%, on a connu des lendemains d’hier bien plus compliqués que cela. Pourtant, lorsque l’on regarde la photo hebdomadaire et l’intérieur même du marché ; c’est là que l’on se dit que l’on n’est pas encore sorti de l’auberge qui est fond du trou, tout au fond de la forêt.

Les indices qui sont liés à la croissance se sont fait laminer et le SOX – par exemple – est en baisse de près de 7% sur la semaine. Le S&P500 frise les 6% et le Dax allemand abandonne 5% depuis lundi dernier. Les chiffres du CPI de mardi dernier ont eu raison de l’optimisme y relatif que nous affichions depuis un moment et les intervenants ont compris que l’inflation était toujours hors de contrôle et que la FED allait devoir en remettre une couche. Mais surtout, que cette nouvelle couche n’allait pas se faire avec délicatesse et parcimonie. Certaines banques d’affaires pariant déjà sur la plus grosse hausse de taux de ces 40 dernières années :

« Une hausse de 100 basis points pour mercredi soir semblant de plus en plus être dans les cartes »….

Dire qu’après le krach de 87, la crise LTCM, la crise asiatique, la crise russe, la bulle internet, le 11 septembre, les attentats de Londres et de Madrid, la crise des subprimes, la faillite de Lehman Brothers, le sauvetage de l’UBS par le Conseil Fédéral, les multiples QE a tiroir, la crise Grecque made in Goldman Sachs, les puts de la FED et le COVID, je pensais avoir tout vu en 35 ans… Visiblement va falloir encore se farcir une jumbo-hausse des taux de 1% pour espérer calmer l’inflation alors que c’est MÊME pas sûr que ça suffise !!!!

En plus des indices, il y a le reste

Alors il est vrai que lorsque l’on tire un bête graphique du S&P500 et que l’on essaie de relier les points hauts et les points bas, pas besoin d’être le Président du fan club de Ralph Acampora pour se rendre compte que la tendance baissière est toujours là et qu’il n’y a pas de raison de se précipiter pour vouloir acheter au plus bas. Le problème c’est aussi qu’à l’intérieur même des indices il se passe des choses qui ne sentent pas bon du tout.

Par exemple, vendredi dernier, nous avons eu le « profit warning » de FedEx. Alors vous pourriez me dire que FedEx, on s’en fout et que c’est quand même pas Apple ou Microsoft qui ont annoncé un trimestre tout pourri à venir – non, ça n’est pas le cas et puis d’abord Microsoft et Apple, ils ont déjà dit y a bien longtemps que ça allait être compliqué – mais il faut tout de même noter qu’il fût un temps, lorsqu’une société qui avait pour job de faire de l’expédition de paquets au travers de la planète signalait que « ça allait mal », c’était en général l’occasion que nous prenions pour amener le mot « récession » sur la table des négociations et se dire que si FedEx ne va pas, tout ce qui tourne autour de l’expédition des paquets, de l’emballage au e-commerce, pourraient être dans une panade pas triste également.

Vendredi nous avons donc également fait le lien entre FedEx et le reste de l’économie. À partir de là, au-delà du fait que FedEx s’est fait démonter de plus de 20%, on s’est fait plaisir à tirer à boulets rouges sur le reste du secteur, tout en laissant trainer quelques mines anti-personnelles sur des boîtes comme Amazon, UPS ou encore tout ce qui faisait du packaging ou qui aurait quelque chose à voir de près ou de loin avec l’expédition de quoi que ce soit par quelque moyen de transport que ce soit.

La vitrine n’est pas belle

En résumé, vendredi soir la vitrine de la boutique de Wall Street n’était pas belle, mais l’arrière-boutique était carrément immonde. Tout est en train de lâcher et le moindre chiffre économique qui sort – qu’il soit bon ou mauvais – fait peur à tout le monde. Oui, car si c’est bon, ça veut dire que l’économie cartonne et qu’il faut lui jeter un seau d’eau glacée pour la calmer – la FED va donc monter les taux – et si les chiffres sont mauvais, on se dit que l’on va rentrer en récession et que comme la FED s’en fout, ça va être compliqué.

À l’aube de cette nouvelle semaine qui nous attend, les futures ont beau avoir l’air de tenir le coup, on ne peut pas dire que la confiance soit à son comble. Sans compter que dès demain, nous allons nous imaginer plein de choses avec le début du FOMC Meeting, et ça ne devrait pas forcément aider. La tension est à son comble et les plus bas du mois de juin semblent être le prochain « stop » de manière presque trop évidente.

Et demain ça sera pire

Nous voici donc au début d’une nouvelle semaine après être sorti des gorges de l’enfer la semaine dernière. La séance de mardi était la pire depuis je-ne-sais plus combien de temps, la semaine qui vient de se terminer était la pire depuis bien longtemps aussi et pendant ce temps, la volatilité ne veut pas remonter, comme si les gens refusaient d’avoir peur. Comme s’il y avait un truc qui ne « jouait pas » dans ce marché. Ça n’est pas la première fois que j’ai l’impression que ce marché est dysfonctionnel, mais là c’est pire.

Les supports sont en train de lâcher de façon plus qu’évidente, le niveau des 3’900 est LE NIVEAU qui aura vu le plus de volume se traiter ces 3 dernières années – indiquant assez clairement que sa rupture dans un sens ou dans l’autre signifie clairement quelque chose ! Les données économiques montrent que l’inflation reste un problème et que la FED va devoir mettre les bouchées doubles tout en réaffirmant qu’avant de pouvoir rigoler, on va souffrir d’abord – bien que Powell ne dira jamais que nous nous dirigeons vers une récession, on n’est pas complètement idiot et on sent bien que c’est la prochaine gare – et puis, il y a tout le reste qui semble continuer à partir en cacahuètes, guerre, chaînes d’approvisionnement problématiques, prix du gaz et de l’électricité qui explosent à l’aube de l’hiver et Macron qui va à l’enterrement de la Reine d’Angleterre en basket et lunettes de rockstar en donnant la main à Line Renaud. J’ai vraiment envie de voir le verre à moitié plein et de hurler « à poil les shorts », mais j’ai comme une extinction de voix.

En Asie ce matin

Ce matin en Asie, on se pose déjà des questions sur la semaine à venir. Pour le moment la Chine tourne autour de pas grand-chose et ne fait pas grand-chose, par contre Hong-Kong est en baisse de 0.75%, pendant que Tokyo est fermé et que l’Angleterre sera fermée aussi. Rien à voir avec l’Asie, mais plutôt avec l’enterrement de la Rein d’Angleterre. Pour le reste, le pétrole est à 85$ et il paraît que soudainement on est un peu plus optimiste sur la thématique, puisque la Chine est en train de rouvrir après son 118ème confinement et que donc, ils vont reconsommer. En plus, Biden a déclaré hier soir que la pandémie de COVID était terminée et que tout allait bien. Ou presque. Bref, c’est bon pour le pétrole.

L’or est à 1679$ et le Bitcoin est en train de faire une Xième tentative d’effondrement ce matin, puisqu’il vient de passer sous les 19’000$ et se traite à 18’760$ – il faut dire qu’en fin de semaine dernière, le patron de la FED, l’éminemment sympathique Gary Gensler a estimé que le Bitcoin pourrait être considéré comme « une action » – ce qui lui permettrait donc de le soumettre à la volonté de la SEC… Un truc que l’on adorerait voir.

Les nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, on parle de l’IPO de Porsche qui devrait être valorisée autour des 75 milliards et serait la troisième plus grosse IPO de l’histoire. 911 millions de titres vont être mis en circulation entre 76.50 Euros et 82.50 Euros. La moitié des titres auront des droits de vote et les autres pas. Le titre devrait commencer à traiter le 29 septembre. Dans la foulée, on notera que Volkswagen avait acheté des futures sur le gaz depuis deux ans. Aujourd’hui, le gain se monterait à plus de 400 millions d’euros et le volume des contrats achetés permettraient de chauffer 200’000 foyers allemands pendant 12 mois. Il semblerait que VW avait acheté ça pour faire tourner ses usines, mais en fait ils devraient prendre les profits et continuer de se chauffer au charbon – apparemment le concept de réchauffement climatique et de pollution n’existe plus depuis que la guerre en Ukraine est devenue le dada favori des grands dirigeants de l’Europe.

On notera aussi que les relations entre les USA et la Chine sont toujours au top. Alors que Biden fait tout pour bloquer l’accès des Chinois à la technologie américaine, hier il a aussi déclaré que si la Chine attaquait Taïwan, l’armée américaine s’y opposerait et se mêlerait immédiatement au combat. C’est vraiment un truc que l’on a envie de voir. En plus des sanctions de l’Europe contre les Russes qui marchent super-bien, je suis certain qu’une bonne guerre entre la Chine et les USA, le tout en piétinant Taïwan, serait une super bonne idée. Et puis on notera aussi que Druckenmiller, Gundlach, Sternlicht, Taleb, Rosenberg et Spitznagel, six gourous spécialisés dans l’économie et les comportements psychotiques de la FED ont tous plus ou moins exprimé ces derniers jours, que la FED faisait tout faux. Tous avec des raisons diverses et variées, mais en gros : la FED est nulle et va nous précipiter dans une merde noire.

C’est sûr ces bonnes paroles que je m’en vais vous laisser commencer la semaine avec une ambiance bien pourrie, un enterrement – pas un seul mariage à l’horizon et pas de chiffres économiques non-plus. Passez un très bon lundi et un magnifique début de semaine !

Thomas Veillet
Investir.ch

“Hey, I love Louis, and I don’t care what you say. I am not leaving my wingman. See, that’s funny, ‘coz that’s from Top Gun.”

-Harvey Specter.