Nous sommes en pleine torture chinoise sur les marchés financiers. L’appétit au risque est réduit à zéro et la pression reste constante. Plus personne n’ose prendre de risque tant que l’on n’en sait pas plus sur les négociations sur le plafond de la dette et pour être franc, il n’y a aucune raison de se précipiter pour faire quelque chose, puisque l’on a l’impression que rien ne se passera tant que l’on ne saura pas. Et puis lorsque l’on saura, on ne sait même pas ce qui pourrait réellement se passer. En plus jeudi c’est congé et c’est le long week-end de l’Ascension, la motivation est à son paroxysme.

L’Audio du 16 mai 2023

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Une nouvelle journée pour rien

La séance d’hier n’aura donc servi à rien. Ou en tous les cas à pas grand-chose, puisque tout le monde à les yeux rivés sur le plafond de la dette. Il ne reste plus que 88 milliards dans les caisses de l’état et à la vitesse où ils dépensent, 88 milliards c’est des cacahuètes. Rayon de soleil tout de même durant la séance d’hier, puisque pour la première fois depuis des jours, Madame Yellen a déclaré un truc de positif sur les négociations. Elle s’est montrée « confiante » et veut croire qu’une solution peut être trouvée à temps. Selon ses informations à elle – qui sont meilleures que les miennes – on s’autorise à penser dans les milieux autorisés que les équipes des Démocrates et des Républicains sont en train de tomber d’accord sur certains points.

Vous avouerez que lorsque l’on tombe sur des articles de presse comme ça, aussi fouillés et détaillés sur ce qui se passe, on sent tout de suite que l’on est au niveau « expert » du journalisme d’investigation. Mais peu importe, le fait que les « équipes » de petites mains des deux partis avancent, est considéré comme une « bonne nouvelle » à quelques heures de la rencontre de Biden et de McCarthy qui devraient se voir cette après-midi, si Biden n’a pas oublié. Ce qui n’est pas encore gagné. En résumé, je viens de vous poser deux paragraphes pour dire que l’on ne sait strictement rien de plus, mais que selon certaines sources non-identifiées, il se pourrait que ça avance dans la bonne direction. En même temps, faire pire que ce que là où nous étions vendredi dernier, ça paraît compliqué.

Le vide sidéral

Pourtant, ce ne sont pas ces avancées immobiles qui vont nous motiver à faire les grandes manœuvres. Hier, LA nouvelle du jour, c’était META qui montait de 2.2% suite à un upgrade fait par une boîte que personne ne connait de ce côté de l’Atlantique et aussi que Musk a parlé devant les micros de BFM TV pour dire qu’il ne ferait pas de déclaration aujourd’hui, mais qu’un jour prochain il pourrait bien investir en France. Ce qui a immédiatement été interprété par les journalistes de BFM TV par : « Elon Musk cherche un terrain pour implanter une giga-factory ».

Du côté économique, on notera également que l’Empire State Manufacturing Index s’est littéralement pété la figure s’affichant à -31,8 pour le mois de mai. Encore une fois, on peut saluer les attentes du marché qui étaient à des années lumières de la réalité avec ses « moins 2 » attendus et à des kilomètres des +10.8 du mois dernier. C’est le signe d’une activité économique locale (région de New York) qui s’est brutalement contractée. Pour décrire ce qui se passe, les livraisons sont en chute libre et les prix prennent l’ascenseur. Plus de 50% des gens interrogé dans le cadre de cette enquête ont estimé que la conjoncture s’était détériorée. Et très vite. Le scénario du Soft-Landing semble en train de gentiment se volatiliser dans l’atmosphère. Mais les marchés ne baissent pas. Comme si rien ne pouvait inquiéter les marchés et que les marchés se disent que si les clowns de Washington trouvent une solution au plafond de la dette, tout va se régler comme dans Alice au pays des merveilles. Ou comme dans un film de Disney où ils se marient tous et ont beaucoup d’enfants non genrés pour ne pas froisser les susceptibilités de chacun.

Docteur Copper

Vu que l’on s’ennuie profondément et que l’on passe plus de temps à regarder Netflix qu’à se préoccuper des marchés, on notera quand même qu’un des « indicateurs économiques » qui compte, le cuivre – connu sous le nom de Docteur Copper – est au plus mal. Après avoir fait un top dans la région des 880$ en mars 2022, le cuivre avait ensuite perdu 25% de sa valeur durant le printemps dernier avant de repartir à la hausse et de faire un top autour des 700$ encore à la mi-avril. Sauf que depuis un mois les choses semblent vouloir empirer et à l’heure actuelle, la tendance baissière semble se confirmer et le métal se rapproche de la moyenne mobile des 200 jours qui fait office de dernier rempart.

Alors vous me direz : « mais pourquoi il passe sa matinée à nous décrire le graphique du cuivre ? ». Eh bien tout d’abord parce que n’ai rien à vous raconter et il faut bien que je meuble ma chronique et ensuite, parce que le cuivre est considéré comme un indicateur économique des plus importants. La légende dit que, si le cuivre baisse c’est que l’économie ralentit et si cuivre monte, ben c’est que l’économie est au top et qu’il va falloir faire gaffe, parce qu’à la limite, c’est inflationniste. Bref, ce matin le cuivre a une sale gueule et on commence à en parler dans les médias, ce qui n’est pas bon signe. Bon, en même temps il n’y a tellement rien à dire que ça ne m’étonne pas que l’on s’occupe avec ça.

Graphique du Cuivre – Source : Tradingview.com

En résumé

Tout ça pour dire que la journée d’hier en Europe peut se résumer comme suit : le DAX montait de 0.02% et le CAC40 de 0.05%, quant au SMI, il s’emballait littéralement de 0.12%, une hausse fulgurante pour l’indice suisse qui se démarque clairement des autres marchés européens. Pendant ce temps, le Nasdaq était la plus forte hausse des indices américains et le Dow Jones parvenait enfin à terminer une journée dans le vert. Pas de grand-chose, mais dans le vert quand même. Et pour ce qui est du S&P500, il est toujours collé dans son range, mais ne vous en faites pas, dès qu’il en sortira, on vous tiendra au courant.

Il n’y a pas d’autre banque qui est dans la tempête pour le moment, et les choses semblent se calmer. Pour le moment. On ne va pas vendre la peau de l’ours avant d’avoir une nouvelle banque systémique qui rachète une banque régionale. Pour le moment, on a l’impression qu’ils sont en train d’essayer de limiter la casse en n’en parlant plus, puisque la discussion de l’apéro est généralement mobilisée sur le sujet du plafond de la dette. Sujet sur lequel nous sommes probablement encore moins bien informés.

En Asie

Ce matin l’Asie est fidèle à son rythme de ces derniers jours. C’est la dépression en Chine parce que le rebond post-COVID a toujours les pieds dans le béton, les derniers chiffres économiques chinois montrent très clairement que la reprise n’est pas aussi forte que prévue et ça ne permet pas aux intervenants de se décontracter en se disant qu’il n’y a qu’à surfer sur la vague en achetant des trucs chez Hermès et Vuitton. L’indice chinois ne fait d’ailleurs strictement rien à l’heure actuelle. Hong Kong est en légère hausse, mais c’est le Japon qui se démarque puisque le Nikkei est en hausse (encore) de près de 1% et qu’il est à deux doigts de casser la résistance des 30’000 points sur l’indice.

Autrement on retiendra que les Américains ont semble-t-il décidé de remplir à nouveau leurs réserves stratégiques, ce qui justifie la hausse du pétrole qui était sous pression depuis quelques jours suite à des craintes d’une éventuelle récession. Là tout de suite, la récession n’est plus le problème, puisque les Américains ont sorti le chéquier pour aller faire du shopping, j’espère qu’ils ne paient pas à crédit, parce que sinon les vendeurs risquent bien de ne jamais voir leur pognon. Toujours est-il que le baril vaut 71.44$. L’or est à 2020$ et le Bitcoin est à 27’150$.

Les nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, on parle de la dette des Américains – mais pas la dette du gouvernement, celle des privés. La dette totale se monte à 17’000 milliards de dollars et c’est du jamais vu. Le montant a explosé de près de 3’000 milliards depuis la période pré-COVID et cela, même si les crédits hypothécaires sont en baisse. Le montant peut donner le tournis où donner envie de partir fait pousser des chèvres en Provence, pourtant ce genre d’annonce fait peur depuis 30 ans et pourtant, à la fin, rien ne se produit. Comme pour le plafond de la dette – pouf, on passe à autre chose ou alors on reparle d’intelligence artificielle pour noyer le poisson pour faire croire que demain sera mieux qu’hier.

Une autre nouvelle qui vaut la peine d’être citée. Une nouvelle qui ne fera pas bouger les indices pour autant, mais qui vous permettra quand même de briller par votre culture générale lors du prochain repas de famille ; la capitalisation d’Apple est plus importante que la TOTALITÉ des titres du Russell 2000. En résumé, une société qui vend des téléphones portables qui vous permettent de jouer à Candy Crush ou de vous prendre en photo avec des filtres qui vous rendent moins moches ou plus ridicule, vaut plus que 2’000 autres sociétés qui sont – D’ACCORD – des petites capitalisations, mais quand même. C’est énorme et puis c’est tout. Autrement Microsoft a obtenu le feu vert des Européens pour le rachat d’Activision, Paul Tudor pense que le marché va monter pour le reste de l’année – moi je vais attendre qu’on sorte de ce foutu range pour m’emballer. Michael Burry a bourré la caisse en titres bancaires durant le mois dernier. Comme quoi on peut avoir vu venir les subprimes et se gourer quand même 15 ans plus tard. Et puis, malgré la rumeur, George Soros a démenti être mort. En même temps, je commence à croire qu’il est immortel et qu’en fait il fait partie du clan MacLeod.

Les chiffres

Pour ce qui est des chiffres du jour, il y aura l’emploi en Europe, le PIB en Europe et puis ensuite c’est direction USA avec les ventes de détail, la production industrielle et le Redbook. Dans nos rêves les plus fous on peut même espérer que Biden va sortir de la Maison Blanche en hurlant : « on l’a fait, on l’a fait » et se retourner ensuite pour demander : « mais en fait, on a fait quoi ? ». Bref, on ne sait jamais, ils pourraient nous casser le suspense avec un accord sur le plafond de la dette. Mais en même temps, je pense que j’ai plus de chance de courir le marathon en moins de 2 heures que l’on nous sorte un accord cet après-midi.

Pour le moment, les futures sont en baisse de 0.2% et le S&P500 est toujours dans son range, hésitant entre le côté obscur et le camp des Jedi du bull market. Pour le reste, je vous souhaite un excellent mardi et on se retrouve demain pour se dire tous ensemble que ça serait quand même bien s’il se passait un truc. Je précise encore que ce soir, Marco Rastaldi et votre serviteur tiendront un Webinaire en collaboration avec Swissquote, le sujet : le luxe, vous trouverez le lien d’inscription en cliquant sur INSCRIPTION… et c’est gratuit. Comme d’habitude.

https://fr.swissquote.com/education/webinars/tes-au-parfum-que-le-proprietaire-de-lvmh-est-lhomme-le-plus-riche-2023-05-16

À demain.

Thomas Veillet
Investir.ch

« The degree of technical competence is inversely proportional to the level of management. »

Murphy’s Law