Les séances d’emmerdement maximal se suivent et se ressemblent. On attend toujours les mêmes choses encore et encore. Rien d’autre ne semble nous intéresser que de savoir ce que la FED pourrait bien avoir envie de faire ces prochains mois. Nous savons pertinemment qu’ils ne vont rien nous dire sur leurs plans – pour autant qu’eux-mêmes sachent ce qu’ils vont faire (ce dont je doute fortement) – mais peu importe, les intervenants se lèvent tous les matins en se demandant quand est-ce que nous aurons la CONFIRMATION de ce qu’il faut faire et de ce qu’ils vont faire.
L’Audio 9 novembre 2023
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Long, très long
En attendant, les marchés américains alignent les séances de hausse, même si hier, on sentait bien que c’était plus aussi simple de monter. Le S&P500 vient de monter 8 fois de suite et le Nasdaq, 9 fois. Mais ça devient de plus en plus dur pour trouver la motivation et même si ce soir le patron de la FED va nous faire un petit discours dont il a le secret, on commence à se demander si toutes les bonnes nouvelles ne sont pas déjà dans les prix. Que pourrait-il bien nous dire qui pourrait nous faire monter 5% de plus ? Nous sommes déjà montés de près de 6% sur le principe qu’en théorie la FED aurait terminé son cycle de hausse des taux et que le prochain « move » sera une baisse des taux.
La seule chose qui pourrait nous faire vibrer (potentiellement), c’est de voir Powell tourner définitivement DOVISH et pivoter comme on l’attendait en août dernier. Mais pour être franc ; personne ne peut décemment croire à cette possibilité au vu de ce qu’il nous a récemment expliqué lors de ses dernières sorties. Hier soir Jerome Powell s’est déjà exprimé, mais comme il n’a pas mentionné la politique monétaire américaine, nous sommes dorénavant obligés de nous reconcentrer sur le speech de ce soir.
À bout de souffle
On sent bien que le marché ne peut plus en avant et que ça va être compliqué de se motiver encore un peu plus. Il faudrait peut-être reculer pour mieux sauter, mais au fond de notre psyché torturé d’investisseur, on se dit que si Powell annonce qu’il ne montera plus les taux et qu’EN PLUS il baissera les taux en mai – comme de plus en plus d’experts le pensent – on pourrait éventuellement peut-être encore grimper de 2-3%, c’est probablement pour cela que les gens n’osent plus trop aller short contre les indices. Sans compter que le rendement du 10 ans ne fait que se péter la figure, ce qui rassure pleinement le camp des bullishs.
Pourtant, sérieusement ? Est-ce que l’on peut décemment croire que la baisse des taux, c’est pour tout de suite ? Ou presque ? Il semblerait que les marchés veuillent y croire. Ils y croient à peu près autant que lorsqu’il y a 15 mois on pensait que Powell allait « TOURNER DOVISH » – sauf que cette fois, on est presque sûr que l’on va avoir raison. À la fin du mois d’octobre – il y a 10 jours de cela, le scénario était écrit : encore éventuellement une hausse des taux en décembre, puis une bonne année de taux à 5.5% et puis – si tout va bien, dès la toute fin de 2024 – pour fêter l’élection du nouveau clown de la Maison Blanche – on pourrait avoir une première baisse des taux.
180 degrés
Et puis, soudainement tout a changé. Powell a un peu desserré les dents, il a défait le premier bouton de son col de chemise, les NFP sont sortis plus faibles que prévu et soudainement, tout le monde a tourné la veste en se disant que l’économie était FINALEMENT en train de ralentir et que pour éviter la récession, Powell ne pourra pas attendre plus longtemps. Hier matin on parlait de baisse des taux en juin. Ce matin on commence à parler de mai et si nous sommes toujours aussi bons en termes de prévisions de « ce que va faire la FED » que nous l’avons été depuis le début de l’inflation, il y a bien des chances que l’on se prenne un mur à pleine vitesse.
Mais peu importe. À l’heure actuelle nous sommes dans une zone « macro-light » – c’est-à-dire que nous venons d’avoir les NFP et que durant cette semaine c’est plutôt cool avant de réattaquer les thèmes des CPI, PPI et autres délicatesses gouvernementales. Alors on se raccroche à ce que pourraient bien dire banquiers centraux américains – d’ailleurs depuis le début de la semaine, tous ceux qui ont parlé se sont montrés plutôt HAWKISHS, mais nous, on s’en fout on attend de savoir ce que Maître POWELL va nous annoncer depuis son arbre perché – car c’est lui qui a LA SOLUTION et les indications pour nous sortir de cette zone d’emmerdement maximum.
Brassage
Nous voici donc en train de brasser de l’air en attendant d’en savoir plus. Les marchés sont fatigués et ils attendent leur injection d’anabolisants, sinon il y a des chances que nous vivions un nouveau repli avec prises de profits et tout et tout. En attendant on s’occupe comme on peut et un des moyens de passer le temps, c’est de s’occuper du baril de pétrole. Hier l’or noir a encore été victime des vendeurs et ce matin le prix des 159 litres de pétrole a encore baissé un peu plus. Actuellement il vous suffira de débourser « seulement » 75 dollars et 41 cents pour vous offrir le précieux liquide. Cette fois, la « raison » de cette nouvelle baisse, c’est officiellement le « ralentissement chinois ». C’est pas que c’est « hyper-nouveau », mais il fallait bien justifier le comportement du baril par quelque chose.
Alors cette nouvelle baisse est une excellente nouvelle, parce qu’en plus de baisser à cause de la Chine, on peut aussi se dire que le fait que le brut baisse, cela va faciliter le ralentissement de l’inflation. Du coup, encore une fois on se trouve dans un scénario qui est presque trop parfait pour être crédible. Un de ces renversements de situation à la dernière minute qui fait que l’on peine à y croire. Eh bien nous sommes en plein dedans – alors que l’on craignait le ralentissement économique et que le S&P500 casse ses supports – nous voici 10 jours plus tard à se demander si nous ne sommes pas – par hasard – dans une économie plus que parfaite où les planètes sont parfaitement alignées. Bref, reste plus qu’à que Powell nous donne une copie de son plan de marche et la question ne sera plus de savoir si l’on va retourner au plus haut de tous les temps cette année, mais plutôt : « est-ce que l’on va plier l’affaire avant Thanksgiving ? Ou faudra-t-il attendre Noël ». Oui, je suis en partie ironique mais il ne me reste plus que ça en attendant les instructions de la FED.
Ailleurs
Ce matin, la plupart des indices asiatiques sont légèrement en hausse – le Japon se démarque après les bons chiffres de Sony et Nintendo. Le Nikkei est en hausse de 1.2%. Cependant, les inquiétudes concernant la Chine, à la suite de chiffres très faibles au sujet de l’inflation, restaient très présentes. Hong Kong est en baisse de 0.3% et La Chine avançait à peine. Pour l’instant on parle de déflation en Chine et chaque jour, c’est pire. L’or est à 1954$ et le Bitcoin est à 36’600$ alors que la demande reste très forte sur la crypto.
Dans les nouvelles du jour, on notera que Disney a publié des chiffres qui étaient ENFIN nettement meilleurs. Il ne faut pas dire que la totalité des problèmes de Disney sont réglés, mais l’explosion du business du streaming – avec une avalanche de nouvelles inscriptions ont quelque peu soulagé le marché. Le titre prenait un peu plus de 3% after close hier soir. Autrement, dans le domaine des « shorts » on notera qu’Exxon vient de dépasser Tesla dans le classement des « titres les plus shortés ». Apple complète le podium, je ne sais pas si c’est une bonne où une mauvaise nouvelle pour Exxon, il faut tout de même se souvenir que ceux qui sont short sur Tesla ne sont pas les plus heureux du monde depuis quelques années -même si depuis quelques mois, ça va un peu mieux.
Autrement, on notera que Discovery a raté son trimestre et plongeait de 16%, Jeffrey Gundlach est convaincu que la récession va nous tomber dessus en 2024 et que ça va faire très très mal – il met encore une fois le danger de l’explosion de la dette en avant – et puis, à propos de dette, les taux hypothécaires à 30 ans viennent de baisser à 7.61% – ça faisait un moment que ça n’avait pas baissé autant. Du côté des chiffres du jour, il y aura les Jobless Claims, histoire de voir si tout est aligné avec les chiffres de vendredi dernier. Et puis pour le reste, nous allons nous concentrer sur les déclarations des uns et des autres, puisqu’il y aura Bostic, Lagarde et Powell qui parleront.
Pour le moment les futures sont légèrement en baisse et tout le monde se demande si l’on peut aligner une neuvième séance de hausse consécutive – mais tout est dans les mains de Powell.
Excellente journée à tous et à demain !
Thomas Veillet
Investir.ch
“I love her, and that’s the beginning and end of everything.” —F. Scott Fitzgerald