Comme vous le savez, les Américains étaient en vacances hier et comme à chaque fois que les Américains sont en vacances, les volumes fondent comme neige au soleil. Et comme à chaque fois que les volumes baissent, c’est aussi plus facile de taper sur le marché. C’est ce qui s’est passé hier. Alors que le marché est toujours en pleine euphorie et que les « experts » hurlent sans cesse qu’il faut acheter des actions parce que la récession ne passera par nous et que les taux vont baisser, voici qu’hier on nous a sorti un sondage Made in Bloomberg qui nous a fait prendre conscience que ça n’était pas encore tout à fait gagné (la baisse des taux)…

L’Audio du 16 janvier 2024

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On n’a pas trop aimé

Force est de constater que l’on comprend vite si on nous explique longtemps. La semaine dernière, plusieurs banquiers centraux américains se sont montrés très prudents en ce qui concerne la baisse des taux, la plupart des commentaires laissaient entendre qu’il ne fallait pas précipiter les choses et que les taux pourraient rester élevés encore un bon moment, histoire de casser les reins de l’inflation une fois pour toute. Oui, parce que je rappelle – pour mémoire – que c’est quand même plus facile de passer de 9% à 4% en termes d’inflation, mais que le gros challenge, reste les 2 derniers pourcents. Et la semaine dernière, l’inflation est repartie à la hausse, je le rappelle AUSSI !

Pourtant, la semaine dernière, personne n’a écouté les Bostic ou autre Bowman, on a fait comme on avait prévu : nous avons continué de parier sur la baisse des taux à venir et les sondages confirment que la plupart des experts pensent que nous aurons 6 à 7 baisses de taux cette année – ce qui revient à dire que dès le mois de mars y compris, chaque meeting de la FED va servir à baisser les taux. Dans 60 jours, la FED baissera les taux et le fera à chaque meeting ensuite. C’est en tous les cas ce que NOUS, les experts en finance, nous pensons. En revanche, ça n’est pas du tout ce que pensent les banquiers centraux. Pourtant, sauf erreur de ma part, c’est quand même EUX qui vont devoir prendre la décision de baisser les taux. Et pas le chef économiste de Goldman Sachs qui s’est concerté avec celui de JP Morgan.

Et en Europe ; c’est pire

Et hier, alors que l’on a refusé d’écouter les membres de la FED depuis plusieurs jours, Bloomberg a eu l’idée de génie de demander à plusieurs membres de la BCE quelle était leur position par rapport à la baisse des taux – s’attendant visiblement à avoir une jolie réponse enrobée de pétales de roses qui laissait entendre que la BCE baisserait rapidement les taux et se soumettrait à la vouloir du monde merveilleux de la finance.

Sauf que non. Alors d’accord, ça n’était pas l’opinion de Madame Lagarde, mais disons que lorsque tu as le patron de la Banque Centrale Autrichienne, Robert Holzmann, qui vous balance de but en blanc que :

« Je ne peux pas imaginer débattre déjà de baisse de taux. Tout ce que nous avons vu ces dernières semaines va dans le sens contraire, donc je pourrais même prévoir qu’il n’y aura pas de réduction du tout cette année »

Et pendant que le journaliste de CNBC avalait son micro dans la neige de Davos, le bon Robert (à ne pas confondre avec le « Petit Robert) en a rajouté une couche :

« La menace géopolitique s’est accrue car ce que nous avons vu jusqu’à présent des Houthis, je pense que ce n’est pas la fin, c’est peut-être le début de quelque chose de bien plus large, qui aura un impact sur le canal de Suez et augmentera les prix là-bas ».

À cet instant très précis, il n’a plus rien dit, mais le journaliste avait perdu connaissance et alors qu’on l’emmenait en ambulance pour un check-up, les bourses européennes ont commencé à prendre la direction du Sud. Mais le problème, c’est qu’Holzmann avait ouvert la boîte de Pandore et dans la foulée, le chef économiste de la BCE, Philip Lane, a déclaré qu’un assouplissement trop précoce serait AUTODESTRUCTEUR, alors que Joachim Nagel, patron de la Bundesbank, a rappelé que les discussions sur une détente monétaire étaient prématurées.

Coup de froid sur l’Eurostoxx

Autant dire que cette vague de prudence de la part pontes de l’économie bancaire a jeté un coup de froid sur les indices boursiers du vieux continent. Nous avions pourtant tout mis en place en cette fin d’année 2023 et la BAISSE DES TAUX était acquise, il ne restait plus qu’à que les Banques Centrales nous écoutent. Après tout, c’est quand même nous qui payons leurs salaires mirobolants !!! Mais que nenni. Depuis plusieurs jours, les banquiers centraux sont devenus très hésitants quant à la probabilité d’une baisse des taux et nous, dans le monde merveilleux de la finance, on continue de parier que les taux vont baisser et que ça va être tellement facile pendant les 12 prochains mois qu’il faudrait être complètement con de ne pas acheter.

Oui, hier l’Europe a baissé. Nous sommes en train de prendre conscience que la baisse de taux ne serait éventuellement pas pour tout de suite, mais malgré cela et malgré les commentaires de ces derniers jours, on s’attend toujours à une baisse des taux en mars. On a vendu hier parce qu’on a eu peur, mais on refuse de rendre les armes. Et puis, lorsque l’on voit la performance de la journée d’hier, le DAX qui perd 0.5% et le CAC40 qui en abandonne 0.7%, on ne peut pas dire que ce sont des ventes de panique, quand on sait que les 2 indices ont pris pas loin de 10% en 2 mois sur le fait QUE LES TAUX ALLAIENT BAISSER. Non, aujourd’hui on veut croire que le plan que nous avons ébauché est toujours d’actualité, même si les généraux disent le contraire. On veut toujours croire que les taux vont baisser et qu’ensuite ça sera BULL MARKET FOREVER…

Optimistes mais pas trop

À ce propos, on notera tout de même qu’il est assez impressionnant de voir tous les économistes nous prévoir une année facile à la hausse parce qu’il n’y aura pas de récession. Mais que dans CHAQUE commentaire – aucun d’entre eux ne parle de ce qui ne va pas : tensions dans le Golf, Canal de Suez bloqué, guerre à Gaza, Canal de Panama bloqué parce que plus assez d’eau, endettement délirant des pays développés, endettement délirant via les cartes de crédit et immobilier commercial qui est au bord du gouffre, prêt à faire un grand pas en avant…

Non, on ne parle que ce qui va bien et on est tout excité de savoir que le S&P500 va monter de 300 points en 2024 – et que ça, c’est une certitude. Ce qui est tout de même assez fou, c’est de voir que les valorisations du S&P500 sont complètement débile et que les PE sont 8 fois supérieurs aux actions européennes, que jamais on n’a vu des valorisations si élevées – même en l’an 2000 – et que l’ensemble de la finance mondiale est prêt à charger la barque pour 300 points de hausse sur le S&P500, tout en étant conscient que le risque à la baisse est nettement plus important. Bon, je vais arrêter ma réflexion ici, parce que si je continue on va me reprocher d’être trop négatif. Ou pire : BEARISH.

Prises de profits en Asie

Le Nikkei 225 recule de 0,68 % après avoir progressé au cours des six dernières séances, au cours desquelles l’indice a atteint des sommets inégalés avant le dégonflement d’une bulle spéculative massive dans les années 1990. L’indice est resté confortablement au-dessus de 35 500 points, les analystes estimant que la reprise n’est pas terminée. Les données économiques publiées mardi ont montré une faiblesse persistante de l’inflation sur le PPI au Japon, ce qui laisse présager une faible pression sur la Banque du Japon pour qu’elle envisage de s’éloigner de sa position ultra-dovish. Le Hang Seng est en baisse de 2% et la Chine abandonne 0.6% en attendant le PIB de demain.

Pour ce qui est du baril, il est à 72.67$ et nous avons toujours les yeux rivés sur la Mer Rouge alors que les Iraniens semblent de plus en plus proches de s’engager au côté des Houthis. Manquerait plus que ça. L’or est à 2052$ et le Bitcoin est à 42’700$ – la conviction de le voir à 100’000$ est plus qu’une évidence, il faut juste que les étoiles s’alignent.

Les nouvelles du jour

Trump a donc gagné l’investiture Républicaine dans un raz-de-marée. De Santis est loin derrière et c’est donc lui qui se battra contre Biden que personne ne veut. Enfin, s’il n’est pas en prison. Pour le reste, la patronne du Fmi pense qu’il faut que la Chine mette en place des réformes afin de stopper la dégringolade dans laquelle elle se trouve. Elle n’a pas précisé quelles réformes et Xi Jinping ne l’a pas encore nommée au ministère de l’économie.

La semaine commence pour de vrai ce matin seulement, la tout de suite nous allons commencer avec les chiffres du CPI en Allemagne – à voir la tronche des autres pays, on se réjouit déjà. Il y aura aussi le ZEW en Allemagne et en Europe et puis aux USA, nous auront le New York Empire State Manufacturing Index et Waller de la FED qui parlera. Du côté des trimestriels, nous aurons Goldman Sachs, Morgan Stanley et Interactive Broker. Comme vous le voyez, c’est encore la saison des financières.

Pour le moment, les futures sont en baisse de 0.27% et demain sera un autre jour. Passez une excellente journée et à demain !

Thomas Veillet
Investir.ch

« You may say I’m a dreamer, but I’m not the only one. I hope someday you’ll join us. And the world will live as one. » -John Lennon