On ne va pas trop revenir sur la fin de semaine délirante que nous avons vécu sur le luxe, mais disons que si l’on cherchait encore des signes d’euphorie : nous les avons trouvés. Vendredi Bernard Arnault s’est donc transformé en MESSIE et en déclarant qu’il était optimiste pour l’avenir (surtout le sien), il a déclenché un rallye complétement démentiel sur le luxe et tout ce qui s’y rattache. D’ailleurs, même les sociétés qui ont profité de la fin de la semaine pour publier des chiffres pourris, ont quand même bénéficié de l’euphorie ambiante. Le CAC40 terminait la semaine au plus haut de tous les temps et plus rien ne nous fait peur, mis à part peut-être de rater le train – le fameux FOMO…

L’Audio du 29 janvier 2024

Télécharger le podcast

Regarder devant

Mais peu importe ce qui s’est passé la semaine dernière, il y a bien trop à dire sur la semaine qui nous attend pour s’attarder sur celle qui vient de s’écouler. Dans les jours qui viennent, nous aurons une avalanche de chiffres macro-économiques, mais nous aurons également une avalanche de chiffres trimestriels – parce que cette semaine c’est la semaine des MAGNIFICENT SEVEN, puisqu’ils sont cinq à publier leurs chiffres du Q4 2023 – Microsoft, Alphabet, Amazon, Apple et Meta seront de sortie tout au long de la semaine et s’il y a une chose que l’on peut dire, c’est que ça sera à double tranchant.

À double tranchant, parce que si c’est bon, cela voudra dire que l’on nous assure la continuité du bull market puisque c’est quand même eux qui nous ont amené où nous sommes. Et si c’est mauvais… Ben si c’est mauvais, je préfère ne pas y penser. Toujours est-il que ça sera un gros morceau de notre semaine, le tout couplé aux chiffres de l’emploi US (Non-Farm Payrolls et JOLTS) et, comme si ça ne suffisait pas : le FOMC Meeting commence mardi et tout le monde attend que Powell laisse la porte ouverte à toutes les fenêtres pour laisser le marché rêver à une baisse des taux en mars.

On est tellement content qu’on oublie l’inflation

Une chose est certaine, c’est que l’on peut dire que le marché va bien. La confiance des investisseurs est à son top et dire du mal des marchés où être prudent sur la suite des évènements est devenu extrêmement mal vu actuellement. Tout le monde est en mode FOMO – et on a tellement la trouille de rater le train de la hausse que l’on est prêt à sauter sur n’importe quelle occasion et inventer n’importe quelle justification pour acheter n’importe quoi. C’est ce que l’on appelle l’euphorie. Et en général, le mot euphorie c’est la dernière étape avant le mot « bulle spéculative ».

Pourtant, ce qui est assez fou, dans le marché que nous vivons en ce moment, c’est cette capacité à ne voir que ce qui peut nous arranger. Non, parce qu’il ne faut pas se mentir, les seules choses qui nous font vibrer, sont les suivantes :

– Tout chiffre qui peut laisser espérer une baisse des taux
– Tout chiffre qui laisse à penser que la récession ne passer pas par nous
– Tout commentaire « optimiste » après une publication de chiffres trimestriel
– Tout commentaire lié à l’intelligence artificielle
– Et pour terminer, toute intervention médiatique du CEO de Nvidia – Jensen Huang – qui viendrait nous dire que l’IA, c’est trop COOL !!!

Pour le reste… Eh ben en fait on se fout pas mal du reste. L’inflation n’intéresse plus personne. Le PCE qui est sorti vendredi laissait à penser que l’inflation était sous contrôle, mais qu’en même temps, elle ne baissait pas franchement non plus. Le fait que ça ne soit pas assez « tranché », nous a donc permis de nous concentrer sur autre chose. Autre chose comme le regard profond et ténébreux du roi de l’évasion fiscale français ; Monsieur Arnault qui aura réchauffé à lui tout seul l’industrie du luxe pour des siècles et des siècles. Amen.

Et le pétrole ?

Mais pendant que l’on se chauffe sur à peu près tout et que l’on embrasse l’euphorie comme si nous étions tous CEO de LVMH, il y a le pétrole qui s’envole et – étonnement personne n’en parle et tout le monde s’en fout – alors oui, je sais bien que nous roulons tous en voiture électrique, que l’électricité, ça ne coûte rien et que – du coup, on s’en fout si ça monte à la pompe – cela étant dit, j’ai tout de même de la peine à croire que la hausse brutale du baril qui vient de prendre 8 dollars en 10 jours, n’ait aucune conséquences sur l’inflation ces prochaines semaines…

Je dois sûrement me tromper et me noyer dans le pessimisme excessif, mais disons que les attaques de drones qui ont coûté la vie à trois Américains ne vont pas rester impunies et tout cela ressemble fort au début d’une escalade qui pourrait ne pas plaire – surtout qu’une bonne partie du Moyen Orient semble en avoir ras-le-bol des interventions américaines – ce qui ne devrait pas améliorer les tensions dans la région et – in extenso – ne devrait pas forcément calmer le jeu sur le baril. Et pourtant, le marché à l’air de s’en foutre comme de l’an quarante. On dirait presque l’on attend de voir arriver le niveau des 95$ pour venir faire des théories sur le fait que le baril va à 150$. Moi je m’en fiche, je vais quand même garder dans un coin de ma tête que c’est pas top-top de voir le baril monter et que tout le monde s’en fiche parce qu’ils veulent acheter du LVMH et du Netflix.

En Asie

Ce matin à l’autre bout de la planète tout est dans le vert pour commencer la semaine. Pourtant une cour de justice de Hong Kong vient d’ordonner la liquidation d’Evergrande, le développeur immobilier le plus endetté de la planète. Il faudra tout de même reconnaître que c’est très étrange. Lorsque l’on a commencé à mettre le doigt sur le problème Evergrande, on nous a vendu la chose comme étant une CATASTROPHE mondiale et que SI EVERGRANDE PARTAIT EN FAILLITE, les conséquences seraient dramatiques pour les marchés financiers un peu partout dans le monde et la contagion serait TERRIBLE.

Nous voici donc plus de deux ans après, les marchés sont au plus haut de tous les temps (oui, ok, pas en Chine), Evergrande part à la casse dans l’anonymat le plus absolu – ou presque.

À l’heure actuelle, le Japon est en hausse de 1%, Hong Kong aussi et la Chine grimpe de 0.3%. Pas de quoi fouetter un dragon chinois. Le pétrole est donc à 78.42$, l’or est à 2’044$ et le Bitcoin s’est réveillé et repart à l’assaut des 43’000$, comme prévu.

Nouvelles du jour

Joe Biden a donc annoncé que les USA allaient répliquer aux attaques Houthis de ce week-end. Les Houthis en question ont déjà commencé à évacuer les cibles potentielles dans la région, ce qui devrait bien décontracter le trafic maritime par là-bas. Et puis, il y a un truc qui revient régulièrement dans les paroles de Biden, c’est qu’il qualifie les Houthis de « rebelles soutenus par l’Iran ». On se réjouit qu’il se chauffe en direct avec l’Iran. Autrement on se fait des théories et autres circonvolutions autour d’Evergrande, on parle beaucoup du rebond du luxe en Chine, ce qui devrait entraîner LMVH en direction des 1’000 Euros et le CAC40 à 8’000 (au moins).

Et puis pour le reste, on se contente de commenter le fait que cette semaine sera longue, chargée et compliquée que ce soit en termes de chiffres du trimestre ou de chiffres économiques. Pour le moment, les futures sont en baisse de 0.13% – ça ne sent pas vraiment la correction puisque l’optimisme reste la règle numéro UN en ce début de semaine. Côté chiffres du trimestre la semaine commencera doucement et tout le monde aura les yeux fixés sur Microsoft et Google demain soir après la clôture.

Pour le moment, nous allons nous contenter de savourer ces marchés qui ne font que monter et qui ne veulent plus s’arrêter. Personnellement, j’ai passé commande de mes T-Shirts et de mes casquettes avec les mots « S&P500 – 5’000 – j’y étais » floqués dessus. Il suffira d’attendre, mais ça ne devrait pas tarder vu l’engouement pour le bull market.

Excellent début de semaine à tous et on se retrouve demain à la même heure et au même endroit.

À demain !

Thomas Veillet
Investir.ch

“If you’re not making mistakes, then you’re not doing anything. I’m positive that a doer makes mistakes.” —John Wooden