On ne va pas se raconter d’histoires, ce marché est visiblement indestructible. On peut lui opposer à peu près toutes les mauvaises nouvelles possibles et imaginables, il ne bronchera pas d’un iota. En revanche, la moindre nouvelle avec un tant soit peu d’optimisme à l’intérieur fera littéralement exploser les investisseurs de joie et une nouvelle phase de hausse sera déclenchée. Actuellement, la seule chose qui a l’air d’intéresser le S&P500, c’est d’aller chercher les 5'000. Le reste on verra plus tard. Hier soir, Powell était invité dans l’émission 60 minutes et les mots qu’il a exprimé n’étaient pas forcément ceux qu’on aurait eu envie d’entendre…

L’Audio du 5 février 2024

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Pourtant

Pourtant, ça n’est probablement pas CES mots d’hier soir qui vont faire flancher le bull market indestructible dans lequel nous sommes. Les futures sont bien en baisse ce matin, mais je suis presque convaincu que ça ne va pas suffire. Quand on voit ce qui s’est passé sur les chiffres de l’emploie de vendredi, on peut se demander d’ailleurs ce qui POURRAIT bien faire baisser le marché. Powell disait hier soir que « la plus grande menace qui pèse sur l’économie actuellement, c’est la géopolitique » – il est clair que lorsque l’on voit la tripotée de tarés qui nous dirigent, il y a de quoi s’inquiéter, mais pourtant je ne suis même pas sûr que ça suffise.

Tenez, à l’heure actuelle je pense sincèrement que si une guerre nucléaire se déclenchait entre deux pays – je ne vais pas faire de choix, ni donner de noms, il y a le choix – je crois que les intervenants se regarderaient et se diraient : « Hhhhmmm, c’est bon pour le secteur de l’armement, tout ça !!! ». Je dis ça, parce que lorsque l’on sait que l’on aimerait bien voir un ralentissement du marché de l’emploi pour permettre à la FED de baisser les taux et que vendredi dernier, les NFP’s nous montrent qu’elles sont plus fortes que jamais et qu’en plus on a dû corriger les chiffres à la hausse pour le mois de décembre ET pour le mois de novembre. ET que, dans la foulée, le S&P500 termine au plus haut de tous les temps ! On est en droit de se demander ce que le marché consomme comme produit illégal. À quelques mois des Jeux Olympiques, ça serait intéressant de savoir, histoire de choper 2-3 médailles.

Non, je dis ça parce que peu importe ce qui se dit ou ce qui se passe, les intervenants trouvent toujours moyen de s’en arranger et trouver ça super-cool.

• L’emploi est trop fort pour permettre à la FED de baisser les taux ? OH OUI, d’accord, mais par contre – si l’emploi il est trop fort, c’est que l’économie elle va TROP TROP bien, non ?

• On nous annonce plus ou moins officiellement que les taux ne baisseront pas en mars, alors que nous avons construit les derniers 20% de hausse sous prétexte que les taux allaient JUSTEMENT baisser en mars ! OH OUI, d’accord, mais s’ils ne baissent pas en mars, c’est pas grave, parce qu’on sait qu’ils baisseront « UN JOUR », il n’y a donc plus qu’à acheter en attendant !!!

Les exemples sont légion et on pourrait continuer des heures comme ça. Mais ça ne servirait à rien, parce que pour l’instant, le marché veut monter et n’en n’a rien à faire de la baisse. On sait que les taux vont baisser, que nous ne serons JAMAIS en récession et qu’en plus les nouvelles technologies (pour ne pas dire L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE) vont nous sauver les miches quoi qu’il arrive. Il n’y a donc pas de raison de se poser des questions. Et pour répondre aux questions qu’il ne faut pas se poser, il suffit d’acheter le marché et d’attendre les 5’000 sur le S&P – au moins.

La situation

Si l’on reprend les choses dans l’ordre pour bien commencer la semaine, on se souviendra que – globalement – les Magnificent Seven ont tous publié des chiffres trimestriels plutôt pas mal. Surtout Meta et surtout Nvidia. Nvidia n’a pas encore publié – JE SAIS – mais quand tu vois que le titre a pris 40% depuis le premier janvier, tu te dis qu’il y a des gens qui doivent déjà savoir que les chiffres seront tellement bons que l’on va devoir inventer de nouveaux adjectifs pour les qualifier.

Ensuite, il y a les chiffres de l’emploi qui démontraient encore une fois qu’il faut arrêter de faire des prévisions sur les chiffres de l’emploi parce nous sommes totalement nuls à ce petit jeu. Et que non seulement on s’est gouré magistralement sur les chiffres du mois de janvier, mais EN PLUS, le gouvernement s’est gouré sur les chiffres de novembre et de décembre. Et pas qu’un peu, puisqu’ils se sont plantés de plus de 100’000 Américains. Il faut d’ailleurs reconnaître que pour nous « les visionnaires de la fiance », ça n’est pas simple de faire des prévisions quand on sait que le résultat peu encore changer dans 3 mois.

C’est un peu comme si tu gagnes au loto et qu’on te dit : « on ne vous donne pas l’argent, parce qu’on va refaire encore deux fois le tirage et si dans après les trois tirages, vous avez toujours les 5 bons numéros et les deux étoiles ; alors là on vous donnera l’argent, moins ce qu’on va donner à l’État d’abord, à l’Ukraine ensuite et s’il reste quelque chose, alors là vous aurez gagné.

Et y a Powell

Mis à part les chiffres du trimestre qui sont trop bons parce qu’on a baissé les attentes et les chiffres de l’emploi qui se rejouent la théorie de la balle magique, il reste encore Powell qui a parlé hier soir, histoire de mettre l’ambiance dans un début de semaine plutôt calme. Le patron de la FED a donc déclaré deux trois trucs qui méritent d’être dit, puisqu’en fait il a probablement donné plus d’infos à la télé à une heure de grande écoute, qu’il n’en a donné aux « experts » en sortant du dernier FOMC Meeting.

Je vais être très franc, il a raconté plein de trucs, mais il n’y en a que quelques-uns qui m’ont fait tilter :

1) L’économie va tellement bien que la FED peut se donner le temps de choisir le bon moment pour baisser les taux.

Il est donc en train de nous dire que tant que tout va bien, il n’y a pas non plus URGENCE de baisser les taux pour aider une économie qui n’en n’a pas besoin. Bam, on est pris à notre propre piège.

2) Il a estimé que la FED n’aurait pas le temps matériel, ni le temps d’obtenir suffisamment de données pour justifier une baisse des taux en mars.

Pan ! Dans les dents de ceux qui croyaient encore au miracle. Il est clair qu’avec l’inflation qui repart à la hausse et l’économie qui cartonne, on voyait mal comment il aurait pu faire ça, mais il y avait visiblement encore pas mal de monde qui comptait un peu dessus quand même. Ben oui, c’est un peu pour ça qu’on est monté depuis le mois de novembre.

3) Il a clairement expliqué que la FED restait sur un projet de TROIS baisses de taux cette année.

Kaboom… Et nous on parie toujours sur SIX à SEPT baisses en 2024. Pourtant, c’est pas la première fois qu’il le dit et qu’il le répète, mais allez savoir pourquoi, on en veut toujours plus. La prise de conscience qui va venir, ne sera pas forcément agréable à vivre. Quoi qu’à l’heure actuelle, on est capable de trouver encore des bonnes nouvelles là-dedans.

4) Powell estime que le risque de récession « n’est pas très élevé ».
5) Il aurait voulu commencer à monter les taux plus tôt
6) La crise de l’immobilier commercial semble « parfaitement gérable »

On se doute qu’on est toujours plus intelligent APRÈS, mais on est content de savoir que les banques qui se sont vautrées en faisant n’importe quoi avec l’immobilier commercial, seront soutenues (ENCORE UNE FOIS), le moment venu. Par contre ; VOUS, si vous ne payez pas la moindre petite amende de stationnement, attention à l’arrivée des forces d’interventions spéciales.

En résumé, la FED ne sait pas vraiment où elle va et Jerome Powell lui-même ne pourrait même pas dire quand est-ce qu’il va baisser les taux et ni combien de fois. Même sous la torture. Il ne le sait tout simplement pas. L’interview d’hier soir nous montre encore une fois que nous nous sommes peut-être un peu emballés et que nos attentes sont (PEUT-ÊTRE) un peu trop élevées, mais on s’en fout. Je dirais que si le marché baisse de 0.5%, ça sera la BONNE OCCASION d’acheter sur faiblesse, parce que fondamentalement, on SAIT que les taux baisseront – un jour – et que rien que le fait de savoir cela, nous suffit amplement.

Le reste

Ce matin la Chine se prend encore une fois près de 2% dans les dents. Le dernier chiffre en date montre une croissance plus faible que les attentes. Hong Kong suit le mouvement, mais dans une moindre mesure et le Japon monte gentiment sur sa propre planète. Le pétrole est à 72.64$. Maintenant que les Ricains ont fait leur week-end tire-pipes sur les Houthis, plus personne n’a peur d’un embrasement dans la région. On a l’impression qu’après les bombardements, le Moyen Orient a haussé les épaules et s’est dit : « Ah ben c’était « juste ça ? » et ils ont recommencé à pomper du brut. L’or est 2047$ et le Bitcoin est à 42’675$.

Dans les news du jour, on retiendra que l’UBS pense que l’or va à 2200 cette année et que l’argent va exploser. Tiens, c’est marrant, le coup de l’argent on nous le fait chaque année. Autrement, il y a Biden qui a fait un discours pour expliquer aux Américains tout ce qui n’irait pas si Trump était réélu. C’est une bonne stratégie expliquer que l’autre candidat est un tocard et ne pas mettre en avant ce que TOI tu peux faire. Bon, en même temps, mis à part se péter la gueule devant les caméras, il ne sait pas faire grand-chose d’autre. On notera encore que les primes d’assurances pour les voitures sont en hausse de 43% aux USA. Encore un truc qui fait du bien à l’inflation.

Chiffres du jour

En ce qui concerne les chiffres du jour, nous aurons les PMI’s des services en Europe et aux USA. Et puis aux USA, il y aura aussi l’ISM Non-Manufacturing et l’ISM Non-Manufacturing PMI. Côté chiffres du trimestre, nous aurons Caterpillar, McDonald’s et OnSemi’s qui publieront avant l’ouverture et après la clôture, il y aura Palantir et NXP.

Les futures sont en baisse de 0.25%, mais depuis que je suis debout, il n’arrête pas de remonter. On dirait que l’effet magique des bull markets permanents a encore frappé. Il me reste à vous souhaiter une excellente journée, un très bon début de semaine et on se retrouve demain pour voir de combien de pourcents on est monté.

À demain !

Thomas Veillet
Investir.ch

“Never bend your head. Always hold it high. Look the world straight in the eye.” —Helen Keller