Les marchés ont vécu une sale journée en général. Je dis en général, parce que lorsque l’on regarde les chiffres du PIB qui ont été publiés hier, le premier mot qui aurait tendance à venir à l’esprit ; c’est le mot STAGFLATION. Une croissance molle avec une inflation qui ne baisse pas. C’est exactement ce qui ressort des chiffres d’hier. La STAGFLATION n’est pas une situation que l’on rencontre régulièrement dans nos économies. Donc on connait mal. Mais on sait une chose : c’est qu’à choisir entre L’INFLATION, LA RÉCESSION et la STAGFLATION, il est clair que c’est systématiquement le dernier que l’on veut éviter le plus et c’est justement la direction que nous sommes en train de prendre.

L’Audio du 26 avril 2024

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Croissance molle

Le PIB Américain est donc sorti à 1.6% alors que les « experts » attendaient une hausse de 2.5% – d’ailleurs on ne va même pas commenter le fait que les économistes se sont ENCORE gourés de manière magistrale, vu que ça devient une habitude – mais disons qu’un tel écart entre la réalité des faits et les espoirs communiqués jusque-là, n’a pas réellement été apprécié par le marché. C’est le moins que l’on puisse dire. La baisse généralisée des indices mondiaux est donc à créditer majoritairement sur le dos de ce chiffre dégueulasse qui n’a pas fait plaisir. À ça et au fait que META a pulvérisé les attentes, mais n’a pas annoncé de bonnes nouvelles à ses actionnaires sur leur manière de vouloir dépenser le cash – Zuckerberg voulant investir massivement dans l’IA en demandant du temps pour voir des résultats, alors que les actionnaires voulaient de l’argent et puis c’est tout.

Mais les chiffres du PIB auront eu au moins le mérite de ne pas montrer que des mauvaises choses. Comme nous avons toujours ce talent inouï de vouloir chercher ce qui va bien au milieu du chaos, certains experts ont tout de même découvert qu’à l’intérieur même du chiffre publié hier, il y avait des choses qui laissaient à penser que la croissance restait, tout de même pas si mauvaise que cela et, qu’en gros il ne fallait pas regarder UNIQUEMENT les 1.6% affichés, mais également ce qu’il y avait « derrière ». Alors je ne sais pas si c’est avec l’énergie du désespoir que nous allons chercher « ce qui va bien à chaque fois », ou si c’est réellement un très grand professionnalisme d’aller au fond des choses. Mais ce qu’il faut retenir c’est que ça n’est pas la première fois ces derniers mois, que l’on va chercher très très profond pour trouver du bon quand la couverture est clairement immonde. Et le pire, c’est que ça marche souvent, parce que nous sommes des indécrottables optimistes (en règle générale).

Stagflation ou pas

Alors bien évidemment, nous ne sommes pas ENCORE en STAGFLATION, mais disons que la définition du terme économique commence sérieusement à y ressembler. Il faudra cependant plusieurs mois pour pouvoir le confirmer. Dans les bouquins d’économie ont dit que :

« La stagflation est la situation d’une économie qui souffre simultanément d’une croissance économique faible ou nulle et d’une forte inflation. Cette situation est souvent accompagnée d’un taux de chômage élevé, contredisant ainsi les conclusions du keynésianisme et de son carré magique de Kaldor. »

Si l’on fait abstraction du keynésianisme et du carré magique du Moldor et que l’on s’arrête à la définition de base, on peut encore y ajouter que le premier à avoir utilisé le mot est Ian Mcleod, un politicien britannique qui a utilisé ce mot pour définir l’économie de son pays en 1965. Ce qu’il faut retenir ensuite, c’est que les USA se sont retrouvés dans cette situation dans les années 70 et que pour en sortir, il a fallu monter massivement les taux, stimuler l’économie et trouver des solutions pour améliorer l’offre énergétique. Bien qu’à l’époque j’étais bien plus concentré sur le fait de ne pas remplir mes Pampers pendant la nuit, ça n’a pas été une partie de plaisir que de trouver la porte de sortie.

Trop tôt

Il est donc bien trop tôt pour officialiser le fait que nous sommes en Stagflation, mais une chose est certaine, c’est que la situation actuelle n’est pas en train ne nous diriger vers une baisse des taux. Alors je sais bien que nous avons accepté le fait que les taux ne baisseront probablement pas cette année aux USA, mais ça n’est pas vraiment une bonne nouvelle pour l’économie américaine et cela nous oblige tout de même à lever le drapeau de la prudence pour les prochaines publications économiques.

En revanche, dans la définition de la Stagflation, on parle également d’un chômage très élevé et d’un marché de l’emploi bien pourri à souhait. Et il faudra tout de même bien souligner que cet état de fait n’est pas encore reconnu actuellement puisqu’hier les Jobless Claims sont sortis au plus bas de l’année, laissant à penser qu’au moins du côté emploi, ça ne va pas trop mal. C’est donc visiblement trop tôt pour commencer à dire que la STAGFLATION est inévitable. Néanmoins, on se serait clairement passé de devoir aborder le sujet alors que l’on peine à trouver une vision à long terme pour les économies. Par contre, alors que les USA semblent pagayer dans tous les sens pour trouver un chemin satisfaisant économiquement et que leur Président est incapable de dire bonjour sans dire une connerie s’il n’a pas de prompteur devant ses yeux, l’Europe à l’air incroyablement forte et juste dans son combat contre l’inflation – ce qui, je dois dire, m’étonne au plus haut point. Mais si l’on en croit les chiffres publiés récemment – pour autant qu’ils n’aient pas été bricolés par magouilleurs qui gèrent l’Europe à Bruxelles – le Vieux Continent se dirige paisiblement vers une baisse des taux maitrisée. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser qu’ils ont oublié de calculer un truc et que quand ça va nous revenir en plein face, ça va faire tout bizarre.

Bref, les marchés ont baissé hier et sur Google, le mot le plus recherché était le mot : « Stagflation ».

En Asie ce matin

Ce matin les marchés asiatiques se foutent totalement de ce qui a fait baisser l’Europe et les USA la veille, puisqu’APRÈS la publication du PIB Américain, Microsoft et Google ont publiés leurs chiffres du trimestre et ont carrément défoncé les attentes et surpris tout le monde dans le bon sens. Même cette merde de SNAP montait de 25% after close. Les intervenants asiatiques étaient donc plus « emballés » par les chiffres de la tech que par les données économiques des USA qui lancent des SOS par tous les moyens.

Le Japon est en hausse de 0.8%, tout comme la Chine et Hong Kong s’envole de près de 2%. Le pétrole est à 83.86$ et repart gentiment à la hausse, quant à l’or, il se traite à 2348$ et, tout comme le Bitcoin, on s’en fout parce que l’on sait avec certitude qu’il ira à 3’000$. Un jour. Reste juste à trouver le jour. Pour ce qui est de la crypto-star, il est à 64’400$ et comme le Halving est derrière nous, tout le monde regarde le Bitcoin pour savoir à quel moment il va finir par monter à 150’000$ – oui, je trouve le temps long.

Les nouvelles à retenir

Dans les choses qu’il faut retenir ce matin, ne cherchez pas plus loin, on va devoir parler de Microsoft et de Google. Mais on va commencer par SNAP. En ce qui me concerne, je hais ce titre, cette société et le produit merdique qu’ils mettent à disposition du public, mais c’est personnel. Hier soir la société a publié des chiffres que les analystes ont considérés comme « bons », dans le sens où ils ont perdu moins de fric que d’habitude. On sent donc clairement que ça sent la rose et que la performance est au coin de la rue. Ils ont annoncé qu’ils avaient 9 millions de nouveaux utilisateurs sur les 422 millions d’existant. De la folie. En plus ils ont augmenté leurs attentes pour la suite. Attentes qui sont nettement au-dessus de celles des analystes. Le titre prenait donc 25% hier soir after close. Bon, 25% de rien, ça reste pas grand-chose, mais c’est tout de même à classer dans le tiroir des « bonnes nouvelles ».

Chez Microsoft, c’était presque énervant de voir tant de perfection dans les chiffres. La société est indestructible et semble ne pas faire d’erreur et être juste presque à tous les coups. Pourtant quand vous installez un software de chez eux, vaut mieux être concentré et ne pas faire deux choses à la fois. Mais hier encore, le géant du logiciel a publié des résultats trimestriels supérieurs aux attentes pour le mois de mars, avec notamment un nouveau trimestre de fortes performances pour tout ce qui est CLOUD et ils annoncé avoir une accélération de la croissance grâce à l’AI – ce qui en rajoute une couche. Grosso-modo, toutes les attentes ont été battues et ils ne se sont même pas montrés inquiets pour la suite de l’année. Ils sont en vitesse de croisière et écrasent tout sur leur passage, on dirait Apple il y a quelques années en arrière, quand l’iPhone était encore une révolution. Microsoft était en hausse de 5% after close.

Du côté de chez Google, c’était également la fête au village – mais pour des raisons différentes. Tout d’abord, ils ont – bien sûr – pulvérisé les attentes des analystes – mais en plus, ils ont annoncé le premier dividende de leur histoire – un dividende de 20 centimes par action – alors que la société est assise sur une montagne de cash de plus de 108 milliards de dollars. Et en plus de cela, ils annoncent un rachat d’actions de l’ordre de 70 milliards. Le titre de la société vivait un véritable orgasme boursier after close en EXPLOSANT de près de 12% – pendant un moment, ça montait même de 16%. En conclusion, si vous vous demandez pourquoi les futures sont en hausse de 0.9% ce matin. Ne cherchez plus, c’est à cause de Google et de Microsoft.

Et maintenant, que vais-je faire ?

Pour ce qui est de la journée qui nous attend, la bonne nouvelle c’est que les seules nouvelles que l’on trouve dans les médias, sont à propos des chiffres de Google et de Microsoft, pas un mot sur le discours soporifique du Roi de France à la Sorbonne, pas un mot sur les tensions au Moyen Orient qui n’existent plus et à peine quelques phrases sur les chiffres du PCE qui seront publiés tout à l’heure. Pourtant, si le PIB nous a planté un couteau dans le dos, le PCE a le pouvoir de nous tirer dessus à la mitrailleuse lourde. Mais pour l’instant, tout le monde s’en fout. Même si l’économie va mal et entre en Stagflation, Microsoft et Google seront toujours là pour nous sauver la vie. Les matières premières peuvent monter, le chômage peut exploser, les taux peuvent remonter à 12%, tant que Microsoft fait de la croissance, le reste n’a que peu d’importance.

En plus des chiffres du PCE nous aurons la conférence de presse de la BOJ dans un moment, puis plus tard il y aura le Prince de la BNS qui parlera et pour le reste, on se concentrera sur les chiffres d’Exxon, de Chevron, d’ABBvie et de Colgate.

En ce qui me concerne, je vous souhaite un excellent week-end et à la semaine prochaine !

Thomas Veillet
Investir.ch

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