Encore une semaine exceptionnelle qui se termine. Après les chiffres du CPI qui nous ont confirmé que le plan de la FED se déroulait sans accroc, que l’inflation ÉTAIT définitivement en train de céder et qu’ils allaient vraiment finir par baisser les taux DEUX fois en 2024 – DEUX fois c’est moins que HUIT, mais on va quand même faire avec – les marchés ont entamé la séance d’hier avec la ferme intention de marquer l’histoire.

L’Audio du 17 mai 2024

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Presque…

Et marquer l’histoire, pour le monde merveilleux de la finance, ça veut dire : « aller chercher les chiffres ronds ». Le Dow Jones était donc la cible idéale, si proche des 40’000. Ensuite, le reste ne fût qu’une formalité ; vous avez demandé les 40’000, vous avez eu vos 40’000. Une fois que nous fûmes arrivés à cette marque mythique, on a pris des photos, vendu des casquettes et des t-shirts et ensuite on a vendu le marché et on s’est repassé le film des chiffres économiques qui sont trop trop bons pour se rassurer encore une fois sur le fait que les taux baisseront bien en 2024 et que la FED a fait tout juste jusque-là et qu’ils sont beaux forts et intelligents.

Alors que l’ensemble des médias s’excitaient sur les 40’000 comme un labrador qui a découvert une chaussure abandonnée, il se passait aussi d’autres choses du côté des chiffres économiques ET des chiffres trimestriels. Tout d’abord, il fallait regarder les chiffres de Walmart. Le plus grand distributeur américain et le plus gros employeur américain a publié des chiffres impeccables. Des bénéfices meilleurs qu’attendus, des ventes meilleures qu’attendues et des prévisions meilleures que prévues. Bon, il manque juste encore un programme de rachat d’actions et c’était presque aussi bon qu’Apple, Microsoft et Google réunis. Et puis surtout, Walmart a rassuré le marché sur UNE CHOSE QUI EST PLUS QU’IMPORTANTE :

« Le consommateur consomme toujours, même s’il fait plus attention à ce qu’il consomme »

On a d’ailleurs pas mal parlé du consommateur hier, puisque depuis la publication des Retail Sales – qui étaient noyés dans les chiffres du CPI – on a commencé à se rappeler que l’économie qui ralenti, c’est bien parce que ça nous rapproche encore un peu plus de la baisse des taux, mais que ça serait pas mal que le consommateur ne nous lâche pas non plus. Les chiffres et les déclarations de Walmart ont été donc un peu rassurantes dans ce sens. On n’a pas encore complètement oublié (enfin, pas tout le monde), que les CHIFFRES DU PIB américain du mois passé étaient plus que merdiques. Et que si le consommateur américain – qui représente quand même 70% du PIB en question, nous lâche, on va pas être bien. Mais peu importe, pour le moment ça ne semble pas être le cas. On va dire que le consommateur ne consomme pas moins en termes d’argent, mais qu’il fait plus attention à ce qu’il achète et que c’est un peu moins la fête du slip qu’avant.

L’économie plie mais ne rompt pas

Pendant que Walmart prenait 7% et terminait au plus haut de tous les temps, nous avons encore dû digérer des indicateurs économiques qui n’étaient que moyennement encourageants. Alors avant toute chose et avant d’aller plus loin, il faut savoir qu’en ce moment, toute la subtilité de l’interprétation des marchés passera par le fait que nous avons BESOIN de chiffres qui font penser que l’économie ralenti et que l’emploi est en train de s’embourber dans une ornière. Mais pas trop quand même parce que sinon on va parler de RÉCESSION. Et puis alors que l’économie montre des signes de faiblesse, il ne faut pas non plus que l’inflation, elle, n’en montre pas, des signes de faiblesse. Parce que sinon, on va parler de STAGFLATION.

Et que ça soit la STAGFLATION ou la RÉCESSION, on n’a vraiment pas besoin ou envie de se replonger dans les bouquins d’économie pour savoir ce que ça veut dire. Nous on veut juste acheter bas, vendre haut, puis revendre encore très haut et racheter plus bas, faire beaucoup d’argent et recommencer. On n’a pas très très envie de réfléchir un peu plus. Et ça tombe bien parce que lorsque l’on regarde les chiffres d’hier, on se dit que c’est presque trop facile. D’un côté on a le Philly FED qui montre que les conditions économiques de la région de Philadelphie se dégradent et de l’autre on a les chiffres des Jobless Claims qui sont sortis moins forts que prévu. On a donc un combo gagnant parce que l’économie est en train de chanceler, mais de l’autre côté on a les demandeurs d’emplois qui demandent moins qu’avant, ce qui compense le ralentissement économique. Et puis en plus, derrière on a le COMBO BONUS, avec la croissance des offres d’emplois qui ralenti – excellente nouvelle pour la baisse des taux à venir au mois de septembre ET LES CHIFFRES de Walmart qui nous disent que le consommateur va bien, qu’il est serein et mature et que tout va bien se passer.

Difficile de rêver mieux

Pas simple de trouver mieux comme photo de famille. On a l’impression que tout est huilé et que tout se déroule selon le plan établi par une puissance divine ou le scénariste de la huitième saison d’une série Netflix dont plus personne ne se souvient le début. Par moment, quand je regarde la longue liste des bonnes nouvelles de cette semaine et l’interprétation qu’on en fait, je me demande pourquoi on n’a pas réussi à clôturer au-dessus des 40’000 et que l’ensemble des marchés se sont dégonflés dès que l’objectif a été atteint. On aurait dit une bande de cycliste chargés comme des mules qui sont montés un col de première catégorie à la vitesse d’un cheval au galop et qui n’arrivent plus à monter dans le bus ensuite, parce que l’effet des vitamines C vient de se terminer.

La fin de la séance aura donc été placée sous le signe des prises de profits en attendant ce vendredi et en attendant de voir si on a VRAIMENT envie de continuer à monter. L’un dans l’autre, si l’on essaie d’analyser le sentiment de marché – chose qui n’est pas une science exacte et qui est à peu près aussi fiable que le vaudou – on a un peu l’impression qu’il y a deux camps qui s’affrontent :

• Ceux qui pensent que ça pourra plus jamais baisser parce que la FED est notre amie et qu’elle distribue des puts de protection comme si ça ne coûtait rien.

• Et ceux qui pensent qu’il y a trop de trucs qui dysfonctionnent en ce moment et que dès l’instant où l’on en prendra VRAIMENT conscience, ça sera : Adieu veaux, vaches, cochons…

Mais pour l’instant, il y a plus d’amis de la FED que d’amis de la ferme et tant que ça sera comme ça, ça ne baissera pas. Enfin, pas vraiment. En revanche, quand ça deviendra « COOL » d’être Bear, tout va changer. Mais nous n’en sommes pas là.

En Asie et ailleurs

Ce matin les marchés asiatiques sont en baisse et se pose des questions sur la suite des évènements. On se demande toujours si les taux US vont vraiment baisser un jour et même i 70% des sondés pensent que ça sera le cas en septembre et en décembre, on se souvient qu’en janvier la majorité aurait vendu son père, sa mère et son chien pour parier sur une baisse des taux en mars. Ce qui revient à dire que les statistiques qu’on nous balance pour nous dire que TOUT VA BIEN, ne sont que moyennement fiables. Le Nikkei ne fait rien, le Hang Seng est légèrement en hausse et la Chine est dans le rouge très clair. Pour ce qui est du reste, on notera que le pétrole est à 79.38$, l’or est à 2381$ et le Bitcoin vaut 65’600$.

Dans le reste des choses à savoir, on notera que les MEME Stocks se sont encore fait défoncer hier. GameStop a ENCORE perdu 30% et Citron Research a déclaré être short sur la valeur. La dernière fois qu’ils ont fait ça, ils ont perdu 100% de leur investissement, reste à voir si ça va fonctionner. Sur ce coup-là, je leur souhaite vraiment tout le bonheur du monde. Il y a également Jamie Dimon qui a parlé. Alors lui, comme d’habitude, il n’est pas super-bullish. Il est d’ailleurs faux depuis des mois, mais il persiste. Cette fois il pense que les gens n’ont pas compris ce qui se passe sur l’inflation et qu’elle est beaucoup plus forte que l’on veut bien le dire (ou que l’on veut bien nous dire). Il met encore une fois le marché en garde parce que selon lui, ça peut finir qu’à un seul endroit ; dans le mur. Et à très grande vitesse.

Autres nouvelles

D’ailleurs, à propos d’inflation. Je suis tombé sur un rapport passionnant. Aujourd’hui, si l’on écoute les autorités, elles sont toutes au bord de l’orgasme à chaque fois que l’inflation baisse de 0.1% et se rapproche un peu plus des 2%. D’ailleurs, le jour où le CPI US est à 2%, ça va être le délire chez les officiels des banques centrales qui seront à peu près aussi fiers d’eux que ceux qui roulent en voiture électrique en pensant sauver la planète. Cependant, si l’on fait l’addition des conséquences de l’inflation sur ces 4 dernières années. Elle n’a pas baissé un seul mois depuis janvier 2021. Cela signifie que les prix ont augmenté de plus de 19,5 % en moins de quatre ans. Cela représente une moyenne de 5,5 % par an. Cela fait 37 mois consécutifs que l’inflation en glissement annuel n’a pas été inférieure à 3%. Elle s’ajoute donc maintenant à celle des années précédentes ; il s’agit en fait d’une inflation composée, comme pour les intérêt composés…

Et si l’on en croit les experts qui ont basé leur carrière sur les intérêts composés, des gars comme Warren Buffet ou Charlie Munger, on peut dire que ça a plutôt bien fonctionné. Donc, je ne sais pas si c’est une bonne nouvelle d’en arriver à se dire que l’inflation est une inflation composée. J’ai envie de dire que ça ne peut pas BIEN se terminer !!! Aujourd’hui, vous payez 20% plus cher pour la même chose qu’il y a 3-4 ans. Et ne suis pas certain du tout que vos revenus ont suivi la même courbe. Enfin. Je dis ça, je dis rien. Je ne veux froisser personne. Pour ce qui est des chiffres du jour, nous aurons le CPI en Europe – ce qui devrait être un carton et pousser la BCE à baisser les taux en juin et puis, il y aura Waller et Daly de la FED qui vont parler pour nous dire ce qu’on sait déjà… que les taux vont rester haut mais que sûr un malentendu, ça pourrait baisser. Peut-être.

En ce qui me concerne, je vous souhaite un excellent week-end prolongé et on se revoit mardi pour la suite des évènements et les chiffres de Nvidia !!!

À mardi, soyez forts et que la force soit avec vous !

Thomas Veillet
Investir.ch

“If investing is entertaining, if you’re having fun, you’re probably not making money. Good investing is boring.” George Soros