Une chose est certaine, nous nous sommes habitués à vivre dans l’incertitude la plus totale. Que ça soit au niveau des droits de douane où de la guerre, plus rien ne touche l’investisseur moyen qui a tendance à se dire que « de toutes façons, ça va bien se terminer à la fin ». Je ne sais pas si vous vous rendez compte, mais ma dernière chronique date d vendredi matin. Nous sommes mardi et entre-deux, les USA sont entrés en guerre, le pétrole a explosé, l’Iran a voulu fermer le détroit d’Ormuz, ils ont répliqué contre le Qatar – mais tout le monde s’en tamponne comme de l’an quarante – et dans la nuit, Trump a déclaré que la guerre des 12 jours était finie…

L’Audio du 24 juin 2025

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96 heures

Et je me suis absenté 96 heures… même pas le temps de prendre des vacances, même pas le temps de comprendre ce qu’il y a dans la tête du monde merveilleux de l’investissement – au contraire – c’est à ne plus rien y comprendre, il n’y a plus aucune logique et vous avez vu ? Depuis 12 jours : PLUS UN MOT SUR LES DROITS DE DOUANE, plus un mot sur les moratoires, plus un mot sur les discussions avec la Chine, l’Europe et les conséquences éventuelles sur l’inflation. Plus un mot et plus RIEN à FOUTRE des droits de douane. Nous étions trop occupés à trouver ce qu’il y avait de positif dans la guerre entre l’Iran et Israël, trop occupés à trouver une raison de vendre le pétrole parce qu’en fait les attaques de missiles sur le Qatar, c’était un « signe de faiblesse » du gouvernement iranien. Trop occupés à trouver « génial » le cessez-le-feu annoncé par Trump – et ce, même si l’Iran ne confirme pas vraiment et qu’Israël est étrangement silencieux.

Non, il faut retenir une chose en ce moment et ça s’applique à toute l’année boursière 2025 : NOUS SOMMES INDESTRUCTIBLES ! Le marché, les intervenants, les investisseurs, le bull market, TOUT EST ABSOLUMENT INDESTRUCTIBLE ! Peu importe la nouvelle, peu importe la gravité de ce que l’on nous annonce, peu importe l’inflation, les droits de douane, leur impact sur l’inflation, le marché du travail qui morfle, les taux qui ne baissent pas, la détresse du marché obligataire, les risques de stagflation, les risques de récession : PLUS RIEN NE PEUT nous atteindre. Le BULL MARKET est éternel et on n’est pas là pour perdre du temps. Les périodes de baisse, même si elles durent 20 minutes sont considérées comme des opportunités de racheter comme des fous, parce que HEY, THE ONLY WAY IS UP, BABY !!! Aujourd’hui, on va parler des chiffres de FEDEX qui arrivent et du fait que plus personne n’en attende quoi que ce soit. Du fait que la guerre est finie en Iran, même si y a que Trump qui est d’accord. Des taux qui pourraient baisser à la FED parce que l’unité derrière Powell est en train de craquer. Mais on va parler aussi de pourquoi on n’en a rien à faire du détroit d’Ormuz – surtout maintenant qu’on est tous experts sur le sujet et qu’EN PLUS, on sait où ça se trouve. Et puis on va aussi NE PAS PARLER des droits de douane, parce que c’est « tellement HAS BEEN », par contre on va se réjouir de voir que Tesla prend 8% parce qu’elle a lancé ses Robotaxis à Austin avec des influenceurs dedans, même si de l’autre côté, ils sont aussi poursuivis pour un défaut du système d’autopilot. Mais d’abord on va commencer par la guerre en Iran qui vient d’être terminée sur « Truth Social » par Trump lui-même personnellement tout seul.

La guerre des moins de 100 heures

Nous sommes mardi matin, le 24 juin 2025. La guerre des 12 jours est donc terminée. On ne sait pas quand les premiers T-Shirts « been there, done that » seront vendus avec une casquette MAGA offerte, mais une chose est certaine, c’est que Donald Trump est officiellement le patron du monde et « qui ne saute pas, n’est pas Trumpiste » dorénavant. Donc. Si l’on récapitule depuis vendredi. Non, parce que des fois il faut quand même essayer de se souvenir d’où on vient pour savoir où on va. Vendredi, Trump a déclaré qu’il se laissait deux semaines pour savoir s’il voulait péter la gueule à l’Iran ou pas. Sur cette déclaration pleine de bon sens – chose à laquelle nous ne sommes pas habitués venant de Trump – les marchés ont terminé la semaine de façon plutôt haussière et encourageante, en se disant qu’ils allaient pouvoir calmer le jeu et trouver une solution intelligente. Évidemment, pendant le week-end, Trump a décidé que DEUX SEMAINES c’était quand même vachement long et il a envoyé des B2 pour faire le ménage en Iran. Cette attaque éclair durant le barbecue du week-end, aura eu pour effet de :

1) Faire monter les titres de la défense parce que quand même, ils ont du matos de fou ces Américains
2) Rendre Israël hyper-content de voir arriver le cousin d’Outre-Atlantique pour donner un coup de main pour faire le ménage
3) Augmenter de manière extrêmement élevée, les risque de blocage du détroit d’Ormuz – même si de par ce fait, les Iraniens déclencheraient un suicide économique – on sait que les clowns qui dirigent le pays ne sont pas non plus des génies et que l’économie apprise dans le Coran ne fonctionne que rarement super-bien, surtout si tu enlèves le pétrole de l’équation.
4) Et puis pour terminer, ça aura aussi eu pour effet d’envisager une réplique iranienne d’ampleur qui pourrait impacter les bases américaines (désertées) de la région.
5) Bref, les Etats-Unis étaient en guerre pour la 1212ème fois depuis que Christophe Colomb s’est gouré de direction pour aller en Inde.

Bref, quand on est revenu au bureau lundi matin, on s’est dit que le pétrole allait exploser, que les marchés allaient se péter la gueule et que la probabilité de voir baisser les taux, on pouvait se la mettre où je pense. Sauf que c’était sans compter notre résilience et notre capacité à se dire que « ça allait bien se passer » et qu’en plus, quand on regarde dans l’histoire – les guerres font inévitablement naître des bull markets et que six mois après les premiers coups de feu, on est généralement plus haut. Alors pourquoi attendre 6 mois ??? Du coup. Là. Hier soir, le S&P500 est au plus haut depuis le mois de février. Autant vous dire que le marché – à l’heure actuelle – c’est un gros missile avec « on s’en fout de la guerre, on s’en fout du pétrole, on s’en fout de l’inflation » marqué dessus et qu’on envoie sur ceux qui croient encore au Bear Market.

La paix

Et pour corroborer ces croyances et cet optimisme exacerbé, les marchés américains ont terminé en hausse, parce que la guerre était déjà gagnée dans la tête des intervenants et que MÊME L’ATTAQUE contre le Qatar était considérée comme du pipeau. Et comme « UN GROS SIGNE DE FAIBLESSE DU GOUVERNEMENT IRANIEN » qui n’a rien trouvé de mieux que de « prévenir qu’ils allaient attaquer », manquerait plus qu’ils mettent des bonbons dans les têtes de leurs missiles. Et puis aussi quelques poignées de dollars aussi. D’ailleurs Trump a « remercié l’Iran » d’avoir prévenu assez tôt pour éviter les dégâts et les pertes humaines. La prochaine fois, je propose que Téhéran fasse péter leurs missiles au sol, chez eux. On gagnera du temps. En gros, les Iraniens sont faibles et s’ils cherchent un peu trop les ennuis, ils vont se faire vaporiser par Trump et ses B2 que personne n’a vu venir. Ni repartir. Et puis pour ce qui est de la fermeture du détroit d’Ormuz, autant vous dire que PERSONNE N’Y CROIT UNE SECONDE. Bref, les marchés sont au plus haut – aux USA en tous les cas – on pense presque aux records historiques – et le pétrole s’est fait démonter, parce que si ça se trouve, ils vont faire la paix tout soudain.

Et vous ne croyez pas si bien dire : hier soir Trump a annoncé la paix et même mieux : LA FIN DE LA GUERRE. Bon, il l’a annoncé tout seul, on est d’accord. Les Iraniens disent qu’il n’y a pas de paix, mais une volonté de ne pas envoyer de missiles sur Tel-Aviv, tant que Tel-Aviv n’envoie pas de missiles. Tel-Aviv ne semble pas être aligné avec le concept de paix, là tout de suite, il faut dire que ça va pas vraiment dans le sens qu’ils espéraient. À savoir ; transformer l’Iran en grand parking, mais avec un parc d’attractions et un centre commercial. Mais bon, pour être franc, ce matin on a le sentiment que l’on se fout totalement des avis des deux pays belligérants : tant que le gendarme de la planète a dit que c’était fini, c’était fini. Sinon il va leur coller des droits de douane sur leurs exportations. Pour autant qu’ils exportent quelque chose… En résumé, on se fiche pas mal de la guerre, ce qui compte vraiment, c’est les communications de Trump sur les réseaux sociaux. Et là, on va pas se mentir : c’est du lourd. Il est en train de nous faire la paix dans le monde avec la main droite, la relance économique de la main gauche et de guérir le cancer avec le pied gauche et la connerie avec le droit. Donald Trump ; l’homme-orchestre de 2025. Je ne sais pas ce qu’on ferait sans lui et avec Kamala Harris, mais ça serait sûrement moins fun.

Pour le reste… Parce qu’il reste encore des trucs…

Pour le reste, on notera que Michelle Bowman de la FED s’est prononcée hier en faveur d’une baisse des taux – ce qui en a remis une couche sur la motivation du marché qui a presque oublié la guerre pendant 5 minutes et qui a COMPLÈTEMENT oublié les droits de douane qui n’intéressent littéralement plus personne depuis 12 jours – les déclarations de Bowman étaient intéressantes, parce qu’en fait elle a dit qu’elle n’excluait pas une baisse des taux SI L’INFLATION MONTRAIT DES SIGNES DE RÉSILIENCE D’ICI AU MEETING DE LA FED DU MOIS DE JUILLET. Et bien sûr, le marché a entendu : BAISSE, TAUX et JUILLET. Mais pas le reste. Il faudra cependant retenir quand même que les premiers signes de dissonance commencent à raisonner. Ceux qui veulent garder un job APRÈS le départ de Powell sont en train de se faire connaître. Pour l’instant et si l’on en croit les statistiques, le patron de la FED a toujours suffisamment de soutien pour faire ce qu’il veut, mais ça commence à se craqueler en surface. Ce qui a l’air de plaire au marché. Oui parce que le marché, lui, il s’en fout de savoir si c’est bien ou pas de baisser les taux – économiquement parlant – lui, il veut juste que les taux baissent pour faire monter le marché aller au plus haut de tous les temps et se dire que quand même le bull market forever c’est quand même bien.

Et puis donc, ON NE PARLERA PAS DES DROITS DE DOUANE parce que c’est oublié depuis longtemps et que si on n’en parle plus dans les médias, peut-être que Trump va oublier aussi. Mais je rappelle quand même que le 9 juillet c’est dans 2 semaines. Par contre on peut parler de Tesla. Elon Musk a lancé hier son service de robotaxis à Austin. Quelques voitures, des influenceurs, un périmètre réduit, un humain assis à l’avant pour checker que tout se passe bien… et zéro accident. Résultat : +8% sur l’action Tesla. Wall Street applaudit je ne vous dis même pas ce que ça fait en market cap, c’est indécent. Mais dans le rétro, on quand même une plainte pour homicide involontaire vient ternir la fête : une famille est morte en septembre dans un Model S avec Autopilot activé. Système jugé « dangereusement défectueux », freinage d’urgence aux abonnés absents, et procès fédéral en cours.
Musk promet l’avenir autonome, pendant que la justice exhume les bugs du passé. Tesla avance, mais la route reste sinueuse. Pour ce qui est du procès et de l’impact sur le titre, c’est comme l’éventuelle fermeture du détroit d’Ormuz sur le pétrole : RIEN À FOUTRE – hier soir after close, Tesla prenait encore 2% de plus.

À noter encore

On notera encore que l’on ne parle TOUJOURS PAS DES DROITS DE DOUANE, parce que c’est TELLEMENT OLD SCHOOL… Mais en revanche on veut bien parler des chiffres de FEDEX qui vont sortir tout à l’heure. Et alors là aussi : bonne nouvelle ! On n’attend tellement rien de la part de FEDEX, que ça ne peut que monter. Le titre est en baisse de 18% depuis le début de l’année et si je me base sur notre capacité fabuleuse à voir des bull markets partout – si FEDEX ne fait ne serait-ce qu’un tout petit peu mieux que les attentes – on va nous sortir qu’en fait l’économie va super-bien et que c’est encore un SUPER BON signe pour l’avenir. Même si les attentes sont au ras des pâquerettes. À propos de chiffres, on retiendra que l’on attend également les chiffres de Micron demain soir – qui pourraient être le signal que tout va tellement bien dans le secteur des semiconducteurs que THE ONLY WAY IS UP, baby… Même si je crois que je l’ai déjà dit ce matin.

Donc pour résumer : la guerre est finie, mais personne n’était vraiment au courant qu’elle avait commencé. Le pétrole chute parce que les missiles iraniens manquent de conviction, Tesla monte parce qu’ils ont mis trois influenceurs dans une voiture avec un humain devant, et que les procès pour homicide n’empêchent visiblement pas les valorisations de grimper.

• Les droits de douane ? Disparus. Comme l’intelligence collective.
• La FED ? Dissonante mais rassurante.
• La géopolitique n’est qu’un fond sonore qu’on n’écoute même plus
• Les investisseurs sont toujours aussi indestructibles, tant que les écrans sont verts et qu’on continue à croire qu’ils seront verts demain
• Et Trump est le roi du monde, mais aussi le gendarme, l’économiste en chef, le général et le mec qui va rafler tous les prix Nobel cette année : paix, économie, littérature et médecine, celui de médecine c’est pour avoir envisagé de soigner le COVID à la javel.

On est mardi matin, la guerre des 12 jours est déjà vintage, le Détroit d’Ormuz est devenu un endroit sympa pour faire de la plongée sous-marine et tout ce que le marché veut entendre, c’est : “ça va bien se passer”. Et ça tombe bien, parce qu’à l’instant Israël vient de se prendre une salve de missiles qui a fait trois morts. Drôle de manière de faire la paix.

En tous les cas, pour le moment, en 2025, la logique rationnelle est morte, l’économie est très très floue, mais le Bull Market, lui, est éternel.

Du côté des chiffres du jour, nous aurons le CPI au Japon, l’IFO en Allemagne et Lagarde qui parlera. Aux USA, il y aura la confiance du consommateur et Powell qui va commencer ses cessions devant les politiciens américains. Il parlera aujourd’hui et demain. Et on va décortiquer ses mots pour savoir s’il y a un message codé dedans… Mais à la fin, on n’oubliera pas de se souvenir qu’à la fin, c’est TOUJOURS LES BULLS qui gagnent !

Toujours.

Belle journée à tous et à demain dans un monde où les guerres durent moins que les pubs YouTube, les procès n’empêchent pas les actions de monter, et où Trump peut ramener la paix avec un tweet et déclencher une guerre avec 24 heures de réflexion. Bonne chance à tous.

Thomas Veillet
Investir.ch

« Aujourd’hui, les marchés ne montent pas parce que tout va bien, ils montent parce qu’on refuse d’admettre que tout va mal. »