Le 2 avril 2025 restera probablement une date mythique dans le « hall of fame » de la finance mondiale. Donald Trump avait annoncé son intention de taxer tout ce qui entre aux États-Unis de manière assez violente et que ceux qui ne négocierait pas seraient immédiatement passés par les armes. La suite vous la connaissez, on a flippé parce que l’inflation allait exploser aux USA et on a paniqué parce que le reste du monde allait entrer en récession. Et probablement que les USA, aussi. Et puis Trump a commencé à jouer avec les « deadlines ». Et les marchés ont repris la confiance en pariant sur le fait qu’on ALLAIT trouver des solutions. C’est plus ou moins fait. Sauf pour l’inflation.

L’Audio du 24 juillet 2025

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La séance en hausse (pour changer)

Le deal annoncé il y a un peu plus de 24 heures sur le Japon aura donc déclenché la ruée sur à peu près tout. Tous les indices du monde étaient en hausse, le Japon parce qu’ils ont signé un deal, les USA parce qu’ils sont la contrepartie du deal et que, globalement le deal en question se rapproche plus d’un braquage à main armée que d’un deal commercial. Et le reste du monde montait parce que la conviction « qu’ils étaient les prochains sur la liste » était montée de 200%. D’ailleurs après la clôture américaine, l’économiste en chef du monde libre : Donald Trump, a annoncé que dès demain (donc aujourd’hui), il allait annoncer le même type de deal avec l’Europe. On ne sait pas s’il disait « DEMAIN » dans le sens métaphorique et ça pouvait vouloir dire la « semaine prochaine ou le mois prochain », ou c’était vraiment demain, donc aujourd’hui. Dans le doute, les marchés l’on pris du côté du verre à moitié plein et sont pleins d’espoir pour les prochaines heures, même si une partie de « l’annonce » a déjà été « pricée » dans les mouvements de marché de la veille.

Bref, ce qu’il faut retenir de la séance de la veille, que ça soit en Europe, ou le CAC prenait 1.37% dans une forme tellement resplendissante que pendant un instant, on avait l’impression que Bayrou avait décidé de baisser les impôts de 50% parce qu’ils avaient trouvé du pétrole à la mairie de Pau et que, du coup, les trous de Le Maire avaient été comblés. L’Allemagne reprenait 0.83% et la Suisse explosait de plus de 1.54% comme si le fait qu’il y ait plein de Japonais en Suisse pendant l’été, laissait à penser que NOUS aussi on avait signé le deal tarifaire par procuration et que nous aussi, on pourrait vendre plus facilement notre production automobile aux USA. Et puis alors aux USA c’était presque plus fun que la fête de l’indépendance et pendant un bref instant, on a cru qu’ils avaient finalement réussi à annexer le Canada. Le Nasdaq est presque au plus haut de tous les temps, tout comme le Dow Jones, alors que le S&P500 qui prenait encore 0.78%, battait son propre record de la veille et conservait le maillot jaune. Vous l’aurez compris, le moteur de la performance, c’est les deals tarifaires. Et puis un peu les chiffres du trimestre, mais ça c’est individuel et on va y revenir. Mais pour le moment, l’explosion de joie est due au deal avec le Japon, les espoirs de deal similaire avec l’Europe et bien d’autres encore, puisque Trump a dit qu’il y aurait tout une série d’annonces ces prochains jours – jusqu’au 1er août. Un peu comme depuis qu’il a prêté serment. D’ailleurs depuis sa victoire aux élections de novembre dernier, j’ai dû changer plusieurs fois les touches T-R-U-M-P sur mon clavier, pour EXCÈS d’utilisation… Je ne crois pas me souvenir avoir écrit une chronique ou rédigé un article pour Bilan Magazine SANS avoir utilisé le mot « TRUMP »… Et je dois dire que les lettres I-N-F-L-A-T-I-O-N, sont dans un sale état également.

Inflation = disparition

Et c’est d’ailleurs assez fou, parce que dans ce marché qui ne s’arrête plus de monter en ANTICIPANT des accords entre les USA et le reste du monde, on ne parle même plus d’un des problèmes de fonds qui avait terrorisé le marché en avril dernier : l’INFLATION. Je rappelle, pour mémoire, qu’une des craintes était le fait que le moindre droit de douane allait mettre de la pression sur les marges des entreprises et forcer ces dernières à monter les prix pour ne pas faire faire des cauchemars à leurs actionnaires, tout en augmentant ipso-facto les prix à la consommation du consommateur. Et si vous avez pas compris, le consommateur, c’est nous.

C’était donc une des craintes principales le 2 avril. Et aussi un des dommages collatéraux qui empêchait Powell de baisser les taux. Mais maintenant on s’en fout, parce que comme Powell va se tirer dans une dizaine de mois et que Trump va nommer une marionnette pour le remplacer, le théâtre de guignol de la FED va EN PLUS BAISSER les taux pour booster encore un peu plus l’économie et rendre l’Amérique Great Again. Et puis pour ce qui est de l’inflation, on s’en fout. On en reparlera quand le S&P500 aura enfin touché les 8’000 et que l’on se rendra compte que le kilo de bœuf aux hormones élevé dans les plaines du Texas a doublé de prix sur la même période. Mais on s’en foutra encore plus, parce qu’on aura gagné tellement d’argent avec le marché que l’on n’aura même plus besoin de regarder les prix à la boucherie et même le cubi de rouge importé de France qui coûtera le prix d’un flacon de Channel N°5 ne nous fera plus aucun effet. En plus d’ici six mois, on sera bien trop occupés à organiser les festivités pour l’inauguration de la statue de 240 mètres de haut à l’effigie de Donald Trump, qui sera installée à la place de la Statue de la Liberté, dans la baie de New York. Parce que la Liberté c’est très surfait si l’on compare avec le capitalisme sauvage et le pognon.

Des résultats, des résultats, mais pas de volatilité

Trêve de plaisanteries : hier les marchés étaient en folie et le S&P500 reste le maître du jeu, tant que Nvidia ne rebat pas des records. Mais au-delà des annonces de Trump, il faudra quand même se souvenir que nous sommes en pleine période de publications trimestrielles et qu’hier, il y avait du lourd. Du lourd puisqu’après la clôture, nous avons eu droit aux publications de Google, Telsa, IBM, Service Now et Chipolte. Dans une moindre mesure et avec une portée inférieure à celle des missiles qu’ils produisent, Thales a également fait le point sur son trimestre. Prenons donc une peu de hauteur pour faire le point de situation…

Tesla, ça sent le caoutchouc cramé

On commence par Tesla qui commence à faire clignoter l’indicateur « low battery » et en plus ne parvient pas à trouver un SUPERCHARGEUR à moins de 150 bornes. Disons-le franchement : ça sent un peu la fuite d’huile avec risque d’incendie électrique. Le résultat net est en chute libre de 16%, chiffre d’affaires en recul de 12%, ventes automobiles en baisse de 13,5%… Le tout sur fond de Model Y reliftée et de Cybertruck version light, comme si un nouveau « facelift » pouvait sauver la baraque. Elon Musk, lui, fait diversion avec ses robotaxis à 6,90$ la course à Austin (et encore, sur invitation), pendant que les acheteurs, eux, fuient. L’effet Musk est en train de s’user, surtout après ses clashs politiques. Et attention : plus de crédit fiscal de 7’500 dollars à venir, ni de gros chèques carbone. Bref, le Q3 s’annonce compliqué et ce, même si les Robotaxis devraient couvrir la moitié des States d’ici la fin de l’année.

Alphabet-Google, la marche en avant, mais le sac à dos est de plus en plus lourd

Alphabet a marché sur les attentes durant le second trimestre. Le bénéfice par action est de 2,31 $ contre 2.18 attendus par les stars de la finance. Le chiffre d’affaires est de 96.4 milliards en hausse de 14% et bien évidemment, le Cloud cartonne avec une hausse de 32% sur un an et 250 millions de contrats dans la poche. Côté pub, le moteur de recherche grimpe de 12%, YouTube de 13% et la machine tourne toujours à plein régime. Mais tout n’est pas rose : les nouveaux moteurs de recherche IA commencent à grignoter le terrain. Google réagit avec son propre « mode IA », mais la pression monte. Mais alors surtout, Alphabet a lâché une bombe, puisque les investissements pour 2025 passent de 75 à 85 milliards. Les investisseurs avalent de travers, même si la vision long terme est claire : construire l’infrastructure IA du futur. Conclusion : Alphabet livre un bon trimestre, mais dépense comme si demain n’existait pas. La croissance est là, mais il va falloir surveiller la rentabilité. Le titre a mal pris les premières annonces de Capex et s’est repris pour le reste. Google était en hausse de 1.7% hier soir.

Le burrito ne fait plus recette

Chez Chipotle, l’indigestion continue. Deuxième trimestre de suite avec une baisse de fréquentation : -4.9% de trafic, ventes en recul, et prévisions de croissance annulées. C’est simple : ils ne voient plus aucune croissance sur les ventes comparables en 2025.
La bonne nouvelle ? Le Adobo Ranch dip semble ramener quelques clients depuis juin. Mais les investisseurs, eux, n’ont pas attendu : -9% en after-hours. Oui, parce que c’est pas une sauce piquante qui va faire revenir les foules pour manger des burritos sur le long terme, c’est l’argent.

Bons chiffres, mais trop d’attentes

IBM a fait le job. Résultats supérieurs aux attentes : 2.80$ de bénéfice par action, 17 milliards de chiffre d’affaires, et le logiciel qui cartonne à +10%. Mais voilà : quand ton action a déjà pris +28% depuis janvier, le marché te demande la lune. Pas de feu d’artifice donc, et le titre recule de 5% après les annonces. Trop d’anticipation tue l’anticipation.

L’IA comme levier de croissance

Carton plein pour ServiceNow. Résultats au-dessus de tout, guidance relevée, et une punchline du CEO façon blockbuster : « L’IA, c’est l’extinction annoncée pour les logiciels CRM traditionnels ». Les contrats AI explosent, +50% par rapport au trimestre précédent. Le chiffre d’affaires progresse de 22,5%, et les marges s’envolent. Résultat : l’action grimpe de 7% direct. Quand l’IA ne fait pas que rêver, mais encaisse aussi du cash, ça fait plaisir.

la Défense fait le job (et plus encore)

Et pout terminer, cocorico : Thales livre un semestre solide comme un char Leclerc. Défense et Avionique cartonnent, avec des commandes à +14% au-dessus des attentes, un chiffre d’affaires à +8%, une marge qui passe de 11,5 à 12,1%, et un free cash-flow qui explose à 499 millions, alors qu’on en attendait… 200. Seule ombre au tableau : la division Cyber & Digital toussote, plombée par l’intégration d’Imperva, société de Cybersécurité rachetée en 2023 pour 3.6 milliards. Mais Thales compense avec la Défense, encore et toujours. Merci l’Inde, merci les Rafale Marine. Ah oui, et la France booste son budget défense à 64 milliards d’ici 2027. Traduction : encore plus de contrats à venir pour Thales, plus d’impôts à payer aussi… Le titre a tout de même perdu 2.83% sur la séance, mais sur le long terme, tout le monde veut du Thales, un des meilleurs investissements responsables du moment, selon le gouvernement français qui se protège de Poutine et des attaques extra-terrestres.

Du côté de l’Asie

Les marchés asiatiques sont dans le vert ce jeudi matin, stimulés par les résultats solides d’Alphabet, qui ont dopé tout le secteur tech, les profits record de SK Hynix, dopés par la demande en IA, qui ont boosté l’ensemble des valeurs semi-conducteurs. Et surtout, l’optimisme autour de l’accord commercial entre le Japon et les États-Unis, qui apaise les tensions douanières. Au Japon, le Nikkei 225 prend 1,9%, proche de ses records de 2024, et le TOPIX établit un nouveau sommet historique. Le pays a évité le pire : les droits de douane passent de 25% à 15% sur ses exportations vers les USA, notamment dans l’automobile. C’est toujours douloureux, mais bien moins que prévu. Reste plus qu’à voir comment le Japon va gérer sa crise obligataire avec un rendement toujours au-dessus des 3.10% sur le 30 ans. En Chine, les indices CSI 300 et Shanghai Composite gagnent 0,3%, tandis que Hong Kong (+0,5%) profite de la tech, mais est freiné par les valeurs automobiles électriques. Le pétrole est à 65.59$, l’or est à 3’387$, le rendement du 10 ans américain est à 4.39% et le Bitcoin vaut 118’500$.

Dans les nouvelles du matin – ou plutôt de la nuit, devrais-je dire – il y a Trump qui a parlé et qui soutien encore l’IA. Donald Trump a révélé hier, avoir envisagé de démanteler NVIDIA pour stimuler la concurrence dans l’IA, avant d’abandonner l’idée, parce que trop complexe. Il a présenté un plan en 90 points pour encadrer l’IA aux États-Unis et a signé trois décrets exécutifs pour assouplir les règles environnementales, faciliter les exportations et interdire les IA biaisées politiquement. Le président a salué le travail de Jensen Huang et affirmé vouloir assurer la domination mondiale des États-Unis dans l’IA. Il a dénoncé les régulations locales et exigé un cadre fédéral unique qui s’impose à tous les États. Bref, l’IA, c’est bien, l’IA américaine avec un drapeau étoilé collé sur le front, c’est mieux.

Des nouvelles

Dans les nouvelles du jour on parle ENCORE de Trump, puisqu’il va se rendre à la Fed ce jeudi, une première depuis près de 20 ans, pour un président, afin de faire pression directement sur Jerome Powell. Il critique régulièrement le patron de la banque centrale ON LE SAIT et a même évoqué publiquement la possibilité de le limoger. Cette visite est un geste symbolique fort qui ramène le sujet de l’indépendance de la Fed face au pouvoir politique, encore une fois sur la table. Trump a récemment consulté des élus républicains sur l’idée de virer Powell, avant de reculer officiellement, tout en gardant la menace dans l’air. Powell, de son côté, affirme que la loi le protège d’un renvoi présidentiel, ce qui n’a jamais été tenté dans l’histoire américaine. Si vous voulez en savoir plus, il y a une vidéo sur Zonebourse qui en parle et c’est moi qui l’ai faite….

Le rachat de VMware par Broadcom pour 61 milliards est contesté devant la justice européenne par le groupe CISPE, qui regroupe notamment AWS. Il accuse Broadcom d’avoir abusé de sa position dominante en imposant des licences restrictives et en augmentant les prix. CISPE reproche à la Commission européenne d’avoir validé la fusion sans conditions suffisantes, malgré des alertes répétées. La cour de justice de l’UE devra décider si l’approbation du deal doit être réexaminée. Il paraît que Broadcom est terrorisé. Et puis, les ventes de voitures neuves en Europe ont chuté de 5,1 % en juin, leur plus fort recul en dix mois, avec une demande électrique en ralentissement – quelle surprise – les constructeurs appellent à de nouvelles mesures de soutien pour accélérer la transition vers les véhicules à batterie. L’Allemagne, l’Italie et la France affichent des baisses marquées, tandis que les hybrides rechargeables (+38%) et les électriques (+14%) résistent mieux.
Face à la concurrence chinoise et aux tarifs douaniers de Trump, les groupes européens jouent gros et comptent sur une politique européenne plus agressive pour rester dans la course. Mais tranquille, avec les droits de douane qui vont se signer avec l’Europe, les Américains vont se précipiter pour acheter des Renault….

Des publications

Les futures sont encore en hausse ce matin – 0.08% – et on attend toujours un wagon de publications. On va commencer avec des trucs bien de chez nous, puisque ce matin, Roche et Nestlé vont publier. Les deux géants du SMI ne vivent pas franchement leurs meilleures vies, mais on peut espérer une embellie. Mis à part ça, il y aura surtout LVMH qui publiera, puis BNP, Deutsche Bank, Newmont et Intel ce soir après la clôture. Intel ne sera pas l’Intel d’il y a 20 ans, mais on surveillera quand même les annonces ce soir, parce qu’hier ASM a publié de bons chiffres, mais les commandes étaient décevantes et il ne faudrait pas que l’on commence à penser que le business des semiconducteurs commence à ralentir.

Côté chiffres économiques, il y aura une avalanche de PMI’s, les Jobless Claims aux USA et la réunion de la BCE dont tout le monde à l’air de se foutre comme de l’an 40. On s’en fout tellement qu’il n’y a pas un journal qui en parle. Il faut dire que le monde entier est d’accord pour dire que Lagarde ne va rien faire… Pour le reste, passez une excellente journée et nous on se retrouve demain pour boucler la semaine ! Oui hier, j’ai déjà dit à vendredi parce que je ne devais pas bosser ce matin, mais finalement, dormir c’est très surfait !

Belle journée !

Thomas Veillet
Investir.ch

« La finance, c’est 10% de données, 90% d’émotion, et 100% d’excuses quand ça tourne mal. »
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