Il y a des jours tu te lèves et tu te dis que ça ne sert pas à grand-chose d’écrire une chronique boursière. Ça ne sert pas à grand-chose, parce que globalement tu vas répéter ce que tu as déjà dit la veille : « les marchés montent, ils battent des records et les résultats des entreprises sont plutôt pas mal dans leur ensemble ». Et c’est vrai. Les résultats sont plutôt pas mal, et en plus les marchés montent. C’est encore et toujours les mêmes qui tiennent le marché et on répète encore et encore les mêmes choses. Les mêmes choses du style : « on attend la publication des chiffres de Microsoft, Meta et Google et on attend aussi la baisse des taux ». Vous avez pas l’impression qu’on radote ?
L’Audio du 29 octobre 2025
On prend les mêmes et on recommence
Donc. Ce matin on va essayer de faire simple : Ce soir Microsoft, Meta et Google vont publier leurs chiffres trimestriels et ça sera meilleurs que les attentes. D’ailleurs quand on voit le comportement des Magnificent Seven depuis quelques jours, on se demande si le marché ne s’attend pas – EN PLUS – à apprendre que les trois sociétés vont nous annoncer qu’en plus de battre les attentes, ils marchent AUSSI sur l’eau et ils multiplient les pains et transforment l’eau en vin. Hier Microsoft a atteint les 4’000 milliards de market cap et ils ont encore rien publié. Nvidia a même frôlé les 5’000 milliards, soit près de deux fois le PIB du Canada. On est donc en train d’anticiper une saison des publications trimestrielles quasi parfaite et rien ne semble pouvoir arrêter la marche en avant des indices boursiers.
Bon, en même temps quand tu as les plus grosses boîtes du monde qui te publient des chiffres au-dessus des attentes, il n’y a pas de raisons de vendre le marché. Et à voir comment les investisseurs courent après le marché ça paraîtrait surprenant que ce soir nous ayons une triple déception du côté des publications du trimestre. Hier soir les trois indices de référence américains ont terminé tous les trois au plus haut de tous les temps et ce, pour la troisième fois consécutive. Et le plus drôle dans tout ça, c’est que RIEN, mais absolument rien n’a été publié. Que ce soit la décision de la FED, les publications trimestrielles ou même une ébauche d’accord réel entre Trump et Xi Jinping. Nous ne vivons que d’anticipations et de probabilité que ça va bien se passer.
La deuxième partie de la semaine de tous les dangers
Si l’on doit revenir sur la séance d’hier, je dirais que l’on s’est contenté de certitudes et de fermes conviction comme quoi ça va bien se passer. Les chiffres qui ont été publiés hier ne sont que des chiffres qui nous ont pavé le reste de la semaine avec des bonnes intentions. Par exemple, UPS a publié des chiffres meilleurs que les attentes, Paypal aussi et Visa de même. Alors après vous me direz que ça nous fait une belle jambe parce qu’aucun des trois n’a quoi que ce soit à voir avec le trio qui va publier ce soir. Et c’est vrai. Cependant, ce qui est rassurant, c’est que les trois sociétés précitées sont des baromètres de l’état de santé de l’économie américaine. Si UPS va bien, ça veut dire que l’américain moyen passe des commandes à tour de bras chez Amazon et dans tout ce qui fait du e-commerce. Et si Paypal et Visa cartonnent, ça veut aussi dire que tout va bien au niveau des dépenses du consommateur. Et que donc, finalement, l’économie ne va pas si mal que ça.
Ce qui est donc de bon augure pour la suite. Si l’américain consomme, il doit forcément aussi consommer un peu partout et donc ça doit bien se passer chez les Magnificent Seven aussi. Sans compter qu’en plus, Powell il va baisser les taux ce soir, histoire de redynamiser l’économie. Alors bon, si je voulais être mauvaise langue, je dirais que tout ce qui va sortir entre ce soir et la fin de la semaine a déjà été largement anticipé par les intervenants et que, du coup, il faut quand même s’attendre à deux-trois prises de bénéfices au fur et à mesure que nous aurons la confirmation que tout va bien, que la FED baisse les taux et que Trump est le meilleur ami de Xi Jinping et que les Chinois vont débarquer aux USA dès la semaine prochaine avec des camions de terres rares, pour repartir avec des tonnes de soja, non sans faire un détour par les magasins de Bernard Arnault qui sont parsemés le long de la cinquième avenue à Manhattan.
Simple, basique
Pour faire simple, les marchés s’attendent à une avalanche de bonnes nouvelles dès ce soir et en attendant, on est déjà en train de préparer l’apéro pour fêter ça. Et c’est un peu ce qui s’est passé hier. L’Europe restait encore sur la retenue, mais les USA ont donc aligné une nouvelle séance de hausse dans une sérénité qui est carrément bluffante à la veille de tout ce qui va nous tomber dessus dans les heures à venir. Et moi je suis là, à 6 heures du matin à chercher des synonymes dans le dictionnaire, histoire de vous dire que tout va bien, tout en étant parfaitement conscient que dès demain le marché peut se faire déglinguer sur le principe de base que « les bonnes nouvelles étaient largement dans les prix ». Ou alors on va continuer de monter en se disant que « de toutes façons, Powell va encore baisser les taux en décembre ».
Il faut dire que finalement, le SHUTDOWN n’est pas une mauvaise chose, puisque comme on ne « sait pas trop ce qui se passe dans l’économie », la FED n’a pas d’autre choix que d’aider ladite économie pour ne pas qu’elle se pète la gueule plus que de raison. Et puis ça serait ballot d’apprendre par le Bureau of Labor Statisics, que pendant que les fonctionnaires étaient en vacances forcées, tout a ralenti, les jobs se sont évaporés et l’inflation a continué de ralentir gentiment. Du coup, la FED risque de faire un vrai boulot d’anticipation ce soir, en partant du principe qu’effectivement l’économie ne va pas si bien que ça et qu’il faut lui donner un coup de pouce avant que ça dégénère. Bref, on ne vit pas sur du concret, mais on achète surtout sur des supputations par rapport à l’avenir. Et c’est ainsi que l’on peut résumer la séance d’hier. Tout va bien se passer, tout se passe bien et il faut fêter ça parce qu’il est plus que probable que la fin de semaine soit placé sous le signe d’une avalanche de bonnes nouvelles. Finalement, si ça baisse à partir de ce soir, ça sera surtout parce qu’on avait déjà anticipé que tout allait bien se passer… En gros, nous sommes des visionnaires et lorsque nous aurons la confirmation que nos visions sont les bonnes, il sera temps de se poser des questions pour savoir si on continue d’acheter pour anticiper la PROCHAINE baisse des taux en décembre, ou s’il faut tout vendre parce qu’en finance, il faut toujours acheter la rumeur et vendre les faits…

En Asie
En résumé, tout se passe bien et tout s’est bien passé hier. Nous sommes tous convaincus – visiblement – que tout va bien se passer dans les prochaines heures. Le marché n’est pas stressé et il est convaincu que les Magnificent Seven sont au top de leur forme, que Jerome Powell est notre ami et que ça va bien se passer demain entre Trump et Xi. Que demande le peuple, sinon de voir le S&P500 clôturer au-dessus des 7’000 avant le prochain meeting de la FED de décembre ? Ce matin en Asie les marchés sont le reflet de cet optimisme, le Nikkei s’emballe de près de 2% pour fêter la hausse de Nvidia aux USA et l’anticipation du meeting Trump-Xi, la Chine est en hausse de 0.36%, pendant qu’Hong Kong est légèrement en baisse. La confiance est là et nous n’avons peur de rien que ça soit en Orient ou en Occident.
Le pétrole est à 60.21$, l’or est à 3982$, le Bitcoin s’échange à 113’000$ et le rendement du 10 ans américain est à 3.98%.
News of the day
Nvidia vient de prendre une participation d’un milliard de dollars dans Nokia, et l’action du groupe finlandais s’est envolée de 22% en une journée. Oui, Nokia, le fabricant du 6210, revient sur le devant de la scène grâce à… l’IA. L’accord prévoit une collaboration stratégique sur la 6G, où Nokia adaptera ses logiciels 5G et 6G pour tourner sur les puces Nvidia — pendant que les deux sociétés planchent sur l’intégration de leurs technologies dans l’infrastructure IA de demain. En clair, Jensen Huang ne se contente plus de vendre des cartes graphiques : il est en train d’acheter le futur des réseaux. Après Intel, OpenAI, Wayve ou encore Nscale, Nvidia sème ses milliards partout où il y a un bout d’IA à brancher.
Et puis ce matin l’UBS a publié un trimestre qui affiche 2,5 milliards de dollars de bénéfice net, soit 74% de plus qu’il y a un an, et largement au-dessus des attentes. Pendant que tout le monde doutait de sa digestion de Credit Suisse, UBS avance comme un rouleau compresseur. Une partie du résultat vient des 668 millions de provisions juridiques libérées, liées aux vieux dossiers de Credit Suisse — un petit coup de ménage bienvenu avant la fin de l’intégration prévue pour l’an prochain. Mais le vrai moteur, c’est la gestion de fortune, qui a attiré 38 milliards de nouveaux capitaux sur le trimestre. Sergio Ermotti, le patron, peut bomber le torse : « exécution disciplinée, momentum solide », bref, la Suisse qui gagne. Reste un caillou dans la chaussure : le gouvernement veut relever les exigences de capital, histoire de ne pas revivre un “Credit Suisse 2.0”. Et là, UBS tousse un peu. Mais pour l’instant, les marchés adorent : le titre gagne plus de 11% depuis le début de l’année.
Conclusion
Grosso modo, ce matin il faut retenir que dans l’ensemble, tout va bien. Et que, si ça se trouve, ce soir ça ira encore mieux. Israël vient de frapper à nouveau la bande de Gaza en représailles de la mort d’un soldat israélien et pour le reste, le monde merveilleux de la finance est convaincu que ça va bien se passer ces prochaines heures. Il ne reste donc plus qu’à se donner rendez-vous demain matin pour confirmer la chose !
Belle journée à tous !
Thomas Veillet
Investir.ch
“I have no special talent. I am only passionately curious”
Albert Einstein