À quelques jours de la fin du mois, les marchés sont plus en forme que jamais. L’inflation bricolée de la semaine dernière était « moins pire » que prévu – ce qui est donc UNE BONNE NOUVELLE. Trump va rencontrer Xi cette semaine et nous sortir un deal de derrière les fagots – comme d’habitude – d’ailleurs, Bessent a déjà commencé à en parler hier. Et puis la FED va baisser les taux, comme prévu. Sans oublier, bien sûr que 5 des Mag7 vont publier des résultats qui vont obligatoirement être spectaculairement explosifs. Le reste ne sera qu’une question d’interprétation. Les futures sont déjà en train d’exploser à la hausse rien qu’à l’idée de voir arriver toutes ces EXCELLENTES nouvelles.

L’Audio du 27 octobre 2025

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La semaine grisante qui nous attend

Cette semaine, tout se joue entre Washington, Pékin et Powell. D’un côté, Trump s’apprête à serrer la main de Xi Jinping en promettant un “deal historique” (comme tous les deals qu’il signe avant de les déchirer trois semaines plus tard) et de rechanger d’avis la semaine suivante. De l’autre, Jerome Powell se prépare à baisser les taux une nouvelle fois, alors que l’inflation caracole toujours à 3%. Et au milieu de tout ce cinéma, une Bourse américaine en plein orgasme boursier, qui continue de battre des records comme si de rien n’était. Bienvenue dans l’économie schizophrène de 2025.

Ce week-end, pendant que Trump se balade quelque part en Asie, Scott Bessent – son faire-valoir et Secrétaire du Trésor – a passé son temps en « négociations commerciales » avec les Chinois. Rien n’a été annoncé « officiellement » de manière conjointe par les deux pays, mais comme d’habitude, la Team Trump a tout balancé à la presse dans les 12 secondes après être sorti de la salle des négociations. En gros, Bessent s’attend à que la Chine reprenne ses achats de soja de manière massive et ce, sur plusieurs années. Et que, dans la foulée, ils retardent la mise en place des réglementations sur les terres rares, affaire qui avait mis le feu aux poudres il y a deux semaines. Bon, entre deux le Président Américain a changé 8 fois d’avis (au moins), mais ce que Bessent a déclaré hier – si ça se confirme – c’est encore un accord de dingue que les Américains viennent d’obtenir.

Je ne sais pas ce qu’ils détiennent comme dossier à charge contre les négociateurs chinois, mais ça à l’air d’être du lourd. Quoi qu’il en soit, le premier round des négociations entre les Américains et les Chinois semble s’être hyper-bien passé, ce qui est d’excellente augure pour le meeting entre Xi et l’agent orange qui est prévu ce jeudi. Les futures américains sont déjà en pleine euphorie et à ce rythme, je ne serais même pas surpris que le S&P500 tape les 7’000 cette semaine déjà. Surtout que Powell, il va baisser les taux cette semaine !!!

Le grand moment de la FED

Oui, c’est la semaine de la FED. Ce moment que l’on attend tous depuis…le dernier meeting de la FED. Cette nouvelle baisse des taux qui est attendue depuis le début de ce nouveau cycle de baisse des taux qui a commencé il y a plus de 2 ans. La baisse de cette semaine fait partie d’un plan quinquennal qui doit ramener le taux au plus bas possible pour faciliter le crédit et dynamiser l’économie américaine. La probabilité d’une baisse est au-delà des 90% (selon les sondages) et la question portera probablement plus sur la suite des évènements. La plupart des experts s’attendent à une autre baisse similaire avant Noël, mais ENCORE UNE FOIS, les mots de Powell mercredi soir, seront extrêmement importants.

Pourtant, il y a quand même des gens relativement rationnels qui se demandent comment est-ce que Powell peut être aussi confortable de baisser les taux avec une inflation qui reste au-dessus des 3% – bien au-delà de l’objectif des 2% fixé par la FED. Alors oui, le CPI qui a été publié en catastrophe vendredi dernier, par un BLS qui est en congé depuis bientôt un mois, démontre que les chiffres étaient « moins pire » que prévu et que ça satisfaisait amplement les intervenants. Il faut dire que Powell est pris entre deux feux. D’un côté il sait que s’il baisse trop les taux, l’inflation pourrait repartir et rapidement devenir ingérable. Non, parce qu’il faut tout de même reconnaître que oui, le CPI était moins pire, mais que sur certains secteurs comme l’énergie, ou la viande, ça continuait de monter dangereusement…

L’emploi

Mais de l’autre côté, il ne faut pas oublier que – même si aucun chiffre n’est publié pour cause de SHUTDOWN – on sait que l’emploi est en train de partir en vrille. Le marché de l’emploi s’essouffle, la création de postes s’effondre, les entreprises commencent à licencier (même General Motors s’y met), et le mot “récession” commence à refaire surface dans les conversations de banquiers d’affaire. Alors, pour éviter la noyade, la Fed décide de desserrer la ceinture monétaire. Les taux sont jugés “trop restrictifs”, et Powell préfère éteindre le feu avant qu’il ne prenne, au risque de faire repartir l’inflation comme il y a quelques années. Peu importe que l’inflation soit encore au-dessus de la cible, l’urgence, c’est de sauver l’emploi.

La logique est simple : “Mieux vaut baisser trop vite et corriger ensuite, que garder les taux trop hauts et casser la baraque.” C’est de la gestion du risque façon Hedge Fund Manager, mais c’est tout ce qu’il a sous la main – d’autant plus qu’en l’absence de publications, il pilote à vue. Et quand on lui demande si ce n’est pas dangereux de baisser les taux alors que les prix montent encore, Powell répond calmement que les hausses de prix sont “transitoires” et liées… aux tarifs douaniers de Trump. Tiens, le coup du transitoire, il me semble qu’on nous l’a déjà fait… Mais pendant que tout le monde regarde les taux, la vraie bombe se cache ailleurs. Le Quantitative Tightening — ce grand ménage monétaire lancé par la Fed depuis deux ans — qui arrive peut-être à sa fin. Le « QT », comme on l’appelle, c’est le processus par lequel la Fed réduit la taille de son bilan en laissant expirer ses obligations, histoire d’absorber un peu de la liquidité qu’elle avait injectée à l’époque du COVID. Et si la Fed annonçait la fin du QT cette semaine ? Le revirement serait monumental avec le retour à une politique “accommodante”, et potentiellement un nouveau QE déguisé. Les marchés pourraient s’emballer, pas parce que les taux baissent, mais parce que la planche à billets s’arrête de tourner dans le mauvais sens. Mais si au contraire il dit que le processus continue, ce sera…plus compliqué… Autrement dit, le vrai suspense de cette semaine, ce n’est pas la baisse des taux. C’est ce que Powell dira (ou ne dira pas) sur le bilan de la Fed.

Magnificent Seven Magnificent…

Et puis alors, en plus de la FED et de la valse à trois temps entre Xi et Trump, comme on risquait de s’ennuyer, il y aussi la publication de 5 des Magnificent Seven entre mercredi et jeudi soir. Microsoft, Alphabet et Meta vont publier leurs chiffres trimestriels plus ou moins en même que temps la FED fera son laïus et jeudi, Amazon et Apple en remettront une couche. Pour le moment, 87% des sociétés qui ont publié leurs chiffres du trimestre ont fait mieux que les attentes. Mais les réactions post-résultats sont surtout basées sur ce que l’on appelle les « whisper numbers » – en gros, on annonce des attentes officielles, mais dans les couloirs des salles de trading, on attend autre chose que tout le monde sait, mais que personne n’ose dire. Du coup, il ne suffit plus de faire aussi bien que les attentes, il faut faire aussi bien que les attentes qui se murmurent dans les couloirs de Wall Street et faire très attention à ce qu’on dira en conférence de presse.

Pour faire simple, nous entamons une semaine qui a le pouvoir de tout péter à la hausse, comme à la baisse. Bon, au vu l’optimisme ambiant et du fait qu’aujourd’hui, c’est pire de rater le train que risquer de se faire prendre en ciseaux dans la une correction, on a assez logiquement tendance à regarder vers le haut. Il est clair que les tendances sont tellement claires et établies à la hausse, qu’il faudrait vraiment quelque chose de merdique version champions league pour nous faire brutalement tourner la veste. Aujourd’hui, si vous êtes bearish, on vous jette des pierres, et même, pas besoin d’être bearish, si vous vous posez des questions sur la rationalité de l’économie ou même de la géopolitique, vous risquez de vous faire caillasser par le camp adverse jusqu’à que vous changiez d’avis. La semaine qui nous attend sera tout simplement énorme et à tous points de vue, mais pourtant, le marché donne l’impression de ne jamais avoir été aussi serein par rapport à tout ce qu’il l’attend. Après tout, Trump et Xi ne vont pas se jeter les assiettes au visage et se finir à coups de pieds, ils vont trouver une solution qui devrait plaire aux marchés, d’un côté comme de l’autre de la planète. Après tout, Powell va baisser les taux et c’est positif, le reste n’est qu’une question d’interprétation et puis, soyons honnête, personne ne comprend rien à ces QT et QE. Et puis pour terminer, vous croyez vraiment que Microsoft, Meta, Alphabet, Amazon et Apple ont foiré leur trimestre ? Avec l’avènement de l’IA et le fait que sans ces cinq-là, on revient à l’âge de la pierre et ce matin on devrait se vêtir de peaux de bêtes pour aller chasser le mammouth ?

Non, encore un fois, la semaine va bien se passer. On aura plein de choses à raconter, on va brasser un maximum d’air et à la fin on pourra acheter des casquettes S&P7000 made in China disponibles sur des sites qui n’auront pas payé trop de droits de douane parce que l’accord USA-Chine sera bien ficelé et puis au pire, si le marché se casse la gueule, ça sera le moment parfait pour mettre en place notre bonne vieille stratégie du BUY THE DIP !!!

En Asie

Ce matin l’Asie est déjà en mode FULL POWER, on dirait que rien que le fait que Trump, autrement dit : le Messie Économique, soit en train de survoler la région, l’économie renaît, il sème des emplois, de la croissance, de la joie et du bonheur ! L’autre gars avec les cheveux longs et qui était mal rasé, multipliait les pains, Trump relance les économies partout où il passe, il dynamise les deals, il crée de la richesse. Le Nikkei vient même de passer la basse psychologique des 50’000, en hausse de 2%. La Chine et Hong Kong sont en train de monter de 1% et on a vraiment l’impression que rien ne peut arrêter ce marché qui est en plein délire boursier rien qu’à l’idée que Trump puisse signer un deal de folie, que la FED baisse les taux et que les cinq magnifiques, qui représentent un quart du S&P500, vont tout simplement continuer à l’être… magnifiques.

Du côté des matière premières, le pétrole est à 61.73$, l’or s’effrite à nouveau puisque le narratif classique tend à dire que l’optimisme aidant, il n’y a plus besoin de valeur refuge, tellement on est confiant. Et pendant ce temps, le Bitcoin remonte à 115’000$ et le rendement du 10 ans américain est de 4.03%.

Dans les nouvelles du jours

On ne va pas se mentir, si vous lisez la presse du matin, tout se concentrera sur les quelques sujets que nous venons d’aborder. En revanche, on notera quand même qu’il se passe aussi d’autres choses qui sont susceptibles d’intéresser les intervenants, des choses comme le fait que Novartis est toujours en mode shopping, puisqu’ils viennent d’annoncer le rachat d’Avidity Biosciences pour la modique somme de 12 milliards de dollars cash, soit 72 dollars par action — un joli bonus de 46 % sur le cours de vendredi. L’affaire est déjà validée par les deux conseils d’administration, et elle s’inscrit dans la stratégie “nouvelle génération” du boss Vas Narasimhan, qui veut transformer Novartis en machine à thérapies géniques. Avidity bosse justement sur des traitements ARN ciblés pour les maladies neuromusculaires, avec des produits en phase avancée. En clair : pas des promesses fumeuses, mais des molécules presque prêtes à sortir du labo. Avec cette opération, Novartis revoit même ses ambitions à la hausse ; sa croissance annuelle moyenne prévue entre 2024 et 2029 passe de 5 % à 6 %. Le titre a clôturé à 49.15$ vendredi dernier, il y a des actionnaires qui commencent bien la semaine.

Autrement, Javier Milei a remporté haut la main les élections de mi-mandat. Son parti, La Libertad Avanza, a décroché 41 % des voix, loin devant les péronistes, et obtient assez de sièges pour bloquer toute opposition au Parlement. Bref, il peut enfin gouverner sans mendier des alliances. Dans son discours triomphant, Milei a lâché : “Les Argentins ont dit non au modèle de l’échec.” Derrière la victoire, il y a Donald Trump, son plus fidèle sponsor. Washington a accordé à l’Argentine une ligne de swap de 20 milliards et acheté directement des pesos pour éviter l’effondrement de la monnaie. Et puis toujours au chapitre Trump par-ci, Trump par-là, le Président a annoncé une nouvelle taxe de 10 % sur le Canada, furieux d’une pub ontarienne reprenant un vieux discours de Ronald Reagan sur les dangers du protectionnisme. Selon Trump, l’annonce “FAKE” aurait manipulé les propos de Reagan pour influencer la Cour suprême avant une audience sur les tarifs américains.
Résultat : il punit Ottawa, malgré le fait que 85 % des exportations canadiennes restent déjà exemptées via l’USMCA. Doug Ford a promis de retirer la pub, mais elle a continué de passer pendant la Série mondiale, ce qui a mis Trump hors de lui. En résumé : un nouveau front pour une nouvelle guerre commerciale pour une pub télé, bienvenue dans la diplomatie version télé-réalité.

Côté chiffres de ce début de semaine, il n’y aura pas grand-chose, c’est à partir de demain que ça va commencer à être plus sérieux et du côté macro, comme d’habitude, rien de neuf, SHUTDOWN oblige. Et puis, en ce qui concerne le SHUTDOWN, justement, tant que Trump ne sera pas rentré de l’autre bout du monde, il ne faut pas compter que ça s’améliore. La semaine prochaine, cela fera deux mois qu’on n’a aucun chiffre de l’emploi officiels… La bonne nouvelle, c’est qu’au moins ça évite au BLS de dire des conneries et de se ridiculiser avec leurs chiffres bidons…

Excellent début de semaine à tous et on se retrouve demain pour de nouvelles aventures !

Thomas Veillet
Investir.ch

« Failure is simply the opportunity to begin again, this time more intelligently. »
– Henry Ford