Ça n’est pas encore cette fois que le S&P500 battra de nouveaux records. Pour être franc avec vous, on pourrait chercher des justifications à la baisse de 0.14% sur le S&P500. On pourra certainement trouver des raisons comme : « nous faisons des ajustements de portefeuilles en attendant la décision de la banque centrale ». Ou encore : « les investisseurs hésitent à l’approche du meeting de la FED ». Mais sincèrement, la réalité c’est que tout le monde sait que la FED va baisser les taux, tout est dans les prix. La seule chose qui nous fait douter, c’est ce que Powell va déclarer et s’il laisse supposer qu’il va lancer un QE et baisser les taux 22 fois en 2026. Le reste c’est du pipeau.
L’Audio du 9 décembre 2025
La FED, blablabla, la FED, blablabla…
Nous sommes donc au milieu de l’œil du cyclone, dans la zone de l’emmerdement maximum. Écrire une chronique boursière équivaut à essayer d’attraper l’air qui sort d’un ventilateur avec les mains. Il n’y a presque rien à dire et les marchés sont assis sur leurs mains en attendant mercredi soir, point final. Le S&P perdait 0.14%, le Nasdaq à peine plus et le Dow Jones reculait de 0.45%. Autant vous dire une journée pénible à suivre et pénible à observer. À moins que vous suiviez attentivement le deal WarnerBros/Netflix/Paramount, ou autrement dit : la famille dysfonctionnelle du cinéma et des séries télé qui se déchirent pour acheter un truc trop cher, avec trop de dette, juste pour avoir les droits de Superman et Batman.
Pour le reste, c’était mort, il ne se passait rien. Même l’indicateur d’appétit au risque ne nous a pas fait un show de 10% intraday histoire de faire comprendre aux traders en marge que c’est pas le moment de traiter du Bitcoin. Alors oui, bon, je pourrais vous parler du fait que les derniers sondages donnent une probabilité de 89% de voir les taux baisser demain soir, mais sincèrement ? 86 ou 89% ça change quoi sur la performance journalière du S&P ? 0.03% ? Bref, on brasse de l’air en attendant mercredi soir et les seules choses qui sont intéressantes, c’est les trucs qui se passent en dehors des mouvements des indices. Là ce matin je suis tombé sur une étude qui estime que les employeurs américains auront viré 1’200’000 personnes en 2025, pendant que le S&P500 termine au plus haut de tous les temps et affiche une performance de pratiquement 17% depuis le premier janvier.
Qui s’en fout ?
Alors oui, je sais tout le monde se fout de l’état du marché de l’emploi, puisque plus c’est mauvais plus ça va pousser Powell à baisser les taux, mais ce qui est intéressant c’est qu’en plus des 1.2 millions de personnes qui se sont faites virées, il y a aussi 60% des Américains qui pensent que les USA sont en récession. Je ne sais pas si c’est censé nous faire peur, venant d’un pays où près de la moitié des habitants sont incapables de placer le Canada et le Mexique sur une carte sans se gourer, mais disons que là tout de suite, même si le PIB explose, le ressentit n’est pas top. Et ce qui est encore plus intéressant, c’est que près de la moitié des sondés disent ressentir le fait que tout augmente et que l’inflation est bien présente. Et puis, ce qui est ENCORE PLUS intéressant, c’est que l’on pourrait se demander pourquoi les Américains pensent qu’ils sont en récession alors que le PIB cartonne.
Eh ben en fait, c’est encore plus drôle, puisque visiblement une bonne partie vient des investissements dans l’IA. 63% pour être précis. Ce qui veut dire qu’en fait, sans l’IA, l’économie américaine se traînerait presque autant que certaines économies européennes. D’où le fait que l’Américain moyen ne ressent pas cette croissance, sauf s’il travaille dans l’IA ou dans la construction de datacenters. Donc, en attendant la FED qui va baisser les taux et en attendant de savoir ce que va faire Powell APRÈS avoir baissé les taux, on peut s’amuser à regarder la réalité économique qui n’a rien d’artificielle et se demander si, finalement, baisser les taux de 0.25%, ça va suffire…
La famille dysfonctionnelle du Streaming
L’autre sujet du jour, c’est le rachat de WarnerBrosDiscovery qui devient le feuilleton du moment. Paramount Skydance a décidé de sortir l’artillerie lourde et de lancer une offre hostile à 108,4 milliards pour racheter Warner Bros Discovery. Objectif : empêcher Netflix de s’en mettre plein les poches avec un deal déjà ficelé à 72 milliards pour les studios + HBO + streaming. Le board de Warner Bros a dit : « Merci Paramount, on regarde, mais pour l’instant on ne fait rien ». C’est pourtant 36 milliards de plus, mais fâcher Netflix ne semble pas une option. L’offre de Paramount est 100 % cash, 30 dollars par action, backée par des gars comme Jared Kushner, les fonds saoudiens, le Qatar, Abu Dhabi et la famille Ellison (Larry + David), qui ont apparemment la ligne directe avec la Maison-Blanche. Tout comme Kushner d’ailleurs. Ellison père aurait même appelé Trump pour lui dire qu’un mariage Netflix–Warner, c’est mauvais pour la concurrence. Encore des gens qui sont plus égaux que les autres.
Paramount insiste : « Notre offre est meilleure, plus simple, plus rapide, plus hollywoodienne et personne ne perd son job. » Netflix répond : « Les synergies de Paramount ? Ça veut dire couper des postes. Nous on ne coupe pas, on embauche. » Mais attention : si Paramount rachète Warner, on se retrouve avec un monstre télévisuel plus gros que Disney. Alors déjà que l’antitrust tiltait avec Netflix, dans le cas de Paramount ça serait pire. Sauf que le team Paramount a le Président dans la poche, ce qui pourrait simplifier les choses. Conclusion : c’est pas un rachat, c’est une telenovela. Et on en est qu’au milieu de la saison. Paramount veut convaincre les actionnaires, Netflix jure que tout est sous contrôle, Trump souffle sur les braises, et les régulateurs se préparent à une bataille qui va durer. En résumé : Hollywood vit son plus gros crossover depuis Avengers et personne ne sait encore qui va gagner à la fin. Du point de vue de Wall Street, WarnerBros est en hausse de 260% depuis le mois d’août, Netflix se prend 3% dans les dents à chaque fois qu’on parle de ce deal et Paramount a repris 10% sur l’annonce d’hier. Après, perso je m’interroge ; il y a trois jours on disait que 72 milliards c’était cher payé et l’équipe de Trump paient 108 milliards et là ça va… Intéressant non ?
Les trucs de la nuit
Ce matin je vous fais grâce de l’Asie, parce que mis à part « attendre la FED », ils ne font pas grand-chose. On retiendra juste que le pétrole s’est repris une claque. À peine après avoir passé la barre des 60$ et tenté une sortie de son canal baissier, on s’est fait un retour à la case départ parce que l’Ukraine et parce que les stocks sont trop élevés et la demande pas assez. Le baril est à 58.68$, l’or est à 4’222$, le Bitcoin est juste au-dessus des 90K et le rendement du 10 ans US s’envole à 4.18% et celui du Japon est toujours à 1.9640%.
Et puis alors du côté des nouvelles du jour, il y a un truc énorme. Quand même. Énorme parce que le Président Trump autorise à nouveau la vente des puces NVIDIA à la Chine, mais à une condition digne du Parrain : l’État américain prend 25% du business. Tu veux vendre tes chips ? Tu payes l’impôt Trump. 25% de taxes payés sur toutes les puces vendues aux Chinois. Le deal ne concerne que la H200 de Nvidia, une puce de l’ancienne génération Hopper. Les nouvelles stars, Blackwell et Rubin, restent interdites de vol pour Pékin. On partage les miettes pour le moment, pas le gâteau. Ironie de l’histoire : Nvidia estimait que les restrictions US sur la H20 — pourtant moins puissante — lui avaient déjà coûté 8 milliards de revenus. Alors avec la H200 qui revient dans le jeu, le marché pourrait redevenir monstrueux. En bourse, Nvidia prenait 2% après l’annonce, AMD +1,9%, Intel +0,4%. Bref, Wall Street adore quand Washington joue au marchand de tapis.
Mais attention, Nvidia peut vendre en Chine, mais il n’est pas encore dit que la Chine veuille de Nvidia. Pékin pousse les géants locaux à ne PAS utiliser les puces Nvidia, même les versions “déboulonnées” faites pour contourner les sanctions. L’objectif est clair : sevrage total des puces US. Jensen Huang résume l’absurdité du moment :
“Nvidia est probablement la seule entreprise de l’histoire bannie des deux côtés.”
Selon les experts, la Chine a deux motivations :
1. Mettre la pression sur les boîtes US pour qu’elles aillent pleurer à la Maison-Blanche.
2. Devenir indépendante — même si leurs modèles restent plus gros, plus lents, plus chers.
La morale de la chanson c’est que Trump ouvre la porte pour vendre une puce d’hier en prenant 25% au passage, Nvidia espère récupérer quelques milliards, Pékin continue d’avancer ses propres pions, et le match techno-économique US–Chine reste totalement imprévisible. Netflix, Paramount et WarnerBros plus HBO n’auraient pas réussi à inventer un scénario plus tordu.
Dans les autres nouvelles, on notera encore que Donald Trump – encore lui – a sorti le chéquier pour un plan de soutien de 12 milliards en faveur des agriculteurs américains. Sur le papier, ça paraît énorme, mais une fois divisé par le nombre de fermes, ça ressemble plus à un petit coup de pouce qu’à une révolution. Ça représente 6’300 dollars par ferme. Les marchés s’en foutent totalement. Les fabricants de tracteurs étaient en baisse parce que la Maison-Blanche parle de rendre les machines “moins chères”, les investisseurs comprennent “pression sur les marges”. Les vrais gagnants potentiels, ce sont les vendeurs de semences, d’engrais et de produits de protection des cultures. L’argent frais va d’abord dans ce qui permet de planter, pas dans un tracteur flambant neuf. Mais même là, les réactions ont été molles. Au final : Trump distribue un chèque, les agriculteurs soufflent un peu, Wall Street reste dubitatif, et personne n’imagine que douze milliards vont changer le visage de l’agriculture américaine du jour au lendemain.

Les chiffres
Du côté des chiffres, nous aurons apparemment les JOLTS aujourd’hui, et puis le Meeting de la FED qui commence avec un suspense insoutenable qui durera jusqu’à demain soir 20h00… Faites vos jeux, rien ne va plus ! Pour le moment, les futures sont en hausse de 0.05% et il est plus que probable que la journée qui nous attend soit aussi pénible que celle de la veille.
Puisque vous n’aurez rien à faire, il y aura un webinaire ce soir en direct de chez Swissquote, webinaire animé par Marco Rastaldi et votre serviteur. Nous serons en live dès 18h00 et jusqu’à 19h00. C’est gratuit et vous pouvez vous inscrire avec le lien ci-dessous :
https://www.swissquote.com/fr-ch/private/inspire/education/webinars/lia-une-thematique-propice-lutilisation-des-produits-dots
C’est le dernier de l’année. Alors on vous attend avec vos questions !
Pour le reste, on se voit demain pour patienter encore un peu, passez une excellente journée et faite vos offrandes à Jerome Powell pour qu’il soit enclin à nous aider !
Thomas Veillet
Investir.ch
“What is the point of being alive if you don’t at least try to do something remarkable?”
― John Green,