La note macro de Nicolas Blanc, Responsable de l'Allocation chez Ellipsis AM.

Le nombre surprenant de facteurs temporaires qui sont venus impacter l’économie allemande en 2019 a fini par suggérer une faiblesse structurelle, annonciatrice d’une récession en zone euro, les propos rassurants des officiels allemands et de la BCE apparaissant progressivement comme des vœux pieux. Les dernières statistiques publiées viennent heureusement apporter un espoir de voir la conjoncture se redresser :

• Les commandes à l’industrie, retraitées des ordres de gros, ont rebondi de 3,5% sur le mois de décembre, alors que les ventes des usines allemandes progressaient de 2,7%. Dans ces chiffres, le rebond du secteur automobile, qui avait été pénalisé par la mise en œuvre de nouvelles normes, contribue beaucoup.

• Les produits pharmaceutiques ont également vu une forte hausse des commandes et des ventes en décembre. Même si la situation reste confuse sur ce secteur, une normalisation semble s’engager.

• Sur le secteur chimique, qui avait subi la faiblesse du niveau des eaux du Rhin jusqu’à la fin décembre, le rebond est encore timide mais devrait apparaitre sur les chiffres de janvier.

• Les exportations de biens ont rebondi de 1,8%, ce qui pourrait être une autre manifestation du rebond du secteur automobile. Les importations progressent encore plus, à 2,5% sur le mois, signe que la demande intérieure reste vigoureuse.

•La baisse de la production industrielle en décembre était certes une mauvaise nouvelle mais celle-ci est imputable à la construction (sans cette dernière, la production gagne 0,2% sur le mois).

• Les chiffres du chômage et de la croissance des salaires montrent que l’Allemagne dispose d’un puissant relai de demande intérieure pour contrer la faiblesse des exports.

• Face aux vents contraires venus de l’extérieur (et les pressions de ses partenaires de l’UE), le gouvernement prévoit plusieurs mesures de soutien budgétaire visant à promouvoir l’innovation des entreprises et les projets d’infrastructures.

Pour se convaincre que l’Allemagne sort effectivement d’une zone temporaire de turbulences, il faudrait une confirmation des indicateurs avancés, dont la baisse est ininterrompue depuis le début 2018. La publication de l’IFO en fin de mois et les PMI du mois prochain en seront une occasion cruciale. La poursuite de la baisse anéantirait le timide optimisme du marché, comme le ferait également une décision américaine de mettre à exécution sa menace d’instaurer des droits de douane sur l’automobile.

Brexit : le risque de marché s’approche

La réaction des marchés face à des crises en développement est rarement progressive. Au contraire, des événements connus depuis longtemps peuvent subitement avoir un impact de marché, sans nécessairement d’information nouvelle.

Il pourrait en aller ainsi du Brexit. Le déroulement des négociations est facile à prévoir et devrait laisser la menace du hard Brexit monter quasiment jusqu’à la dernière limite. Or, le scénario du hard Brexit serait une déflagration économique. Qu’on songe, pour s’en convaincre, à ce que l’on attribue à une simple modification des normes sur l’automobile allemande. Alors que le premier mois de l’année a été dominé par le soulagement qui a suivi les exagérations de 2018 (ralentissement de la conjoncture couplée avec un resserrement monétaire américain), ce sujet a été relégué au second plan, les marchés considérant que la probabilité finale du hard Brexit était faible. Un scenario probable pour nous serait une baisse de marché à l’approche de l’échéance, suivie par un rebond lorsque – comme nous l’imaginons – un délai sera mis en place.