La tendance ESG, bientôt partie intégrante des piliers juridiques européens de la finance.

Si Bruxelles a rencontré à la fin de l’été de cette année 2020 quelques résistances de la part de certains gestionnaires, ces derniers demandant entre autres un report de la mise en place des nouvelles règles d’investissement durable arguant une complexité de la législation, la volonté du régulateur européen d’apporter un cadre juridique en matière de finance durable n’est pourtant pas une surprise.

Cela fait effectivement quelques années maintenant que le monde financier observe cette montée des eaux progressivement s’emparer du cœur des clients, que les conférences ne portent plus que sur le climat et le rôle primordial que la finance doit jouer dans ce combat, que se multiplient les actions non-gouvernementales en la matière et que la pression monte pour davantage de transparence au sein des processus traditionnels d’investissement.

Quel a été l’élément déclencheur capable de sonner le glas de cette nouvelle ère? Certains parlent des Accords de Paris de 2015, d’autres du rapport spécial des Nations Unies pour le changement climatique de 2018. Ou peut-être que le phénomène ne fait finalement que refléter l’aboutissement de la montée en puissance d’une demande grandissante au sein de la société civile–on a vu la nouvelle popularité d’acteurs tels qu’Extinction Rebellion, le défilement des images de Greta traversant l’Atlantique à la voile, ou encore entendu le discours de cette adolescente controversée critiquant la politique du Président des Etats-Unis. Vingt ans après la bulle internet, cette nouvelle génération internet, «les millennials», investisseurs de demain, critiquent aujourd’hui le monde de leurs parents et souhaitent poser les premières pierres d’une planète «plus durable».

En tous les cas le phénomène n’est pas nouveau, et pourtant on peut se le demander, la finance est-elle prête et pourra-t-elle réellement répondre positivement aux attentes des différents acteurs concernés?

Devant ce tsunami ESG, le régulateur ne souhaiterait-il pas, au travers de ce nouveau bouclier juridique, tout simplement armer le monde de l’investissement afin de l’aider à mener ce projet inéluctable à bien.

Le phénomène s’est accéléré et progressivement les gérants ont, les uns après les autres, répondu présent aux demandes des investisseurs. Ainsi le monde de l’investissement se dit capable de modifier le comportement des entreprises, capable d’orienter les investissements vers une transition énergétique, capable de boycotter tout un secteur d’activité si jugé «non ESG», et enfin, capable d’allier performance financière et développement durable. Le projet semble aussi noble qu’ambitieux.

Alken est un exemple parmi tant d’autres, parmi cette majorité de fonds qui n’était pas ESG il y a 10 ans. Non, mis à part quelques exceptions, les fonds ne parlaient pas cette langue. Non pas parce qu’ils ne le souhaitaient pas, mais parce que Investissement et ESG appartenaient à deux sphères différentes, à deux mondes à part. Or aujourd’hui, le projet dans lequel nous nous inscrivons est de fusionner ces deux acteurs. Si beau soit-il, il n’est pas mince affaire et il serait hypocrite de dire que l’on se transforme «ESG» en une nuit.

L’alignement des deux planètes requiert ainsi un long travail d’analyse, de réflexion et de communication. Ainsi, doit-on bientôt interdire le court-termisme, l’utilisation de credit default swaps ou les stratégies short, tous potentiellement jugés antinomiques avant le long-termisme, pierre angulaire de développement durable? Dans le sens inverse, doit-on investir dans des énergies renouvelables «coûte que coûte», même si la construction d’éoliennes ou la production d’un nouveau parc automobile électrique nécessiterait des tonnes de cuivre, d’acier ou de nickel, créant lui aussi, à son tour, un coût environnemental significatif, probablement encore plus important sur le court-terme que le business as usual. Et que faire du fameux pilier social de l’ESG? Comment est-ce que le gérant doit-il justifier une interdiction d’investir dans ce qui est aujourd’hui décrit comme des «vices»-tabac, alcool, pornographie, industrie du sucre, travail forcé des enfants, cannabis. Est-ce vraiment le rôle d’un fond d’investissement de se positionner face à ces enjeux et débats sociétaux parfois encore largement controversés?

A la question «êtes-vous ESG?», nous répondons que «nous y réfléchissons, nous y travaillons, nous étudions cette transformation et les moyens d’actions qui nous sont actuellement offerts». Sans prétention, c’est peut-être cela finalement,  être «ESG», essayer d’observer plus en profondeur le monde qui nous entoure et en comprendre ses enjeux.

Chez Alken, nous sommes ravis de participer à ce tournant, aussi compliqué que passionnant soit-il, et espérons que tout ce travail pourra répondre favorablement aux attentes des investisseurs, et plus globalement de la société civile.

Notre projet–Chronologie:

Alken devient signataire des UNPRI en 2012 et commence à utiliser les analyses et scores ESG préparés par VigeoEiris en 2013. En 2014, Alken met en place une stratégie de «negative screening».

C’est ensuite en 2019 qu’Alken renforce l’utilisation de son fournisseur de données VigeoEiris, nome en interne un ESG Officer et crée sa propre méthodologie afin d’identifier les matérialités ESG propres à chaque secteur. La même année toujours, Alken devient signataire des TCFD. Last but not least, la même année enfin, Alken décide d’intégrer l’analyse ESG au sein de son processus d’investissement.

En 2020, Alken met en place sa nouvelle stratégie de «positive screening», élargit sa liste d’exclusions à d’autres types d’armes controverses ainsi qu’à d’autres secteurs d’activités, par exemple des secteurs d’activités liés aux énergies fossiles ou au tabac, selon les stratégies. Toujours en 2020, Alken engage auprès de ses investisseurs en se focalisant sur les notions ESG et sa matérialité interne.

Juillet 2020 : Alken obtient la note générale de A pour son rapport UNPRI de mars 2020.

Octobre 2020 : les stratégies convertibles et income ainsi que une stratégie equity obtiennent leur premier label ESG LuxFLAG.

Aujourd’hui Alken poursuit son travail d’analyse et de recherche. Nous œuvrons à la mise en des différents piliers juridiques ESG européens prévus pour 2021 et 2022, ainsi qu’à l’obtention de labels additionnels.