iFood est dans la liste des entreprises les plus innovantes d'Amérique latine. Malgré les controverses, la société brésilienne continue de croître à une vitesse impressionnante. Et malgré la tendance baissière observée dans les cours des actions de sociétés de livraison de nourriture en ligne, l’industrie enregistre une croissance soutenue. Ainsi, iFood a le potentiel d’attirer davantage d'investisseurs, et même d’aider le hollandais Just Eat Takeaway à sortir la tête de l'eau.

Par Esty Dwek, CIO

 

Boosté par la pandémie

FLOWBANK -Esty DwekFondée en 2011, iFood est une plateforme brésilienne de commande et de livraison de nourriture en ligne. Elle opère principalement au Brésil et au Mexique, mais elle a également fusionné ses activités en Argentine et en Colombie avec son rival PedidosYa.

La pandémie de Covid a donné un coup de pouce important à iFood puisque l’entreprise a doublé ses commandes l’an dernier. Le total des commandes a été multiplié par près de quatre depuis 2019 et par plus de huit depuis 2018.

Aujourd’hui, iFood dessert plus de 1’250 villes en Amérique Latine grâce à plus de 236’000 restaurants clients.

2022.03.23.iFood
Source : Prosus

Même si la fin de la pandémie fait peur, l’entreprise s’est étendue au-delà de son cœur de métier dans l’épicerie, la logistique et même le crédit aux établissements de son système, afin de diversifier les risques d’une baisse de commande de nourriture.

En 2021, en association avec Movile et Zoop, iFood a lancé la plus grande banque de restaurants au monde, offrant à ses partenaires des comptes bancaires numériques sans frais mensuels ni frais de transaction, et d’autres services financiers, via son application iFood.

Proche du seuil de rentabilité

iFood ne génère pas encore de bénéfices. Les pertes commerciales ont atteint 100 millions de dollars au cours du dernier semestre, mais ces dernières sont principalement dues aux investissements nécessaires pour la croissance de la société.

Cependant, l’un des propriétaires d’iFood Prosus a annoncé que la compagnie était déjà proche du seuil de rentabilité.

Quelques obstacles sur le chemin

Quand on grandit aussi vite, on se fait forcément des ennemis.

Dernièrement, Uber a annoncé sa décision de quitter la plus grande économie d’Amérique latine après avoir lutté pour briser la domination d’iFood, qui est devenu un leader national incontesté dans le secteur de commande de nourriture en ligne.

Mais l’entreprise est critiquée pour son comportement déloyal visant à consolider sa position, notamment à travers les accords d’exclusivité qui empêcheraient les bars et restaurants de rejoindre d’autres plateformes. Même si les accords d’exclusivités sont très fréquents dans l’industrie, compte tenu de la position dominante d’iFood sur le marché, les détracteurs affirment que la pratique est abusive et étouffe une concurrence effective à travers le pays.

C’est vrai, mais le secteur de la livraison de nourriture est, par nature, un marché exclusif, car plus les entreprises grandissent et atteignent une taille critique, plus les frais sont bas et plus les économies d’échelle sont importantes. Le secteur est donc par nature condamné à aboutir à un oligopole naturel, voire à un monopole naturel.

Néanmoins, les critiques amènent des mesures réglementaires. À la suite d’une plainte officielle du concurrent colombien Rappi soutenu par Softbank, l’organisme de surveillance antitrust du pays a provisoirement interdit à iFood de signer de nouveaux accords d’exclusivité il y a près d’un an alors qu’une enquête se poursuivait.

Mais peu importe. Selon l’Association brésilienne des bars et restaurants (Abrasel), environ 80% des restaurants qui proposent la livraison au Brésil sont sur iFood, alors que la part de marché de la société peut aller jusqu’à 90%. L’entreprise pourrait donc bien miser sur une croissance solide de l’industrie plutôt que de manger les parts de marché des autres pour grandir.

2022.03.23.Brazil food delivery
Part de marché d’iFood au Brésil (source measurable.ai)

À qui appartient iFood?

Movile, un mini-conglomérat technologique brésilien avec des racines dans une entreprise informatique cofondée par Bloisi à la fin des années 1990, détient 77% d’iFood, tandis que Movile elle-même est majoritairement détenue par Prosus.

Puis, le hollandais Just Eat Takeaway (JET) détient une participation de 33% dans la société. JET a déclaré au début de 2021 que l’offre la plus élevée pour sa participation dans iFood s’élevait à 2,3 milliards d’euros, mais qu’il ne souhaitait pas vendre car la valorisation était ‘tout simplement trop basse’. Les analyses suggèrent qu’iFood vaudrait au moins 10 milliards d’euros, ce qui suggère qu’actuellement JET ne profiterait pas entièrement du potential d’iFood.

iFood pourrait-il aider Just Eat à voir la fin du tunnel baissier?

Le cours de l’action Just Eat Takeaway a atteint un sommet en octobre 2020 et n’a cessé de baisser depuis lors. La vente massive est principalement due à la baisse des perspectives de croissance de l’industrie de commande de nourriture conséquence de la fin de la pandémie. Ce dernier point est vrai pour les principaux concurrents, y compris DoorDash.

Cela dit, la plus grande entreprise de livraison de repas d’Europe a annoncé en janvier une augmentation de 14% de ses commandes au quatrième trimestre, conformément aux attentes, alors que les derniers résultats de DoorDash ont surpris les investisseurs et ont laissé entendre que la livraison de nourriture est une habitude pandémique qui risque de perdurer.

Bien qu’il soit difficile d’évaluer un creux pour les entreprises de livraison de nourriture-qui sont également touchées par la flambée des prix de pétrole, nous supposons que les stocks de livraison de nourriture devraient trouver un creux après avoir perdu beaucoup de valeur depuis leur pic de la pandémie. Le cours de l’action JET a été divisé par plus de quatre depuis octobre 2020, alors que la société détient un portefeuille de marques attrayantes, dont iFood qui est cité comme l’une des entreprises technologiques les plus prometteuses de l’année en Amérique latine, et qui pourrait aider JET à stopper l’hémorragie dans les mois à venir.

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Cours de l’action Just Eat TakeAway (source: Trading View)

 

NB : Il n s’agit pas de recommandations d’investissement

 

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