«Simply Put», la chronique hebdomadaire de l'équipe Multi Asset Group de Lombard Odier Investment Managers
Par Florian Ielpo, Head of Macro
En résumé :
- Les récentes données macroéconomiques plus solides des États-Unis et de la zone euro doivent laisser les observateurs macroéconomiques perplexes – à tout le moins, elles vont à l’encontre des espérances de la Fed et de la BCE.
- L’importance croissante de la Chine fait de sa réouverture un facteur mondial qui ne doit pas être sous-estimé.
- Selon nos estimations, sa réouverture explique une grande partie de la stabilisation de l’ISM américain, prudence avec un facteur aussi temporaire.
La situation macroéconomique actuelle a de quoi laisser perplexe. Il en est ainsi parce que les trois principales régions économiques suivent actuellement trois trajectoires très différentes. Les États-Unis déclinent, la Chine se redresse tandis que la zone euro fait preuve d’une remarquable résilience. Dans le même temps, chacune d’entre elles occupe des poids dans le PIB mondial qui sont désormais à peu près comparables. La Chine représente désormais 19% du PIB mondial, les États-Unis 15% et la zone euro 12% – ces trois pays représentant donc environ la moitié du PIB mondial. La situation à laquelle les investisseurs sont actuellement confrontés est donc la suivante: ces trois zones d’influence connaissent des destins très différents, mais seule l’une d’entre elles dirige le mouvement. Il s’agit de savoir si l’économie mondiale se redresse (sans avoir connu de récession), se détériore ou « atterrit en douceur ». La réponse à cette question est encore plus délicate car chacune de ces zones influence les deux autres, ce qui signifie que nous devons d’abord déchiffrer quelle est cette influence et où va cette influence. Cette édition de Simply Put se concentre tout particulièrement sur la situation chinoise: La Chine s’est améliorée au cours des deux derniers mois et cette amélioration est susceptible d’avoir obscurci les chiffres macroéconomiques de la zone euro, mais aussi ceux des États-Unis. Il est temps d’effectuer quelques régressions économétriques pour décomposer ces influences.
Economie à haute fréquence
Le point de départ de notre analyse de la semaine est présenté dans la figure 1. Elle montre l’évolution journalière de notre indicateur de nowcasting pour chacune des trois zones. Leur évolution récente, depuis janvier de cette année, apparaît assez clairement sur le graphique. Le déclin de la croissance américaine qui a débuté en juin 2022 a conduit l’indicateur à passer de 70% (croissance supérieure au potentiel) à 25% actuellement (croissance très inférieure au potentiel). Si le lecteur doute que les États-Unis ralentissent réellement, il lui suffit d’observer la contraction de la consommation de biens et de l’investissement dans les rapports sur le PIB des trois derniers trimestres. Le cas de la Chine est très différent: La Chine ayant eu recours à beaucoup moins de stimulation fiscale pendant la pandémie, sa trajectoire de croissance était plus faible, mais elle s’est améliorée dernièrement avec la réouverture du pays. Cette situation a conduit notre indice de croissance chinoise à retrouver un niveau proche de 50% (croissance sur le potentiel): pas si mal compte tenu des circonstances. Enfin, la zone euro fait preuve d’une grande résistance, affichant une évolution stable depuis l’été de l’année dernière. Trois destins différents et les trois régimes les plus courants d’un cycle économique, mais un seul d’entre eux indique ce qui va suivre.
Un rôle plus important pour la Chine
Aujourd’hui, la situation que nous connaissons est qu’aux Etats-Unis (ligne rouge de la figure 1), notre indicateur de croissance a cessé de se dégrader depuis le mois de mai. Ce résultat est d’autant plus troublant que la crise bancaire de mars était précisément censée accélérer le ralentissement, aidant la Fed à transmettre sa politique monétaire hawkish à son économie. Pourtant, notre indicateur étant composé de 75 séries temporelles différentes, 50% d’entre elles montrent désormais des signes de stabilisation : un point de données ne fait pas une tendance, mais cette évolution est suffisamment déroutante pour qu’elle mérite d’être étudiée.
On pourrait soupçonner qu’au lieu de voir les Etats-Unis reprendre de la vigueur, le pays bénéficie plutôt d’une stimulation indirecte due à la réouverture de la Chine. La figure 2 montre l’impact estimé sur 12 mois d’une augmentation d’un point de l’indice PMI chinois sur deux des principaux indicateurs macroéconomiques: l’ISM américain et la confiance des industriels de la Commission européenne (sur la base de fonctions de réponse impulsionnelle). Le graphique illustre clairement deux éléments clés:
- La zone qui profite le plus d’une hausse de l’activité industrielle en Chine est la zone euro – nos estimations le montrent très clairement.
- Récemment et ce, depuis la fin de Covid, la sensibilité des Etats-Unis et de la zone euro à la Chine a augmenté – et cette augmentation a conduit au doublement de leurs réactions respectives.
Pour dire les choses simplement, nos estimations glissantes indiquent que les États-Unis et la zone euro réagissent deux fois plus qu’avant à la réouverture de la Chine. Cela signifie que derrière la situation « idiosyncrasique » de chaque zone se cache probablement l’impact mondial de la reprise en cours en Chine.
Net de la réouverture, le ralentissement se poursuit
Si ces estimations sont correctes, on peut essayer de les utiliser pour éliminer l’influence de la Chine et voir ce qui se passerait aux États-Unis sans cette réouverture. Pourquoi est-ce important? Parce que la réouverture de l’économie chinoise est un choc temporaire – au moment où ce choc (positif) disparaît, chaque indicateur devrait se débarrasser de son impact et revenir à sa tendance initiale. La figure 3 montre le résultat de ce calcul. La ligne rouge représente notre estimation de l’ISM manufacturier américain, déduction faite de l’influence des fluctuations de l’activité économique chinoise. En résumé, l’ISM américain devrait être inférieur à 45 au lieu de 46,9 en mai et, plus important encore, il devrait être resté sur sa tendance baissière. Ce message est probablement important si l’on pense que la réouverture de la Chine est un facteur de soutien temporaire à l’économie mondiale – les récentes mesures de stimulation pourraient rendre cet élément temporaire un peu plus durable, mais selon nous, le message clé demeure: la tendance baissière aux États-Unis s’est arrêtée temporairement et s’explique en grande partie par la reprise chinoise. Il en va de même pour la zone euro, restons prudents à l’aube du 3ème trimestre.
En termes simples, la stabilisation des États-Unis est probablement liée à la réouverture de la Chine. Si ce facteur devait être temporaire, les principaux indicateurs avancés américains déclineraient à nouveau.
Macro/Nowcasting Corner
L’évolution la plus récente de nos indicateurs propriétaires de nowcasting pour la croissance mondiale, les surprises d’inflation mondiale et les surprises de politique monétaire mondiale conçus pour suivre la progression récente des facteurs macroéconomiques qui animent les marchés.
Nos indicateurs nowcasting indiquent actuellement:
- Notre indicateur de croissance est resté stable au cours de la semaine : il indique un environnement de faible croissance.
- L’inflation mondiale devrait continuer à décliner, notre indicateur d’inflation restant faible cette semaine encore – le rapport sur l’inflation américaine en a donné une nouvelle indication.
- Notre signal de politique monétaire a franchi le seuil qui sépare une position neutre d’une position dovish, l’indicateur américain ayant décliné au cours de la semaine. Cette situation est principalement le reflet de données liées à l’investissement, telles que le taux d’utilisation des capacités, qui conduisent à cette situation: l’ère du resserrement pourrait bien être derrière nous.
Source : Bloomberg, LOIM
Note de lecture: L’indicateur de nowcasting de LOIM rassemble des indicateurs économiques de manière ponctuelle afin de mesurer la probabilité d’un risque macroéconomique donné – croissance, surprises d’inflation et surprises de politique monétaire. Le Nowcaster varie entre 0% (faible croissance, faibles surprises d’inflation et politique monétaire dovish) et 100% (forte croissance, fortes surprises d’inflation et politique monétaire hawkish).
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