La note macro de Nicolas Blanc du 20 novembre 2017

Nicolas Blanc, Responsable de l’Allocation chez Ellipsis AM

Alors que l’optimisme progresse sur les perspectives économiques, les marchés d’actifs risqués subissent des fluctuations très brutales, qui, en général, accompagnent plutôt des contractions de l’activité. Cet accès de fièvre pourrait résulter, selon nous, d’une conjonction de facteurs:

  • La révision à la hausse des perspectives a entrainé des réallocations importantes, avec des effets sur les prix. Ceci génère une incertitude sur les nouveaux prix d’équilibre et la crainte d’excès.
  • Il devient probable, comme nous l’évoquions la semaine dernière, que les bonnes nouvelles soient désormais passées, c’est-à-dire que les indicateurs ne surprendront plus à la hausse. Des révisions négatives ont un grand pouvoir déstabilisant.
  • Le marché des matières premières est très sensible aux données chinoises, qui se sont avérées un peu plus faibles qu’attendu.
  • La conjonction d’une surprise à la hausse sur le PIB en Europe et de doutes sur la réforme fiscale aux US a entrainé une baisse du dollar qui est très préjudiciable aux actions en Europe.

En dépit de ces signes de nervosité, il nous semble qu’il est trop tôt pour annoncer le retournement du marché (le Minsky moment). La hausse de l’activité se poursuit. Elle va soutenir celle des profits, valorisant actions et obligations risquées.

 

La Chine ralentit graduellement

Comme détaillé dans La semaine en 4 graphiques, les indicateurs récents témoignent d’une décélération de la croissance en Chine, après la bonne performance au début de l’année. Ce mouvement résulte d’une politique plus restrictive. La croissance de l’endettement sur les dernières années a amené le levier global de l’économie (tous secteurs confondus) au niveau de celui des pays développés et il apparait nécessaire de freiner sa progression.

D’une part, la logique d’investissement dans les industries exportatrices a fait son temps et, d’autre part, l’investissement immobilier a crû probablement plus rapidement que la demande finale. La transition vers un modèle tourné vers la consommation et favorisant la montée en gamme industrielle peut heureusement profiter d’un environnement extérieur porteur. Alors que la croissance au S1 était proche de 7%, elle pourrait n’être plus que de 6,2% au T4.

 

Réforme fiscale, la version du Sénat

Le Sénat a présenté sa propre version de la réforme fiscale aux US, qui diffère de celle de la chambre des représentants. Le processus législatif est particulièrement complexe, car les républicains tentent d’empêcher un blocage du projet au Sénat, où ils ne disposent que de 52% des sièges – il leur en faudrait 60% pour imposer leurs vues – par l’application d’une règle spécifique aux mesures budgétaires, qui impose toutefois une neutralité fiscale à 10 ans.

Il serait donc envisagé de ne graver dans le marbre que les baisses du taux d’impôt sur les sociétés (à 20%) mais avec une entrée en vigueur différée en 2019. Il faut noter que ceci créerait une incitation à investir massivement en 2018, pour profiter d’une déduction à un taux supérieur. Si l’on peut craindre les effets collatéraux d’une mesure trop ponctuelle, il est certainement préférable de voir les entreprises investir plutôt que d’optimiser leur bilan (rachats d’actions, par exemple). La situation reste très fluide et la version définitive de la réforme, si elle a lieu, ne sera connue qu’en fin d’année.