«Simply Put», la chronique hebdomadaire de l'équipe Multi Asset Group de Lombard Odier Investment Managers

Par Florian Ielpo, Head of Macro et Aurèle Storno, , CIO Multi Asset

 

En résumé:

  • Le marché obligataire continue d’afficher un niveau élevé de volatilité, malgré la normalisation de celle-ci sur le reste des marchés.
  • Les investisseurs peinent à s’accorder sur un scénario principal, et c’est peut ce qui explique pourquoi la volatilité des taux n’a pas baissé.
  • Historiquement, les périodes où les investisseurs sont en désaccord coïncident avec une forte volatilité des obligations : pour que la volatilité des taux baisse, un plus large consensus est probablement nécessaire.

Florian Ielpo

Depuis 2022, nous avons assisté à une volatilité accrue (voire extrême) du narratif économique mondial, ainsi que des rendements financiers et notamment obligataires. L’année 2023 a commencé avec des attentes faibles et décroissantes en termes de croissance mondiale, accompagnées de craintes accrues de récession. 2024 s’ouvre sur un scénario d’atterrissage en douceur, dépendant d’une baisse de l’inflation qui permettrait l’assouplissement monétaire de commencer vers le milieu de l’année. Ces scénarios hétérogènes font que le point de vue des investisseurs diverge de manière probablement extrême aujourd’hui. Comme les prévisions de croissance et/ou d’inflation sont divergentes et instables, les anticipations de taux deviennent également instables et la volatilité des obligations reste élevée en conséquence. La volatilité des obligations est restée élevée au cours des deux dernières années, en dépit de pressions inflationnistes semblant se résorber. Si la désinflation ne suffit pas, quel facteur permettra d’y remédier? Nous pensons que le désaccord des investisseurs est probablement le chaînon manquant qui explique la permanence de la volatilité des taux: le fait que les investisseurs soient toujours divisés entre Cassandres et « perma-bulls » pourrait expliquer pourquoi la volatilité des obligations reste élevée, car cette volatilité élevée témoigne aussi d’un niveau de tension accru entre les deux types d’investisseurs. Et si nous avions besoin d’un consensus plus fort sur le scénario pour faire baisser matériellement le volume des taux?

Une amélioration de la volatilité, mais pas partout

Aurèle Storno

L’évolution de la volatilité des actions, des obligations et des matières premières est présentée en Figure 1 pour la période 2019-2024 – si vous vous êtes déjà assis avec nos gestionnaires de portefeuille, vous avez probablement déjà vu ces graphiques. Notamment, deux pics de volatilité distincts sont évidents pour toutes les classes d’actifs: le premier s’est produit pendant la crise de Covid-19 et le second à partir de 2022. À la fin de l’année 2023, le deuxième pic de volatilité s’est atténué pour les actions et les matières premières, leur niveau respectif étant passé sous leur niveau médian. Ce n’est toutefois pas le cas pour les obligations. La volatilité des obligations est restée extrême tout au long de l’année 2023 et demeure actuellement à environ 4%, dépassant sa valeur médiane de 3%. La volatilité des obligations peut être principalement attribuée à des facteurs tels que l’inflation, l’état général de l’économie et les perspectives de la politique de la Réserve fédérale, et en fin de compte à la perception, à la compréhension et à la confiance des investisseurs en ces facteurs. En 2022, alors que l’inflation atteignait son plus haut niveau depuis quatre décennies, le taux Fed ont été relevé à un rythme rarement vu et la volatilité des obligations a fait un bond en avant. À la suite de l’annonce du pivot de la Fed en décembre 2023, les taux ont baissé. Malgré cette baisse, la volatilité obligataire reste relativement élevée par rapport aux moyennes historiques. Avec une inflation en baisse, une politique monétaire dovish et une croissance relativement élevée, qu’est-ce qui pourrait encore expliquer la volatilité des obligations?

2024.02.12.Volatilité
Figure 1 : Évolution des indicateurs de volatilité des actions, obligations et matières premières développées et de leur médiane respective.

Les marchés en recherche de consensus

L’année 2024 a commencé de manière positive pour le marché des actions, avec des résultats reflétant des bénéfices plus élevés que prévu, des données sur l’emploi et le rapport ISM américain en hausse, ainsi qu’une économie américaine solide. Les détenteurs d’obligations, en revanche, se trouvent dans une situation beaucoup plus compliquée, la baisse des taux Fed ayant été repoussée au mois de mai, nous ramenant à une période qui fleure bon le « higher for longer ». Cette combinaison de facteurs crée probablement une incertitude plus grande qu’à l’habitude quant aux perspectives économiques. Une façon de mesurer ce niveau de désaccord revient à examiner comment les investisseurs s’accordent sur les perspectives économiques futures – plus facile à dire qu’à faire. Nous proposons d’estimer ce désaccord en calculant l’écart-type des trois principales enquêtes de positionnement des investisseurs de l’enquête AAII, qui indiquent les notes attribuées par les investisseurs aux expositions « bullish » (haussières), « bearish » (baissières) et « neutral » (neutres) sur les machés actions. Plus l’écart-type est important et plus l’hétérogénéité des opinions entre les investisseurs est grande – c’est-à-dire le désaccord (nous avons calculé l’écart-type de l’écart absolu par rapport à 50, leur niveau neutre). La Figure 2 montre la volatilité des obligations et la compare à cet « indicateur de désaccord ». L’incertitude sur le marché est actuellement élevée. Si l’on observe l’évolution de cette paire de séries, les périodes de désaccord accru entre les investisseurs tendent à être associées à des niveaux de volatilité des taux plus élevés. Le niveau actuel du taux de désaccord est d’environ 90%, ce qui est comparable aux taux de 2020 et 2022. Par conséquent, pour que la volatilité des obligations diminue, les participants au marché pourraient avoir besoin de parvenir à un plus grand consensus, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. La section suivante examine plus en détail cet indicateur de désaccord des investisseurs.

2024.02.12.Volatilité obligations
Figure 2 : Volatilité des obligations et désaccord des investisseurs entre 2020 et 2024

Le lien entre désaccord et volatilité obligataire

Pour nous aider à quantifier cette relation, la Figure 3 montre la volatilité moyenne respective des obligations en comparaison du pourcentage de désaccord des investisseurs. Plus la proportion de désaccord augmente, plus la volatilité réalisée des obligations augmente. Par exemple, lorsque l’indicateur de désaccord atteint 80 %, la volatilité des obligations s’élève en moyenne à 2,7%, un chiffre élevé en comparaison de la volatilité moyenne observée au cours de la période 2001-2024 (2,4%). Nous avons apparemment besoin d’un meilleur alignement des points de vue pour que la vol des taux se normalise pour de bon et que nous retrouvions notre exposition normale au risque de duration. En fin de compte, la volatilité élevée des taux peut également contenir un élément de confiance (ou de manque de confiance) de la part des investisseurs en ce qui concerne la maîtrise effective de l’inflation et de la croissance, et cette histoire ne semble pas encore avoir vu son dernier chapitre.

2024.02.12.Volatilité désaccord

Pour dire les choses simplement, les investisseurs doivent s’accorder sur le scénario macroéconomique à venir pour que la volatilité des taux baisse plus significativement.

Macro/Nowcasting Corner

Cette section rassemble l’évolution la plus récente de nos indicateurs de nowcasting pour la croissance mondiale, les surprises en matière d’inflation mondiale et les surprises en matière de politique monétaire mondiale. Ces indicateurs permettent de suivre les évolutions macroéconomiques les plus récentes qui font bouger les marchés.

Nos indicateurs de nowcasting indiquent actuellement:

  • Les perspectives de croissance se sont améliorées au cours de la semaine, notamment grâce aux données américaines et européennes.
  • Les pressions inflationnistes restent faibles mais ont progressé aux États-Unis, dans la zone euro et en Chine.
  • L’attitude de plus en plus dovish des banques centrales s’est confirmée cette semaine, notre indicateur de politique monétaire ayant baissé dans les trois zones.

2024.02.12.Croissance mondiale
Nowcasting de la croissance mondiale : Long terme (à gauche) et évolution récente (à droite)

 

2024.02.12.Inflation mondiale
Nowcasting de l’inflation mondiale : Long terme (à gauche) et évolution récente (à droite)

 

2024.02.12.Politique monétaire
Nowcasting de la politique monétaire mondiale : Long terme (à gauche) et évolution récente (à droite)

 

Source: Bloomberg, LOIM

Note de lecture: L’indicateur de nowcasting de LOIM rassemble des indicateurs économiques de manière ponctuelle afin de mesurer la probabilité d’un risque macroéconomique donné – croissance, surprises d’inflation et surprises de politique monétaire. Le Nowcaster varie entre 0% (faible croissance, faibles surprises d’inflation et politique monétaire dovish) et 100% (forte croissance, fortes surprises d’inflation et politique monétaire hawkish).


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