Contre toute attente, le marché est en hausse de 25% après avoir battu 24 fois son niveau record depuis le début de l'année.

Par James P. Cullen, Président-directeur général

 

Matin et soir, en dehors des heures d’ouverture des marchés, je consacre en général quelques heures à l’actualité financière. Un soir de janvier dernier, j’ai regardé «Smart Money», l’émission financière bien connue dont les animateurs sont tous des courtiers de Wall Street brillants, éloquents, chevronnés et aux idées bien arrêtées. Ils savent apparemment tout, mais ne sont d’accord sur rien. Ce soir-là, pourtant, un invité leur a demandé s’il leur semblait possible que le marché gagne 20% cette année. Et ils se sont tous accordés sur le fait que c’était impossible.

Un an après, le marché est en hausse de 25% après avoir battu 24 fois son niveau record. Et soudainement, l’optimiste est de rigueur, même chez nos amis de «Smart Money». Le Financial Times a récemment évoqué cette poussée d’enthousiasme en titrant:

Les investisseurs se ruent à nouveau sur les actions
Financial Times, 13 novembre, 2019

L’article en question rend compte du dernier relevé de l’enquête de Bank of America sur l’humeur des marchés, lequel témoigne de la plus forte poussée mensuelle d’optimisme que les investisseurs aient connue en 20 ans. L’auteur décrit des investisseurs saisis par la fameuse FOMO (fear of missing out), la peur de rater l’occasion. L’article cite également une enquête du Leuthold Group, selon laquelle le niveau de liquidités viendrait de connaître sa plus forte chute en trois ans – pour atteindre 4,2%, son plus bas niveau depuis 2013.

Quelques mots sur le cycle électoral

Performance du S&P 500, année préélectorale / année de l’élection d’un président pour son premier mandat
Source : Strategas, septembre 2012

2019 n’a pas dérogé à la règle qui veut que les années préélectorales soient propices à une forte croissance des marchés. À quoi doit-on donc s’attendre en 2020? L’année électorale elle-même est généralement la deuxième meilleure année du cycle puisque le marché tire profit de la dynamique enclenchée l’année précédente. Mais, comme le montre le tableau de la page suivante, la performance du marché pendant les années d’élection tend à chuter fortement – tout en restant positive – quand le rendement affiché l’année précédente dépasse les 15%.

Les deux années qui suivent une élection présidentielle sont généralement les moins favorables au marché.

Le marché est en hausse depuis 10 ans, et ce n’est pas fini

Australie – récessions et marchés baissiers
Source : Bloomberg, 30 juin 2016

Les investisseurs sont souvent persuadés que le marché prospère quand l’économie se porte bien. Mais l’histoire économique nous a montré que les choses ne sont pas si simples. Dans une précédente revue, nous avons montré que l’Australie avait connu une expansion économique ininterrompue pendant 25 ans.

Durant cette période, le pays n’a connu aucune récession, mais les marchés boursiers ont subi cinq corrections de plus de 20%. L’une d’entre elles a même dépassé les 50%.

Les fonds de pension n’ont pas délaissé les investissements à risque

Selon un article publié le 8 novembre 2019 en première page du Wall Street Journal, les fonds de pension se sont mis en quête de substituts aux rendements à long terme décents que leur ont procurés les obligations jusqu’à ce que les taux chutent. Ils s’aventurent dans des secteurs plus risqués, comme l’immobilier et le prêt direct. Certains misent même sur des actifs plus volatils, comme les obligations à 100 ans émises par le gouvernement argentin. D’autres s’exposent encore davantage en investissant dans les serres ou la gestion des déchets.

Retour aux fondamentaux

En fin de compte, ni les éléments que nous venons d’évoquer – dont le cycle électoral – ni ceux dont nous n’avons pas parlé et qui font pourtant la une des journaux – comme les droits de douane et les guerres commerciales – ne présentent d’intérêt pour les investisseurs à long terme que nous sommes. L’important est ailleurs : il nous faut investir en nous imposant une véritable discipline en matière de prix et en adoptant un horizon temporel minimal à cinq ans. Nous savons d’expérience que les autres critères de sélection des actions ne valent que pour un moment.